Cheun Gwong Tsa Sit (Happy together) de Wong Kar-wai
(1997)
Très sympa ce Wong Kar-wai, dans le genre j’ai trouvé ça nettement plus réussi que Les anges déchus, mais aussi moins convaincant que son Chungking Express (qui reste toujours mon préféré du bonhomme dans sa carrière pré-2000). Alors clairement, si on connaît les autres films du réalisateur, on navigue en terrain connu, puisqu’on va avoir ici une histoire d’amour où les ellipses et expérimentations visuelles vont venir accompagner un récit fragmenté et qui va jouer à fond sur le spleen urbain. Bref, on est en plein dans du WKW pur jus, et finalement le côté original va venir de deux choses : d’une part le fait que la romance soit gay (mais au final, ça pourrait être un homme et une femme que ce serait la même chose, la sexualité n’était pas vraiment mise en avant dans le récit) mais aussi et surtout le fait que WKW déplace ses caméras en Argentine.
On pourrait penser que ce choix géographique pourrait renouveler le cinéma du bonhomme, mais finalement pas tant que ça, et comme il le fera plus tard dans une autre mesure avec My blueberry nights il y a vraiment l’impression de voir WKW imposer son style à un autre pays, avec succès. Formellement, pour peu qu’on adhère à ce style particulier, où les effets de caméra et les choix photographiques peuvent sembler gratuits (et le sont probablement, si ce n’est le fait qu’ils sont là pour sublimer ce qu’on nous raconte), il y a vraiment de quoi être conquis. Par contre, je suis un peu moins convaincu sur l’histoire à proprement parler où, comme souvent chez WKW, on sent que c’est réécrit en plein tournage, improvisé par moment, et donc il n’y a jamais l’impression d’avoir une histoire qui se tient d’un bout à l’autre et qui a été pensée comme telle de base.
Alors clairement, la narration a son charme, et certaines scènes sont vraiment belles (la danse dans la cuisine, Hong Kong vu à l'envers, le final) mais de mon côté ça se fait au détriment d’une certaine implication, et aussi au détriment d’une cohésion rythmique (il y a plusieurs moments où on a l'impression de revoir la même chose). Du coup, c’est vraiment un film à prendre comme un film d’ambiance à mon sens, plus qu’une love-story classique, et en ce sens c’est vraiment la même came que les autres films 90’s du réalisateur, il n’y a pas encore l’équilibre qui sera trouvé avec In the mood for love. Sinon, le casting est bon, avec, sans surprise, Tony Leung qui porte en grande partie le métrage sur ses épaules (quel dommage qu’aujourd’hui il finisse par tourner chez Marvel…). Un joli film, pas exceptionnel, mais qui plaira clairement aux amateurs du style de Wong Kar-wai.
6,5/10