[Alegas] Mes Critiques en 2022

Modérateur: Dunandan

Nos âmes d'enfants - 8/10

Messagepar Alegas » Sam 12 Fév 2022, 15:45

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C'mon C'mon (Nos âmes d'enfants) de Mike Mills
(2021)


Un très joli film que voilà, que j’ai failli totalement zapper jusqu’à ce que je découvre la superbe bande-annonce en salle. Un journaliste radio, qui interview des enfants pour leur demander leur avis sur l’avenir, se retrouve contraint de garder son neveu qu’il connaît mal et dont les parents traversent une crise, et va peu à peu créer un lien avec lui. C’est sur ce pitch simple que Mike Mills, réalisateur que je ne connaissais pas jusqu’ici (mais dont je vais tenter de rattraper le travail), livre un drame très touchant. Sur le papier, rien d’extraordinaire (chaque personnage ressort grandi du récit en apprenant des autres), mais c’est particulièrement bien écrit avec des personnages toujours justes, avec ce qu’il faut d’humour et d’émotion. C’est surtout l’écriture du gamin que je trouve très réussie, on très loin de quelque chose d’académique, c’est pas un gosse plus intelligent que les autres et il peut souvent être lourdingue à sa façon, mais le fait est qu’il sonne toujours vrai, et nul doute que ça doit beaucoup aussi à son interprète Woody Norman qui est une sacrée révélation.

C’est difficile de parler du film tant c’est des tranches de vie qui vont se succéder pour former une évolution cohérente, mais nul doute que c’est un film que j’aurais pu trouver anecdotique avec un mauvais traitement ou écriture alors qu’ici j’étais à fond dedans tout le long. Joaquin Phoenix, sans surprise, est excellent en mec un peu paumé qui va devoir assumer des responsabilités qu’il n’attendait pas, et qui va réapprendre à voir le monde à travers les yeux d’un enfant. Et puis big up au personnage de la mère qui est aussi très bien écrit. Le choix du noir et blanc sur un film pareil peut paraître pompeux au premier abord, mais ça apporte au final un côté intemporel qui marche en bien, en plus d’offrir de jolis idées de photographie. Clairement un film que je recommande tant qu’il passe encore en salles, un joli message sur le monde actuel et les générations futures, et nul doute que ça finira dans mes meilleures surprises de 2022.


8/10
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Loi du marché (La) - 5/10

Messagepar Alegas » Dim 13 Fév 2022, 12:23

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La loi du marché de Stéphane Brizé
(2015)


Pas mal déçu pour le coup, j’attendais pas spécialement un grand film mais vu que j’avais bien aimé le seul autre métrage de Stéphane Brizé que j’avais vu (Mademoiselle Chambon) et vu que La loi du marché avait provoqué son petit buzz à l’époque de sa sortie, j’espérais quelque chose qui se tienne un peu mieux. Sur le sujet, j’ai l’impression qu’il y avait moyen de faire mieux. Le fait de suivre un mec sans emploi, contraint d’accepter un job d’agent de sécurité dans une grande surface pour choper la moindre personne qui fait du vol à l’étalage ou même des caissières qui gardent de côté des coupons de réduction, ça avait un certain potentiel avec notamment tout un questionnement moral, mais malheureusement Brizé fait le choix d’un film écrit de façon assez minimaliste pour s’orienter vers une approche à la Dardenne. Non pas que ce soit forcément un défaut, après tout il y a des bons films faits ainsi, mais ici en l’occurrence ça fait assez artificiel alors que ça se veut authentique, notamment au niveau du montage où le film accumule les ellipses, et on passe souvent d’une scène à l’autre qui n’ont rien à voir ensemble.

