J’aurais mis le temps à découvrir celui-là (j’avais failli le voir l’été dernier, mais un souci technique avait fait annuler la projection, du coup j’ai attendu un an entier avant qu’il repasse sur grand écran
) et autant dire que l’attente était haute, parce qu’au-delà du fait que c’est majoritairement considéré comme le meilleur western d’Howard Hawks, c’est aussi tout simplement réputé pour être l’un de ses meilleurs films tout court. A l’arrivée, et peut-être est-ce à cause de mes attentes, j’en ressors un poil déçu, mais toutefois en ayant eu conscience d’avoir vu un très bon film. Le métrage commence de façon excellente, avec une introduction muette du plus bel effet, où tout le savoir faire visuel et narratif de Hawks s’affiche à l’écran, et petit à petit le récit va prendre son temps pour poser les enjeux qui sont assez simples : un groupe de quatre personnages prêt à défendre leur ville et la loi, un prisonnier important dans une cellule, et une petite armée prête à tout pour le libérer avant qu’il ne soit remis à la justice.
Sur cette base narrative qu’on pourrait juger assez light, Hawks développe un film où les personnages sont au centre de l’attention : plus que l’action, c’est les relations entre personnages qui intéressent ici, ce qui peut surprendre vu que le pitch pourrait aisément déboucher sur quelque chose qui cherche le divertissement avant tout (ce que fera, par exemple, Carpenter avec
Assaut, avec influence revendiquée à la clé). Du coup, ça donne un western assez particulier, avec énormément de dialogues entre protagonistes, des relations plus fouillées que dans le western habituel (la love story entre Wayne et Dickinson est vraiment approfondie, alors qu’une relation pareille dans un western classique aurait eu une dizaine de minutes à l’écran), et de l’action qui garde le pied levé avant un final où ça se lâche enfin (il y a bien quelques fusillades avant mais c’est très expéditif).
Mon principal bémol viendrait probablement de la durée un poil excessive, certes elle n’est jamais gênante (le film se suit toujours avec intérêt) mais j’aurais pas craché sur un récit un peu plus resserré, surtout qu’au bout d’un moment les relations entre adjoints font un peu du surplace (l’alcoolisme de Dean Martin met un bon moment avant d’être réglé) et qu’on a un personnage, parmi le groupe principal, qui est assez transparent (Colorado, joué par un Ricky Nelson pas très convaincant). Mon autre réserve viendrait de la filiation qu’a le film avec le
High Noon de Zinnemann, Hawks et Wayne ayant fait le film en quelque sorte comme une réponse au classique avec Gary Cooper.
High Noon était intéressant justement parce qu’il allait à contre-courant du western classique, en exposant au grand jour la lâcheté que pouvaient avoir la plupart des gens, et que l’héroïsme en prenait un sérieux coup, ici c’est du coup une trame similaire mais où on glorifie autant que possible la figure qu’incarne Wayne.
Même si
Rio Bravo est bien écrit dans l’ensemble, j’aurais pas craché sur un métrage un peu moins dans l’excès autour de son personnage principal, car c’est clairement sa plus grande limite. Pour le reste, comme dit plus haut, le film possède une mise en scène solide de la part de Hawks, et même si l’introduction reste mon passage préféré il faut bien avouer que le climax final est bien efficace dans son genre. Côté casting, Wayne est dans sa zone de confort, et la surprise du film vient plutôt d’Angie Dickinson
, de Dean Martin à contre-emploi, et de Ward Bond parfait en vieux de la vieille au grand cœur qui emmerde tout le monde (et qui tire sur ses collègues
). La musique de Dimitri Tiomkin est cool, j'aime particulièrement le petit thème avant chaque offensive, thème que Leone voudra reprendre sur son premier western avant que Morricone lui sorte une version encore meilleure. Clairement un bon film, y’a aucun doute là-dessus, mais c’est à mes yeux un bon cran en-dessous de
High Noon et de certains autres films de Hawks.