Ça m’emmerde profondément d’écrire cette critique, mais bon…
Il suffit de me connaître un peu pour savoir que j’estime beaucoup Zemeckis en tant que réalisateur, notamment parce qu’il a su faire preuve d’une certaine constance qualitative qui rendait ses films moins bons toujours un minimum intéressant à regarder. Une constance qui s’est un peu égratignée avec le récent
The Witches, clairement son film le moins intéressant depuis longtemps, et qui empire avec ce projet qui puait à des kilomètres. Alors bon, que Zemeckis ne soit plus le grand nom vendeur qu’il fut est une évidence, pour autant je ne comprend décidément pas ce qui l’a poussé à accepter de réaliser ce énième remake live-action d’un classique Disney, alors qu’il était évident qu’il n’y aurait absolument aucune liberté. On peut aisément deviner ce qui l’a intéressé dans le projet, entre la revisite d’un classique enfantin, la possibilité de continuer ce qu’il avait fait sur
Welcome to Marwen en humanisant des jouets, ou l’idée de faire un semi film musical, mais le fait est que le mec s’est complètement fait avoir derrière, au point de livrer le pire film de sa longue carrière.
Difficile à ce stade de définir ce qui a bien pu se passer derrière une production pareille, mais à la vue du résultat final, il me paraît évident que quelque chose s’est passé durant la préparation de ce métrage. Script qui n’apporte aucune plus-value vis à vis du film original, pâle copie des scènes de ce dernier, des acteurs à la rue (pauvre Tom Hanks qui essaye d’y croire autant que possible
), mais ce qui choque le plus à mon sens, c’est de constater que le film ne donne jamais l’impression d’avoir le budget qu’il a eu. 150 millions pour un résultat visuel pareil en 2022, c’est juste hallucinant
, tant on a l’impression à plusieurs reprises de voir ces films des années 2000 qui tentaient des effets visuels numériques pour des finalités franchement hasardeuses. Le final avec Monstro est particulièrement emblématique de cela : d’une part c’est globalement moche (le terme bouille numérique serait bien adapté sur ce coup là), mais d’autre part c’est bourré de petites erreurs bien visibles, genre un plan où le footage incrusté de Tom Hanks est accéléré d’un coup pour lui faire quitter le cadre rapidement comme s’il était dans un cartoon, où encore des images mises en boucle du comédien histoire de faire durer les plans plus longtemps
. De telles choses dans un blockbuster aussi friqué, même s’il était pensé pour une distribution sur Disney+, me paraissent tellement improbables que je ne peux suspecter de gros soucis en cours de production, et il sera sûrement très intéressant de lire des choses autour du film dans les années à venir.
A cela s’ajouter une direction artistique à la rue, notamment dans le choix particulièrement étrange de vouloir faire cohabiter le design d’origine des personnages et des décors avec un rendu photo-réaliste, idée qui ne marche absolument pas à l’écran et qui empêche toute implication tant le rendu sonne faux du début jusqu’à la fin. Les choix de casting dans l’air du temps sont, comme très souvent chez Disney, juste opportunistes, et la diversité de la distribution n’apporte absolument rien, genre la Fée Bleue black c’est quand même du bon gros OSEF. La mise en scène de Zemeckis est ici particulièrement transparente, et déjà que dans
The Witches je trouvais qu’il avait perdu son mojo, ici il est juste complètement absent (et ce n’est pas le clin d’œil à Roger Rabbit qui va faire la différence), c’est vraiment triste à voir de la part d’un cinéaste qui, il y a encore quelques années, livrait de beaux morceaux de bravoure et des idées de mise en scène réfléchies. Pour le coup, c’est vraiment un film qui provoque en moi un certain mépris, associé à la douleur de voir un de mes réalisateurs fétiches avoir son nom apposé sur un tel truc sans forme ni sens. Désormais, il ne me reste plus qu’à croiser les doigts pour que le chèque que Zemeckis a reçu pour ce film lui serve à faire un projet plus personnel, ça serait bien la seule chose positive qui ressortirait de ce désastre.