On sent que ça veut donner un côté tranche de vie, mais ça donne plus quelque chose qui donne l’impression d’avoir été monté de façon aléatoire, d’autant que ça fait durer parfois des scènes plus que de raison (la scène de danse sur du Goldman, on la vire du film ça revient au même). Surtout qu’à côté de ça le récit met du temps à démarrer, et il faut attendre presque une heure avant que Lindon chope le fameux boulot d’agent de sécurité, pour le coup j’aurais largement préféré un film plus écrit, avec une découverte progressive des méthodes moralement douteuses pour choper la moindre personne qui ne respecterait pas les règles. A côté de ça, le film sombre souvent de le misérabilisme un peu gratuit, le meilleur exemple étant le suicide de la caissière ou le fait que le gamin de Lindon soit handicapé, ça charge la mule de façon un peu grossière et autant c’est quelque chose que je pourrais pardonner dans le contexte d’un récit plus classique, autant dans celui d’un film qui se veut extrêmement réaliste, presque documentaire, ça en fait un peu trop.

Après, je dois avouer avoir trouvé le film toujours intéressant à suivre, et même si je trouve que le film passe à côté d’un sujet intéressant en zappant l’analyse du monde des grandes surfaces, il arrive tout de même à tirer des bons sujets de réflexion, notamment à travers quelques séquences qui, on s’en doute, doivent arriver souvent dans ce genre de milieu (le patron qui enfonce la caissière en lui disant qu’elle vole ses collègues avant de voler l’entreprise, j’imagine que c’est typiquement le genre de discours qui doivent avoir lieu dans ces situations). Quand à Lindon, le mec est bon, aucun souci là-dessus, mais s’il mérite un prix d’interprétation pour ce film, où il est finalement très passif, j’ai envie de dire qu’il le mérite dans un paquet d’autres, là ça fait un peu prix donné par quelqu’un qui ne connaissait pas le travail de Lindon avant de voir ce film. Pas un mauvais film donc, mais pas un bon non plus, la faute à un traitement formel et narratif qui passe à côté de quelque chose qui aurait pu donner un métrage nettement plus intéressant.


5/10
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Film: Loi du marché (La)
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Auteur: Nulladies

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Explorateur en folie (L') - 6/10

Messagepar Alegas » Lun 14 Fév 2022, 19:02

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Animal crackers (L'explorateur en folie) de Victor Heerman
(1930)


Et bien c’était pas mal, et clairement bien meilleur que le précédent film avec les Marx brothers, ici ça ressemble plus à un film de cinéma qu’à une comédie music-hall vaguement filmée :mrgreen: . Alors tout n’est pas complètement rose, et j’ai encore quelques reproches à faire sur le fait qu’on sent quand même encore un peu le côté théâtral (notamment sur le plan formel, très basique), et autant je trouve les chansons bien incorporées au récit (elles ont le mérite de ne pas être envahissantes et d’être drôles, notamment ce passage où Groucho ne peut pas en placer une parce que tout le monde reprend le refrain sans prévenir :eheh: ), autant il y a quelques passages qui font très gratuits, notamment quand Harpo et Chico jouent de leur instrument, ça fait pas avancer le récit et ça donne plus l’impression d’être là pour leur donner du temps à l’écran. Autre point noir : l’histoire qu’on tente de nous raconter en marge des storylines incluant les Marx, c’est pas spécialement mauvais, c’est juste que ça se suit sans réel plaisir, et le film est vraiment meilleur, ou en tout cas plus savoureux, quand l’un des frangins est à l’écran.

Pour le reste, c’est un film qui confirme les qualités que j’avais pu entrevoir dans The Cocoanuts : les frères se complètent bien en termes d’humour (pendant que l’un va plus jouer sur la langue, l’autre va être dans le burlesque de geste total, etc…), l’intrigue autour de quiproquos sur un vol de tableau est assez savoureuse même si parfois inégale, Groucho est juste phénoménal dès qu’il part dans des jeux de mots impossible à traduire en langue française avec le débit qu’on lui connaît (il a des répliques qui ne passeraient tout simplement plus aujourd’hui, genre la scène où il tente de convaincre deux femmes de faire un plan à trois :shock: ), et puis globalement le film est bien plus drôle que son prédécesseur, ce qui est clairement encourageant pour le reste des films du quatuor. Une sympathique comédie, à défaut de prétendre à plus.


