[oso] Bafouilles confuses, 2022

[osorojo]

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NORD

Film de Rune Denstad Langlo (Norvège), 1h18, 2010 - 7/10

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Un petit film comme je les apprécie, à savoir sans esbroufe, porté par son protagoniste, un ours en perdition un brin apathique qui se lance dans un road trip polaire après avoir appris qu'il était le père d'un petit garçon. Au guidon de sa motoneige, sans trop y croire ni savoir s'il veut vraiment faire le voyage, il bouffe progressivement la neige qui le sépare de son rejeton, au rythme des rencontres qui ponctuent son chemin, toutes plus étranges les unes que les autres, et pourtant profondément humaines quand on y regarde bien. Nord, c'est une comédie pince sans rire qui dépeint un quotidien pas spécialement misérable mais tout de même profondément triste dans sa banalité que l'on écorche en tétant la bouteille quand l'occasion se présente, voire un peu trop fortement pour certains, quand l'esprit sature.

Dit comme ça, on peut craindre la fable sociale balourde, mais il n'en rien car Nord est une petite parenthèse équilibrée qui pose des questions sans donner dans la fatalité en guise de réponse. Ici, c'est uniquement le moment présent qui a son importance, et le protagoniste l'a bien compris : c'est en profitant de l'assistance de compagnies éphémères parfois aussi perdues que lui et en savourant le temps que prend chaque échange qu'il se reconstruit, jusqu'à retrouver enfin certaines sensations qu'il pensait définitivement perdues.

TLDR, une petite bobine sans prétention et apaisante qui fait du bien et n'est pas sans rappeler Une histoire vraie de Lynch

[osorojo]

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SAIGNEUR

Film documentaire de Raphaël Girardot et Vincent Gaullier (France), 1h35, 2017- 8/10

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En avant pour une brutale immersion au sein de la main d'oeuvre sacrifiée d'un abattoir industriel aux méthodes bien rodées, en matière de débitage ou de gestion des ressources humaines. A l'image, les carcasses défilent, la souffrance, animale et humaine, est sourde : d'un côté le dernier souffle des 500 bovins dépecés chaque jour est rendu hors champ, nulle volonté de souligner l'évidence de la part des auteurs; de l'autre, plein cadre, les fourmis découpeuses endurent la nécessité de travailler et s'usent au rythme des chaînes de production pensées pour leur imposer une cadence d'exécution infernale. Lorsque chaque opérateur présente son poste avec son lot de gestes destructeurs une fatigue monumentale prend aux tripes, à tel point qu'on se demande comment on pourrait tenir, à leur place, dans ces conditions extrêmes. Spoiler alert, je ne tiendrais personnellement pas une demi-journée :/

Si les voir s'échauffer pour essayer de limiter les dégâts qu'ils subiront pendant leur quart prête à sourire dans les premières minutes du documentaire, bien vite le caractère amusant de ces situations improbables fait place à une tristesse sincère à mesure que les témoignages expliquent que ces gestes sont aussi nécessaires pour limiter les blessures qu'insuffisants pour contrer les ravages subis par les articulations à force de répétitions.

Cette tristesse mute ensuite en révolte quand la hiérarchie s'exprime enfin, profitant de quelques minutes de répit accordées à leurs subalternes pour leur faire la morale en les prenant, au passage, pour des incultes : c'est après tout bien de leur faute s'ils se blessent à force d'inattention —comprendre faut être plus en forme—.

Voir un vétéran acquiescer quand il se fait sermonner par son supérieur pour un geste qui perd de sa précision en fin de journée, pour cause de fatigue, et ce malgré 29 années d'expérience, a quelque chose d'incroyablement révoltant.. au sein de cette machine à débiter en masse, la plupart des ouvriers n'ont pas voix au chapitre, peu ont le luxe de pouvoir quitter l'enfer, et les cerbères qui décident inlassablement du programme de leur journée en sont pleinement conscients.

