L’ARMEE DES OMBRES
Décidément, cette rétro Melville est vraiment intéressante. Plus on avance dans sa filmographie, meilleurs sont les films. L’Armée des Ombres est une réussite (presque) totale, qui nous plonge en pleine seconde Guerre Mondiale, au beau milieu de la Résistance.
Dès les premières minutes, on sent que l’ambiance du film sera froide, sans concession. Temps gris, pluvieux. Sauf erreur, je ne pense pas avoir vu une seule fois un rayon de soleil traverser la grisaille ambiante. Cela n’empêchera pas Melville d’offrir quelques moments plus légers, du moins pour le spectateur, notamment lors du séjour à Londres lorsque Ventura entre dans une sorte de bar où des soldats dansent (pendant un bombardement qui semble ne pas les gêner), ou pendant la traversée en avion. Des scènes à l’opposé, par exemple, de l’exécution d’un traitre dans la première demi-heure … Une scène où rien n’est montré, mais qui reste très violente émotionnellement.
Melville sait créer de la tension sans aucun artifice. Lorsque Lino Ventura explique à l’homme assis à côté de lui qu’il faudra qu’il s’enfuit au moment où il se lèvera voir le garde Allemand … Quelques secondes, voire minutes passent, sans bruit, jusqu’à ce que Ventura agisse … On retient notre souffle, jusqu’à ce que le personnage soit à l’abri. Et des scènes de tensions de ce niveau, le film en contient plusieurs, notamment celle où Simone Signoret doit aller récupérer un de leur complice en prison.
Une des forces de L’Armée des Ombres, au-delà de sa mise en scène, est son casting. Lino Ventura et Simone Signoret en imposent. Chacune de leur apparition est incroyablement juste. Difficile pour Cassel, même s’il ne démérite pas, d’exister. Et c’est peut-être là où le film perd un peu de sa superbe. Ce n’est pas tant le jeu de Cassel qui pose problème, mais son rôle qui est flou. On a du mal à comprendre son agissement, à quoi cela va servir … On se retrouve avec un personnage qui se développe doucement pour rien. Dommage. Pour le reste, c’est du tout bon, notamment Paul Meurisse.
La fin du film prend vraiment aux tripes. Et c’est avec une émotion très forte que les destins des personnages s’affichent devant nos yeux sur un superbe thème signé Eric Demarsan… Un thème qui reste en tête, tout comme ce film qui, sans aucun doute, gagne à être revu pour en tirer la substantifique moelle
9/10