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6/10
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Re: [Alegas] Mes Critiques en 2022

Messagepar Mr Jack » Lun 14 Fév 2022, 19:50

Et ça va crescendo. Leur période Paramount, qui termine sur le boulet de canon Duck Soup, se caractérise par une liberté de plus en plus grande d'année en année. Et ça se sent direct sur Monkey Business qui est mon préféré avec A night at the opera. Ils commencent leur entreprise de destruction en ridiculisant le bourgeois et en entrant dans chaque pièce pour tout détruire. Ils n'ont aucun respect pour rien que ce soit dans ou en dehors du cadre. Le réal était souvent un yes man, et c'est pas un hasard si leur contrat se termine sur Duck Soup réalisé par un des plus grands réals de l'époque, spécialiste de la screwball comedy. Duck Soup est leur film le plus abouti visuellement parlant mais ça se passait très mal avec McCarey parce que les frérots ne laissaient la place à rien d'autre qu'à leurs délires. Et c'est le seul, il me semble, sans passage musical de Harpo et Chico (moi j'aime bien les saynètes au piano et à la harpe mais c'est clairement dispensable). Je viens de finir mon coffret BR avec les présentations par Yves Alion de qui je tiens à peu près tout ce que je viens de dire et c'était le pied, comme d'hab.
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Prisonnier d'Alcatraz (Le) - 8,5/10

Messagepar Alegas » Mer 16 Fév 2022, 16:07

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Birdman of Alcatraz (Le prisonnier d'Alcatraz) de John Frankenheimer
(1962)


Sans surprise c’est vachement bien. Déjà mater un film de Frankenheimer de la grande époque est généralement une valeur sûre, mais là c’est en plus un de ses films les plus réputés et on comprend vite pourquoi. Déjà, le matériau de base est solide, puisqu’on va avoir l’histoire d’un prisonnier ayant réellement existé, et qui passera plus de la moitié de sa vie en détention, dont plus de quarante sans isolé dans une cellule avec aucun contact direct avec les autres détenus. Un prisonnier qui va se découvrir une passion pour les oiseaux, au point de devenir une référence en la matière, et qui sert ici de fil rouge pour le récit du film puisqu’à travers toute cette passion est traitée le rapport avec le monde extérieur, avec lequel le personnage ne peut plus interagir. Plus qu’un biopic sur un prisonnier, c’est surtout un film sur un homme droit dans ses bottes, capable d’endurer le pire pour aller jusqu’au bout de ses convictions, et qui va développer un rapport complexe avec le concept de liberté et avec les autres personnages (au début du film, le mec déteste tout le monde, frappe pour un oui ou un non, mais va apprendre peu à peu à mettre de l’eau dans son vin).

C’est vraiment tout l’aspect humain qui rend le film aussi passionnant à mes yeux, le meilleur exemple en termes d’écriture étant toute la relation avec le directeur de prison qui deviendra plus tard le directeur d’Alcatraz, personnage hautement détestable au début mais sur lequel le personnage principal va apprendre à respecter d’une certaine manière, quand bien même ils ne seront jamais d’accord tous les deux). Mais la réussite du métrage tient surtout en deux choses : la première étant la mise en scène de Frankenheimer qui signe là son film le plus soigné que j’ai vu jusqu’ici (ce noir et blanc :love: ), et puis évidemment Burt Lancaster qui trouve probablement l’un de ses plus grands rôles. Le mec porte le métrage sur ses épaules (rares sont les plans où il n’est pas à l’écran), rend son personnage particulièrement complexe (c’est jamais un homme qu’on aime vraiment, sans pour autant le détester non plus) et puis il y a le charisme et la présence habituelle de l’acteur qui finit de rendre la performance définitivement marquante (big up aussi aux maquillages très réussis, on croit au vieillissement de l'acteur). Un très beau film de prison, à ranger parmi les classiques du genre.