Quant aux rares qui se laissent aller à une brève contestation, c'est dans une émotion assez vive, je pense à cette dame qui, après 35 ans de boutique, au bord des larmes, essaye de faire entendre une demande de reclassement au casque rouge qui la chapeaute. La scène est émouvante, la détresse est réelle, à l'image de documentaire dans son ensemble, remarquable parce qu'il observe sans nourrir de polémique et ne s'intéresse finalement qu'à la souffrance, à tous les niveaux.

Pour ne rien gâcher, le dernier témoignage d'un rookie, entre résignation et émotion, tout sauf à sa place au sein de ce rouleau compresseur qui troque la santé de ses employés pour de la viande premium qualité en série, quand il répond à la question «comprends-tu les gens qui restent et qui sont là depuis des années» est d'un humanisme très touchant qui sied parfaitement à la note d'intention des deux auteurs : «la vie est tellement compliquée, c'est très difficile de juger les gens».

[Olrik]

Le Sang des bêtes, de Franju, était aussi un docu puissant sur le même univers. Vingt minutes à la limite du soutenable.

[Mark Chopper]

C'est un coup à devenir vegan.

[osorojo]

Le Sang des bêtes, de Franju, était aussi un docu puissant sur le même univers. Vingt minutes à la limite du soutenable.

Je l'essayerai à l'occase, mais là j'ai aimé justement que le docu soit pas uniquement à charge de l'industrie de la viande du point de vue des animaux. Il est très clairement question du problème de l'abattage à la chaîne, mais le mal-être ouvrier prend vite le dessus. Vraiment, c'est un doc à voir, intéressant pour ce qu'il dénonce de notre société malade. Toujours plus, toujours plus vite, peu importe le coût.

@Mark : jamais. Mais j'ai personnellement pas mal limité ces deux dernières années, histoire de me défaire de cette habitude de la viande à chaque repas, et je m'en porte pas plus mal. Mais je reste un bon viandard, je pense l'apprécier plus même aujourd'hui vu qu'elle est moins systématiquement dans mon assiette ^^

[osorojo]

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Good Luck to You, Leo Grande

Film de Sophie Hyde · 1 h 37 min · 5 octobre 2022 (France) - 7/10

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Beaucoup aimé ce petit essai sur la découverte du plaisir quand on n'est plus dans ce que l'on a de coutume d'appeler la force de l'âge et que l'on est donc censé observer sa libido se carapater sans trop se rebeller. La belle idée de l'entreprise, c'est de prendre un point de vue féminin pour développer le thème, ce qui est peu courant, voire quasi jamais fait (pas de souvenir d'un film sur ce thème en tout cas de mon côté). Dommage que le dernier acte soit un peu moins bon, l'envie de résolution se comprend mais fait basculer inévitablement le film dans une fable moralisatrice alors qu'il avait évité de l'être jusque là.

Pas de quoi gâcher mon plaisir pour autant, j'ai apprécié toute la première partie qui consiste à dompter le désir, à dégraisser l'esprit de ses contradictions pour réussir enfin à reprendre possession de son corps. Emma Thompson est saisissante dans un rôle complexe qui implique d'elle une sacrée abnégation mine de rien : le dernier plan pourra sembler de trop pour certains, je le trouve pour ma part courageux et nécessaire à une époque où seule la perfection du corps fait référence. Daryl McCormack, de son côté, est d'un magnétisme dingue (quel salaud), je l'ai trouvé parfait dans son rôle. Le duo trouve en tout cas une belle alchimie à l'écran.

En bref, un chouette petit film, qui gonflera sans doute ceux qui n'accrocheront pas à la démonstration, pour ma part je souscris, et à la note d'intention, et à sa mise en oeuvre. D'un pitch pareil, il était aisé de tomber dans le sordide et le démonstratif glauque mais il n'en est rien: Sophie Hyde parvient à parler d'à peu près tout ce que l'on peut s'attendre du sujet sans que jamais la vulgarité ne se fasse une place à l'image.

