Comment aborder une œuvre aussi importante, aussi dense et aussi magistrale que Lonesome Dove ?
Commençons par les origines : Tirée d’un roman de Larry McMurtry datant de 1985 et vainqueur du Prix Pulitzer, la mini série Lonesome Dove voit le jour en 1989, sous la forme de quatre épisodes d’une heure et demie chacun. Quatre épisodes que l’on peut aisément considérer comme un gigantesque film de six heures. D’ailleurs, le roman était à la base un scénario pour le cinéma, prévu pour être réalisé par Peter Bogdanovitch, avec John Wayne, James Stewart et Henry Fonda au casting. Suite à plusieurs divergences, le film tombera à l’eau et McMurtry décide donc d’en faire un bouquin. Un roman qui fait désormais partie des références absolues du genre.
Une épopée monumentale, où l’on revisite les mythes du Grand Ouest Américain au travers d’une galerie de personnages atypiques mais terriblement attachants. Et notamment le duo principal, deux anciens texas rangers amis de toujours, Augustus McCrae et Woodrow Call. Ils sont désormais fermiers au fin fond du Texas, où la vie suit son cours paisiblement. Mais quand Woodrow se met en tête de traverser le pays avec le bétail pour établir un ranch dans le Montana, c’est une grande aventure épique et humaine qui commence. Autour de leur parcours vont se greffer une bonne quinzaine de personnages.
Et c’est là où l’adaptation en mini série prend tout son sens, et va faire de Lonesome Dove un chef d’œuvre inoubliable. Car en six heures, on a le temps de construire des personnages, de les développer, de les rendre vivants. D’ailleurs, l’expédition ne démarre vraiment qu’à partir du second épisode, le premier servant uniquement à installer les personnages, les relations qu’il y a entre eux, le tout avec une grande aisance, à tel point qu’on se sent déjà chez soi avec des vieilles connaissances au bout d’une heure de métrage.
Cette installation est primordiale pour décupler la puissance de ce qui va suivre, des enjeux et des nombreuses péripéties qui vont émailler ce long périple. Et il y en a des péripéties dans Lonesome Dove, chaque personnage ayant un background travaillé et une psychologie assez poussée, ce qui renforce la grande empathie que l’on peut avoir pour eux. Un vrai modèle de narration, riche, complexe, sans manichéisme, passionnant de bout en bout et qui brasse une multitude de thèmes et de personnages.
Tous ces personnages sont incarnés par un casting de très haute volée, Robert Duvall trouve le rôle de sa vie en incarnant Gus McCrae, une interprétation magistrale pour un personnage complexe auquel on s'attache immédiatement, Tommy Lee Jones est également excellent dans le rôle de Woodrow Call, un personnage plus sobre et légèrement en retrait mais qui forme un duo très équilibré et complémentaire avec Gus.
La suite du casting n'est pas en reste, on retrouve notamment Danny Glover dans un rôle touchant, Diane Lane en prostituée bien moins caricaturale et bien plus forte que ce genre de rôle le laisse espérer habituellement. Elle est des personnages les plus importants de l'intrigue et se révèle particulièrement convaincante. On trouve également Chris Cooper, Robert Ulrich, Steve Buscemi ou encore Angelica Huston, tous parfaits dans leurs rôles. Mention spéciale au jeune Ricky Schroder qui assume un rôle difficile au milieu d'un casting aussi prestigieux.
D'un point de vue technique également, Lonesome Dove est une réussite éclatante, la mise en scène classique de Wincer, son sens du cadre et son utilisation du plan large n'ont pas à rougir face aux grands classiques du cinéma hollywoodien. Des scènes épiques en décors naturels sublimes aux scènes plus intimistes, tout est maitrisé de bout en bout et il est clair que Lonesome Dove a grandement inspiré les autres westerns sortis depuis, notamment le chef d’œuvre Open Range de Kevin Costner.
Un autre élément marquant est le ton très adulte et sombre de l’œuvre, femmes et enfants ne seront pas épargnés par la violence de l'Ouest, certains personnages principaux trouveront une fin tragique et certaines scènes marqueront durablement l'esprit du spectateur grâce à leur impact émotionnel et visuel.
Une épopée également transcendée par le score du génie Basil Poledouris, qui livre ici une très belle partition, moins grandiloquente que ses œuvres majeures mais tout aussi marquante.
Vous l'aurez compris, Lonesome Dove est une expérience cinématographique que vous n'oublierez pas, une aventure tellement riche et passionnante, qui brasse en six heures les questionnements majeurs et existentiels de l'être humain de la plus belle des manières. Une œuvre qui touche au sublime et qui vous fera passer par tout le panel des émotions humaines, de la plus joyeuse à la plus triste.
Une fois terminé, vous serez épuisés et bouleversés, mais vous n'aurez qu'une envie : retourner à Lonesome Dove avec Gus et Woodrow !
10/10