8,5/10
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Âge d'or (L') - 5,5/10

Messagepar Alegas » Jeu 17 Fév 2022, 11:03

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L'Âge d'or de Luis Buñuel
(1930)


Un film particulier dans la carrière de Bunuel, et pour cause : L’Âge d’or provoquera tellement de remous en son temps que le réalisateur sera contraint de renoncer à la réalisation de long-métrage, se contentant soit de petits documentaires, soit de co-réalisations, et ce pendant quasiment une vingtaine d’années. Le film a une réputation qui le précède, déjà d’une part parce que c’est, à l’image d’Un chien andalou, un film profondément surréaliste, mais aussi et surtout parce que c’est un film que Buñuel a réalisé dans l’idée de choquer le spectateur bourgeois de l’époque, et cela se ressent particulièrement. Difficile de décrire le métrage tant on est ici devant un film dénué de règles à proprement parler, même du point de vue narratif c’est assez particulier (pas vraiment d’histoire à proprement parler, plutôt une succession de scénettes plus ou moins longues qui vont mettre à mal la morale du du début du 20ème siècle), et c’est un aspect à double tranchant car autant ça fait toute l’originalité du film, autant c’est aussi sa plus grande limite.

Car le problème de L’Âge d’or, c’est qu’il n’existe que pour choquer, et ne cherche pas à faire grand chose d’autre. C’était sans doute quelque chose d’intéressant à voir à l’époque (en plus le film était projeté clandestinement pendant longtemps, ce qui devait fortement renforcer l’expérience) mais à le découvrir aujourd’hui, ça fait un peu exercice de style vain, surtout que c’est assez compliqué de se remettre dans le contexte d’époque (voir Jésus devenir l’un des tortionnaires des 120 journées de Sodome, ou un curé balancé par le fenêtre, ne fait plus spécialement d’effet aujourd’hui tant on est habitué à voir l’Église se faire ridiculiser). Reste du coup quelques images marquantes, comme les mains bouffées entre deux amants :shock: , le gamin tué à coup de fusil ou le début en mode documentaire sur les scorpions, mais si on prend en plus le fait que le film dure une heure là où Un chien andalou en durait deux fois moins pour un résultat plus efficace, ça fait reconsidérer pas mal le visionnage. Que le film soit entré dans l’Histoire, c’est une chose (un film qui provoque autant de réactions extrêmes, c’est rare), mais j’ai quand même du mal à y voir un classique pour le coup.


5,5/10
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Ready Player One - 8/10

Messagepar Alegas » Ven 18 Fév 2022, 19:38

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Ready Player One de Steven Spielberg
(2018)


Déjà la quatrième vision, et ça s’impose clairement parmi les meilleurs blockbusters de ces dernières années, et définitivement un des plus réjouissants. Pourtant, il y avait de quoi avoir des appréhensions : voir Spielberg adapter un bouquin qui est en grande partie un amas de références pop, le tout dans un univers qui ne peut décemment pas être reproduit dans la réalité et donc qui nécessite une énorme quantité d’images de synthèse (chose qui n’était pas spécialement le point fort de Spielberg sur The BFG). Mais d’un projet en apparence assez égocentrique (le livre, et donc le film, est clairement influencé par l’œuvre de Spielberg sans jamais s’en cacher), le réalisateur en tire non seulement un de ses divertissements les plus efficaces depuis longtemps, mais aussi une réflexion dense sur l’héritage de son cinéma, comme une sorte de testament qui permet au bonhomme de constater le chemin parcouru tout en incitant les générations suivantes à aller de l’avant.