[osorojo]

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Dog Eat Dog

DTV de Paul Schrader · 1 h 33 min · 2017 - 4/10

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Pas grand chose à dire sur ce DTV? Dog eat dog ne passe pas très loin d'être un petit film sans prétention qui livre la came mais tourne un peu trop à vide niveau script pour prétendre à ce statut. En l'état la narration est tellement aux fraises que c'est un peu compliqué d'y trouver son compte; la fin notamment est loupée comme pas permis, pas dégueulasse en soi, et c'est d'ailleurs caractéristique du film dans son ensemble, on peut toujours se raccrocher à un truc, la musique, la photo, la mise en scène, et pourtant, ça ne fonctionne pas, la sauce ne prend jamais véritablement.
Alors il y a quand même deux trois trucs qui sauvent la séance : en premier lieu, le gros craquage des vingts premières minutes de Willem Dafoe, bien over the top comme il faut, puis par la suite quelques envolées de violence pas trop mal gaulées qui, même si elles sont complètement gratos, filent le sourire et enfin des acteurs qui clairement s'amusent comme des petits fous à cabotiner dans tous les sens, ça se sent clairement.

Mais ça ne m'a pas suffit, et j'ai fini par trouver le temps long alors que le film dure à peine 1h30. Je n'irai pas jusqu'à dire que je me suis ennuyé, mais j'ai passé mon temps à me demander l'intérêt du bouzin. Et puis en plus, on a un Cage relativement sage, c'est même le Dortmunder du lot, celui qui rattrape la folie des autres (Daffoe complètement allumé) : si ce n'est pas la preuve que le script manque de pif...

[Mark Chopper]

Je me suis tenu à distance des deux collaborations Schrader / Cage. Je crois d’ailleurs que les deux intéressés les ont totalement désavouées.

Dans le genre série B sympatoche pour une soirée, tu as vu Kiss of Death ?

[Jed_Trigado]

La pire adaptation de Edward Bunker au ciné.

[osorojo]

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Le casse

DTV de Alex Brewer et Benjamin Brewer · 1 h 33 min · 2016 - 5/10

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Bon allez, la moyenne pour ce caper movie qui possède deux trois moments amusants et une violence frontale inattendue qui sait surprendre quand elle s'invite à la fête. Mais c'est à peu près tout ce qu'il y a tirer de ce casse, si ce n'est une mise en scène qui à l'occasion prend son temps de construire des plans sympas : l'entrée dans le coffre suivie de la découverte du pot aux roses est par exemple assez chouette. Nicolas Cage et Frodon s'en sortent pas mal, chacun a un personnage un brin marginal à défendre, ça fonctionne, encore une fois sans être exceptionnel. On a quand même le droit à des petits moments estampillés Nick Cage, disons que son perso lui convient bien, un doux allumé pas loin du point de rupture. Niveau script, c'est pas dingue, mais au moins on se tape pas du trauma sorti de nulle part, les deux frangins font un film de casse et ne s'intéressent qu'à sa réalisation, c'est défendable comme note d'intention à une époque où il est de coutume de faire l'inverse.
On regrette finalement le manque d'ambition de ce casse à proprement parler, et surtout le manque d'adversité lorsque les deux larrons se mettent en action. M'enfin, j'ai vu pire, mais mieux aussi... vous l'avez compris : Le casse est un film tout ce qu'il y a de plus moyen

[osorojo]

@Mark : je l'ai vu Kiss of death, mais ça remonte pfiou, je devais être ado Ça se remate ?

[Jed_Trigado]

Je l'ai subi celui-là, mon meilleur pote me l'avait vendu comme le meilleur dtv de Cage depuis des lustres, je lui ai balancé dans la face la jaquette du dvd qu'il m'avait prêté.

Il se passe strictement rien dans ce film, un somnifère filmique.

