Peur sur la ville de Henri Verneuil
(1975)
Je suis bien embêté avec ce Verneuil que je voulais voir depuis longtemps : j’ai vraiment eu l’impression de voir deux films en un, et manque de bol l’un me plaisait beaucoup moins que l’autre. C’est simple : pendant la première moitié du film, Verneuil signe un sacré polar, avec énormément de scènes qui sont parmi les meilleures de sa carrière. L’introduction fait penser à du giallo, avec cette sonnerie de téléphone qui joue sur les nerfs, et ce générique sur un Paris nocturne sublimé par Morricone, ça enchaîne ensuite sur des scènes où le montage est inventif dans sa façon se servir la narration (le flashback sur la fuite du casse, qui arrive sans prévenir), et le film atteint des sommets dans sa scène d’action qui fera sa renommée : une vingtaine de minutes non-stop où Belmondo poursuit un serial-killer sur les toits parisiens, puis en voiture dans les rues bondées, pour aboutir sur la traque d’un truand sur le métro parisien, le tout avec Belmondo qui assure la majorité des cascades.
Si le film avait su tenir ce niveau, ça aurait pu clairement se ranger dans les plus grandes réussites de son réalisateur, malheureusement une fois le climax de milieu de film passé, le film paraît tellement essoufflé qu’il n’arrive jamais à retrouver le niveau précédemment atteint. A partir de là, j’ai eu l’impression de voir un polar Bebel tout ce qu’il y a de plus classique, où l’écriture fait le minimum syndical (on ne cherche même plus à justifier les cascades de Belmondo), où l’acteur devient de plus en plus en roue libre, où les erreurs de tournage se multiplient (on te sort un gros plan du bad-guy où on voit bien derrière ses lunettes de soleil qu’il a deux yeux normaux, alors que tout le reste du film il a un maquillage sur un œil,
c’est tellement obvious que je me suis demandé du coup si c’était pas un jumeau caché), où le personnage principal devient carrément antipathique quand il refuse de traquer le tueur en série parce que ce n’est pas de son niveau intellectuel, et où même l’action semble filmée de façon paresseuse (le final est d’une mollesse…). Bref, autant la première partie du film me donnait envie de poser un 8, voire plus, autant la seconde faisait tellement polar de bas étage que j’ai vite déchanté. Un Verneuil juste sympa donc, mais qui possède tout de même une poignée de séquences d’un niveau qu’on aimerait bien revoir dans le polar français d’aujourd’hui.
7/10