Car finalement, le monde dépeint de Ready Player One, bien qu’étant un univers d’anticipation, est finalement très proche du nôtre : un monde où l’on a baissé les bras, où l’on a laissé l’industrialisation régner sur notre monde au point de le transformer en espace morne et surpeuplé, et où quasiment tout le monde préfère s’enfermer dans un monde virtuel en grande partie basé sur la nostalgie des précédentes décennies. Bref, difficile de ne pas y voir un regard sur notre époque, d’autant que Spielberg y ajoute quelques thématiques très contemporaines (notamment le fait de projeter tellement ses propres fantasmes sur son avatar qu’on finit par se détester soi-même pour ne pas être aussi parfait), mais j’ai même presque envie de dire que Ready Player One est au fond un film sur le cinéma d’aujourd’hui, un peu comme l’était aussi Speed Racer la décennie précédente. Ainsi, on peut aisément interpréter le film sous ce prisme : le combat entre un gros studio, obsédé par les chiffres et la rentabilité, où l’amour de l’art est juste une façade pour se mettre le public dans la poche, et des jeunes indépendants qui refusent de sacrifier leurs valeurs et leur attachement sincère envers une pop-culture qui les a fait grandir.

A côté, difficile de ne pas voir en Halliday une certaine projection naïve de Spielberg, veillant sur son héritage en attendant de passer la main à une jeune génération qui aura fait ses preuves, et dont la seule hantise est que l'œuvre de sa vie tombe entre les mains de financiers peu scrupuleux. Autant de points qui renforcent le côté œuvre-somme de Spielberg (au moins pour ses films à tendance blockbuster, ce n’est pas un hasard si Jurassic Park et War of the worlds sont mentionnés), et qui rendent définitivement le plus profond qu’il n’y paraît, loin du bête divertissement qui n’existe que pour ses références que certains spectateurs y ont vu. Surtout qu’au-delà de cette profondeur scénaristique surprenante, le film est quand même un bel exemple de ce que le blockbuster américain peut faire de mieux ces derniers temps, bien loin des copier-coller qu’on se bouffe à la chaîne depuis des années, ici c’est vraiment du spectacle jamais vu auparavant, avec des concepts osés, le tout mêlé à une patte Amblin particulièrement appréciable, rendant définitivement ce film comme une production ayant à la fois un pied dans le passé et dans le présent pour mieux épouser son propos.

Spielberg y prouve en plus une vitalité assez extraordinaire, et signe l’équivalent d’un Mad Max : Fury Road : jamais on a l’impression qu’un réal de 70 piges est derrière la caméra, et ça donne une fessée monumentale à toute une génération de réalisateurs qui aimeraient réaliser un métrage à moitié aussi fou que celui-là d’un point du vue formel. Entre la course où toutes les règles sont permises (c'est le chaos absolu, mais pourtant TOUT est lisible), la scène de night-club, l’acte final qui est juste un enchaînement de climax (Iron Giant et un Gundam VS MechaGodzilla, dans le genre fantasme ultime ça se pose là) ou encore la séquence qui revisite Shining (chose assez émouvante quand on sait que c’est à l’époque du tournage de ce film que Spielberg a rencontré Kubrick), c’est une succession de séquences jaw-dropping où le réalisateur prouve non seulement sa maîtrise totale des outils narratifs par l’image, mais où il se fait aussi clairement plaisir avec l’absence de caméra physique, rendant son film presque expérimental par moment (entre les nombreux plan-séquences qui parsèment le métrage, il y a notamment un plan que je trouve complètement dingue, avec la caméra qui part d’un champ de bataille pour arriver sur le bad-guy, le tout avec un changement complet de focale du plus bel effet, et qui serait impossible à faire avec une véritable caméra).

Si je devais avoir quelques réserves, ce serait du côté du casting où on n’atteint pas forcément le level habituel de chez Spielberg en termes d’interprétations, mais ça reste quand même de bonne qualité, c’est juste qu’on ne retiendra clairement pas le film pour ça, d’autant que les avatars se taillent une part du gâteau non négligeable. Par contre, côté effets visuels, c’est facilement un des films les plus impressionnants sortis récemment, ça arrive à trouver le juste milieu entre une artificialité assumée pour l’OASIS, et un photo-réalisme souvent saisissant, et c’est quelque chose qui va, je pense, permettre au film de bien vieillir dans les années à venir, alors que d’autres films tout-CGI ne misant que sur le réalisme vont prendre cher. Pas de Williams au score, et c’est bien dommage car ça aurait pu être monumental vu le matériau, mais pour le coup Silvestri fait un super job en collant avec quelque chose de très proche du fameux compositeur dans l’esprit. Bref, c’est un film qui venge de la fadeur et de la répétitivité du divertissement américain moyen de ces derniers temps (comme le dit la chanson des Twisted Sister que lance le héros au début du climax final : “We're not gonna take it anymore”), mais c’est aussi un film qui donne l’impression d’être un point final à tout un aspect de la carrière de Spielberg : celle du divertissement dans tout ce qu’il a de plus glorieux et noble.