[osorojo]

T'exagères un peu ^^ Ok c'est pas ouf, mais il se passe des trucs, j'ai vu bien pire

[Mark Chopper]

Je l'ai subi celui-là, mon meilleur pote me l'avait vendu comme le meilleur dtv de Cage depuis des lustres, je lui ai balancé dans la face la jaquette du dvd qu'il m'avait prêté.

Il se passe strictement rien dans ce film, un somnifère filmique.

J'ai cru que tu parlais de Kiss of Death, j'ai eu peur.

Retente à l'occasion Oso, Cage y est mortel.

[osorojo]

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L'apprenti sorcier

Film de Jon Turteltaub · 1 h 45 min · 2010 - 6/10

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Agréablement surpris pour le coup par ce petit film pour ado qui est un digne représentant des univers magiques à la Harry Potter. J'avoue avoir un faible pour le petit sorcier aux binocles rondes, alors quand j'ai vu le pitch de cet apprenti sorcier, j'me suis dit banco sans trop y croire pourtant : ben, vous savez quoi, j'ai plutôt bien fait.

Alors oui, et c'est bien normal vu le public cible, faut se fader le petit humour de circonstance qui va bien, mais j'ai trouvé que pour le coup on était presque dans une dynamique 90's, les blagues pince sans rire passent bien mieux que l'humour meta épuisant des superslips de nos années 2020's. Il y a un truc dans ce film qui file la banane, à commencer bien entendu par Nick Cage qui est comme un poisson dans l'eau en professeur Balthazar, tout droit sorti des 70's avec ses cheveux longs et son cuir, il s'amuse comme un dingue et ça se sent clairement. Bien aimé Alfred Molina également qui campe un adversaire amusant mais pas trop con, la menace est solide, toute proportion gardée bien évidemment. On sait bien qu'on est dans un film familial, alors ça ne va pas dézinguer sec et ça se finira bien, mais il y a deux trois moments qui font leur petit effet, et de manière générale, même si à diverses reprises ils sont un peu en dessous (j'imagine qu'on est pas dans un budget HP), les FX sont corrects, mention spéciale aux téléportations à travers les miroirs.

Le plus dommage dans ce genre de film finalement, c'est toujours le dernier acte. A croire qu'il ne peut être question que d'une opposition de deux individualités, il faut toujours que ça parte en duel pour se comparer les biceps et ça prend toujours forme de la même manière : on se court après pendant des plombes et on se tatane la tronche 5 minutes.
C'est con parce que tout le début — c'est aussi le cas dans les HP—, est sympa, avec la découverte des pouvoirs, la petite mythologie qui s'installe, mais bon, au bout du compte leurs compétences ne leur servent qu'à se foutre sur la gueule, dommage
Ah remarque, j'exagère, parce que le petit apprenti voldepleutre fait un trait d'humour à ce sujet en signant un clin d'oeil à Merlin l'enchanteur lorsqu'il essaye d'abuser de ses pouvoir pour faire le ménage. Séquence bien cool, dommage qu'il n'y en ait pas davantage.

Pour finir avec ce billet un brin trop positif (on va se demander ce que j'ai picolé ce soir), un gros point noir tout de même, et il est de taille : Jay Baruchel parle du pif et ne sait pas tenir son regard, ce qui finit par lasser sacrément. Heureusement c'est contrebalancé par le charme fou de Teresa Palmer.

Pas un film de dingue, c'est clair, c'est même par moment bien culcul, typique de la bobine faite pour la famille mais que diable, je me suis bien amusé : Cage est un gros bonus à lui tout seul dans ce film, alors si vous l'appréciez et que vous aussi quand vous êtes certains qu'on ne vous observe pas, vous essayez de faciliter vos déménagements à coups de Wingardium Leviosa, gageons que vous pourriez vous amuser devant cet apprenti sorcier, en plus il dure tout juste 105 minutes : je vous l'ai dit, c'est un digne rejeton du cinoche de divertissement des 90's calibré pour les moutards encore en train de muer. Et pour moi donc, un vieil ours blasé qui peut encore se laisser abuser par son imaginaire.