Depuis le chef-d’œuvre qu’était
There will be blood, j’avoue avoir été déçu par la direction de la carrière de Paul Thomas Anderson. Si un film comme
The Master trouvait encore grâce à mes yeux, ce n’était clairement pas le cas de
Inherent Vice et
Phantom Thread, deux films où j’avais l’impression que PTA tentait des choses qui ne lui allaient pas du tout, comme s’il souhaitait prouver à la critique qu’il pouvait livrer l’opposé absolu de ses premiers films. Autant dire donc que
Licorice Pizza restaure ma foi en ce cinéaste : avec ce film, j’ai eu enfin l’impression de revoir l’énergie du mec qui m’avait mis sur le cul avec
Magnolia et
Boogie Nights, et c’était vraiment pas gagné car autant le trailer m’avait vendu du rêve, autant je me méfiais d’un film bien lourdingue et longuet façon
Inherent Vice.
Dès le début du film, il y a une énergie communicative que je ne m’explique pas, qui vient probablement à la fois de la mise en scène, de la direction des acteurs, et de l’époque traitée, et cette énergie semblable à celle d’un
American Graffiti va rester pendant quasiment tout le film, au service d’une histoire d’amour dont le mot d’ordre va être de prendre son temps. De cela découle d’ailleurs le seul point que je reproche à ce nouveau PTA : le film dure quasiment 2H15 et j’ai envie de dire que ça se ressent bien sur le dernier quart du métrage. Pourtant, le récit ne tourne pas spécialement en rond, mais il y a un petit côté scénettes qui se fait ressentir au bout d’un moment, avec des storylines lancées sans prévenir (tout le délire du camion avec Bradley Cooper
) alors que tout laisse à penser qu’on approche du final. Rien de bien méchant car le film n’est pas ennuyeux pour autant, mais ça donne tout de même un coup à un rythme qui, jusqu’ici, était impeccable.
Pour le reste, le film ne mérite que mes louanges : PTA retrouve la niaque de ses débuts, en moins tape à l’œil, et on a le droit à des scènes vraiment magnifiques, sublimées par des mouvements de caméra élégants (peu de réals savent aussi bien filmer des héros en pleine course) et une photographie travaillée (contrairement à son précédent, PTA se fait aider sur ce point, et on voit tout de suite la différence). Côté casting, les acteurs les plus connus sont ici pour faire du guest de luxe (on a même John C. Reilly dans un caméo improbable
), et c’est donc clairement les petits nouveaux qui intéressent avec notamment les deux leads dont l’alchimie est juste évidente (les dialogues finement écrits aidant beaucoup). Que ce soit Cooper Hoffman (fils de Philip Seymour Hoffman, autant dire que c’est symboliquement fort vu la relation qu’avait PTA avec cet acteur) ou Alana Haim, les deux sont des révélations totales, faisant toujours preuve d’une justesse incroyable, ils portent clairement le film sur leurs épaules.
Pour le reste de la distribution, le générique final permet de voir un paquet de noms étonnants au casting : on a le père de DiCaprio
, le fils de Giacchino, la fille de Spielberg, j’ignore si ça vient d’une volonté de PTA mais c’est assez marrant à remarquer
. La BO est très sympa, j’ai pas trouvé le score de Jonny Greenwood particulièrement marquant mais la soundtrack est terrible (peut-il en être autrement à partir du moment où il y a le Life on Mars de Bowie ?
). C’est à la fois une belle histoire d’amour, un récit profondément nostalgique d’une époque révolue et une comédie efficace (c’est facilement le film le plus drôle de PTA avec
Punch-Drunk Love), et ça fait plaisir de voir Anderson revenir avec un film loin, très loin, de la froideur de ses derniers opus.