8/10
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Cérémonie (La) (1995) - 4,5/10

Messagepar Alegas » Sam 19 Fév 2022, 18:27

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La Cérémonie de Claude Chabrol
(1995)


Assez déçu pour le coup, même si je ne me faisais pas trop d’illusions : je me doutais que j’allais pas y voir un grand film, mais vu que c’est l’un des Chabrol les plus réputés je suis quand même tombé de haut. Pourtant, le pitch est pas mal, avec cette jeune femme timide qui va être engagée comme bonne dans une famille bourgeoise de Bretagne, et qui va se lier d’amitié avec la folle du village qui a justement un passif avec cette famille, mais malheureusement au-delà de ce point de départ ça vole pas très haut. Au programme donc : un récit qui ne raconte pas grand chose avant de prendre un virage à 180 degrés sur ses quinze dernières minutes, avec une vague inspiration hitchcockienne, le tout saupoudrée de misérabilisme (la bonne s’avère analphabète, chose qui n’a finalement pas vraiment de finalité si ce n’est expliquer sa timidité apparente) et d’une confrontation des classes sociales pas finaude pour un sou (sérieux la famille bourge c’est quand même bien cliché avec l’écoute de l’opéra le soir en famille, la gamine qui essaye de faire croire qu’elle est plus proche des classes moyennes, etc…).

Bref, c’est pas ce qu’il y a de plus excitant, et si on ajoute à ça le fait que le casting entier donne l’impression de surjouer (avec Isabelle Huppert, on a l’habitude :mrgreen: , mais c’est plus surprenant de la part de Sandrine Bonnaire, Jacqueline Bisset ou Jean-Pierre Cassel), ça donne un film qui n’est clairement pas le cinéma français que j’affectionne (et c’est peu de le dire). En plus, Chabrol filme ça comme un téléfilm, c’est hyper pauvre aussi bien en termes de mise en scène que de photographie, et le problème c’est que ça ne change pas dès que Chabrol donne un changement de direction à son métrage : on a notamment des meurtres au shotgun complètement ridicules (d’une part parce que mal joués, d’autre part parce qu’il n’y a aucun impact, Chabrol n’a sûrement jamais vu de sa vie ce que provoque un tir de chevrotine) et un accident de voiture sûrement filmé avec un budget de quelques euros (et du coup qui le rend plus drôle qu’autre chose, surtout avec le cri d'Huppert à ce moment là :eheh: ). Je met un peu moins de la moyenne parce que, étrangement, je ne me suis pas trop fait chier, et qu’il y a les paysages bretons pour compenser certains défauts, mais c’est clairement pas un film que je reverrais et j’avoue avoir bien du mal à m’expliquer le statut de ce truc cheap et grossièrement écrit.


4,5/10
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Re: [Alegas] Mes Critiques en 2022

Messagepar Mark Chopper » Sam 19 Fév 2022, 18:31

Les réputations de Chabrol et de Huppert restent de grands mystères à mes yeux.
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Re: [Alegas] Mes Critiques en 2022

Messagepar pabelbaba » Sam 19 Fév 2022, 19:00

Le long chemin de croix du défricheur de Chabrol... :mrgreen:
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Sinon, oui, j'aime les nibards. :chut:
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Arme fatale (L') - 8/10

Messagepar Alegas » Dim 20 Fév 2022, 13:43

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Lethal Weapon (L'arme fatale) de Richard Donner
(1987)


