Laissez-passer de Bertrand Tavernier
(2002)
(2002)
Un Tavernier assez méconnu j’ai l’impression, c’est très loin d’être un des plus cités alors que ça s’avère vraiment bien. Sur un sujet absolument passionnant (le fonctionnement du cinéma français pendant l’Occupation), Tavernier livre un récit dans la lignée du reste de son cinéma : ici, il est question de traiter les mémoires d’hommes ayant réellement vécu les évènements, avec un vrai côté tranches de vie qui va prendre le dessus sur l’intrigue finalement assez secondaire. Du Tavernier comme je l’aime donc, et si en plus on rajoute le fait que ça parle de cinéma ça fait combo gagnant, car déjà qu’entendre Tavernier discuter de cinéma c’est passionnant, autant dire que voir un de ses films aborder frontalement le sujet fait son petit effet. Et puis ça permet de mettre en valeur une histoire finalement assez méconnue du grand public : le fait que, pendant l’Occupation, le cinéma français était chapeauté par une organisation allemande, la Continental, dans laquelle travaillait beaucoup de monde (Clouzot, Tourneur, Simon, Fresnay, etc…) et qui produira un paquet de films (Le Corbeau étant le plus emblématique) pendant que d’autres essayaient de se débrouiller pour continuer à travailler sans jamais signer le moindre contrat avec les allemands.
Si Tavernier évoque les deux côtés, c’est clairement le fonctionnement de la Continental qui va l’intéresser, à travers plusieurs points de vues, notamment ceux d’un assistant-réalisateur et d’un scénariste. Le film est assez étrange d’ailleurs sur ce point : ça commence comme un film choral avec un montage qui alterne surtout entre les personnages de Gamblin et Podalydès, mais peu à peu c’est le point de vue de Gamblin qui va prendre le dessus pour devenir le figure centrale du récit, du coup on se demande un peu à quoi sert Podalydès si ce n’est montrer d’autres aspects de la situation du cinéma français de l’époque. Si le film n’a pas une grosse intrigue à proprement parler, c’est davantage l’évolution des relations entre les artistes et la Continental qui va rendre le métrage passionnant : on y voit des tournages qui se passent bien (mais avec des anecdotes fascinantes comme le coup du manque de pellicule sur La Main du Diable qui oblige à penser le montage en amont et à chronométrer le temps des répliques en répétition), d’autres avec des acteurs refusant de jouer devant le moindre allemand (Michel Simon sur le plateau d’Au bonheur des dames), mais aussi des collaborations qui vont s’avérer houleuses, que ce soit celle d’un Jean-Paul Le Chanois qui doit cacher le fait qu’il soit juif et communiste, ou encore celle d’un Charles Spaak qu’on oblige à écrire pour avoir de la meilleure bouffe en prison .
Bref, si on est un tant soit peu intéressé par le sujet, c’est vraiment fascinant à regarder, et ça compense quelques défauts comme des arcs qui prennent étrangement beaucoup de temps (le passage en Angleterre, c’est marrant, mais je suis pas certain de comprendre ce que ça apporte réellement). La fin est très jolie, j’aime bien que ça se termine à partir du moment où Gamblin décide d’arrêter pour la Continental, ça marche très bien au niveau du propos et la voix de Tavernier qui explique que sont devenus les mecs ensuite c’est un bonus très appréciable. Niveau mise en scène c’est du Tavernier donc rien de tape-à-l’œil mais c’est solide. La reconstitution fait un peu peur au début avec la scène des bombardements mais c’est bien mieux ensuite. Gamblin est excellent dans son rôle, c’est un acteur dont j’ai vu finalement peu de choses mais à chaque fois il est bon. Le reste du casting n’est pas en reste, même si on retient surtout ceux qui ont des personnages très intéressants à défendre, je pense notamment à ceux qui jouent Spaak et Le Chanois. Un film que je range facilement dans mon Top 5 Tavernier so far, et qui mériterait d’être plus connu. Pour ceux intéressés par la période, je conseille vivement.
Si Tavernier évoque les deux côtés, c’est clairement le fonctionnement de la Continental qui va l’intéresser, à travers plusieurs points de vues, notamment ceux d’un assistant-réalisateur et d’un scénariste. Le film est assez étrange d’ailleurs sur ce point : ça commence comme un film choral avec un montage qui alterne surtout entre les personnages de Gamblin et Podalydès, mais peu à peu c’est le point de vue de Gamblin qui va prendre le dessus pour devenir le figure centrale du récit, du coup on se demande un peu à quoi sert Podalydès si ce n’est montrer d’autres aspects de la situation du cinéma français de l’époque. Si le film n’a pas une grosse intrigue à proprement parler, c’est davantage l’évolution des relations entre les artistes et la Continental qui va rendre le métrage passionnant : on y voit des tournages qui se passent bien (mais avec des anecdotes fascinantes comme le coup du manque de pellicule sur La Main du Diable qui oblige à penser le montage en amont et à chronométrer le temps des répliques en répétition), d’autres avec des acteurs refusant de jouer devant le moindre allemand (Michel Simon sur le plateau d’Au bonheur des dames), mais aussi des collaborations qui vont s’avérer houleuses, que ce soit celle d’un Jean-Paul Le Chanois qui doit cacher le fait qu’il soit juif et communiste, ou encore celle d’un Charles Spaak qu’on oblige à écrire pour avoir de la meilleure bouffe en prison .
Bref, si on est un tant soit peu intéressé par le sujet, c’est vraiment fascinant à regarder, et ça compense quelques défauts comme des arcs qui prennent étrangement beaucoup de temps (le passage en Angleterre, c’est marrant, mais je suis pas certain de comprendre ce que ça apporte réellement). La fin est très jolie, j’aime bien que ça se termine à partir du moment où Gamblin décide d’arrêter pour la Continental, ça marche très bien au niveau du propos et la voix de Tavernier qui explique que sont devenus les mecs ensuite c’est un bonus très appréciable. Niveau mise en scène c’est du Tavernier donc rien de tape-à-l’œil mais c’est solide. La reconstitution fait un peu peur au début avec la scène des bombardements mais c’est bien mieux ensuite. Gamblin est excellent dans son rôle, c’est un acteur dont j’ai vu finalement peu de choses mais à chaque fois il est bon. Le reste du casting n’est pas en reste, même si on retient surtout ceux qui ont des personnages très intéressants à défendre, je pense notamment à ceux qui jouent Spaak et Le Chanois. Un film que je range facilement dans mon Top 5 Tavernier so far, et qui mériterait d’être plus connu. Pour ceux intéressés par la période, je conseille vivement.
7,5/10