Agréable surprise que de constater que ce film fait toujours son petit effet. Je ne l’avais pas revu depuis plus d’une quinzaine d’années, et était donc resté sur mes souvenirs un peu idéalisés d’adolescent, mais le fait est que ça se regarde toujours très bien et ça reste encore possiblement le meilleur buddy movie 80’s qui existe (parce que sinon, je ne vois pas quel autre film pourrait prétendre au titre). Alors tout n’est pas complètement rose, puisque je dois avouer avoir un peu déchanter sur tout ce qui concerne la forme du métrage. J’avais pas spécialement souvenir d’un joyau de mise en scène, mais au moins d’un truc qui se tenait très bien d’un bout à l’autre, et là pour le coup la revision a clairement mis en lumière à mes yeux les limites de mise en scène que peut avoir Richard Donner, le meilleur exemple étant tout le combat final sur la pelouse d’une banlieue résidentielle, où j’avais en mémoire un combat hyper violent et très rough dans sa réalisation, alors qu’au final c’est soit de la caméra trop loin, soit de la caméra trop proche, histoire de cacher la misère et l’absence de chorégraphie digne de ce nom. Si on ajoute à cela un script qui me paraît un peu inégal en termes de rythme et de déroulement de l’enquête (elle patine pendant un moment, puis d’un coup tout s’accélère sans crier gare, le must étant le tentative d’assassinat sur Riggs qui arrive de nulle part et qui, au final, arrange bien les héros qui galéraient à trouver une piste :mrgreen: ), on a fait le tour des défauts du film, qui existent bel et bien mais qui ne viennent pas pour autant gâcher le visionnage.

Car pour le reste, Lethal Weapon est vraiment ce que le divertissement américain de l’époque pouvait produire de mieux : la formule concoctée par Shane Black et Joel Silver marche du feu de dieu (très bon équilibre entre le divertissement léger et le polar vénère avec violence graphique), et le duo Mel Gibson/Danny Golver fonctionne à merveille alors qu’avec des personnages pareils il y avait grave moyen d’avoir quelque chose d’ultra poussif en termes d’évolution de la relation entre les deux. D’ailleurs, je suis vraiment étonné du traitement concernant Martin Riggs, car même si je gardais le souvenir qu’il était effectivement suicidaire et très limite dans sa façon de procéder, je ne me souvenais pas que c’était à ce point, et pour le coup Gibson livre vraiment une super performance (la scène où il incite Glover à lui tirer dessus avec son flingue :shock: ). L’humour du film est toujours efficace aujourd’hui, notamment avec cette vision de la police complètement nawak 80’s style, genre le commissaire à qui on dit qu’il a un suicidaire dans son équipe et qui répond qu’il le croira le jour où il se mettra une balle dans la tête, autant dire que ce genre de choses ne passeraient plus à notre époque. Bref, c’est toujours aussi cool même si c’est pas parfait, et maintenant que j’ai revu ce premier opus je vais enfin pouvoir découvrir les 2 et 3 que je n’ai jamais vu.


8/10
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Re: [Alegas] Mes Critiques en 2022

Messagepar ril » Dim 20 Fév 2022, 14:40

Le 3 est dispensable mais le 2 est largement supérieur au 1er.
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Re: [Alegas] Mes Critiques en 2022

Messagepar Mark Chopper » Dim 20 Fév 2022, 15:03

Largement, je ne sais pas. On commence déjà à perdre le Mel Gibson suicidaire et à s'orienter vers la comédie.
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Re: [Alegas] Mes Critiques en 2022

Messagepar osorojo » Dim 20 Fév 2022, 15:06

Oui mais dans le 2, y a Patsy Kensit :love:

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Re: [Alegas] Mes Critiques en 2022

Messagepar ril » Dim 20 Fév 2022, 15:06

C'est plus orienté comédie, très buddy movie mais j'ai de très bon souvenir au niveau action, surtout dès l'intro du film.
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