Je dois avouer que je m’attendais à bien pire : après tout, la carrière américaine de John Woo est ce qu’il y a de plus inégal, et je ne parle même du fait que, contrairement à d’autres, le fait d’avoir JCVD en tête d’affiche est loin de me rassurer sur la qualité du film. Néanmoins, je suis surpris à la vision de cette première tentative américaine du réalisateur, et même si le côté JCVD-movie prend un peu trop le dessus la majorité du temps, avec des aspects complètements nanar (le look de l’acteur
, le surjeu de quasiment tout le casting
, le coup de pied répété une vingtaine de fois au bas mot
), je dois admettre que la mise en scène de Woo m’a sauvé la vision, en tout cas assez pour que je passe un moment un minimum agréable.
Alors clairement, il y avait moyen à mon sens d’avoir un meilleur film vu le matériau de base. L’idée de départ en mode
Chasses du comte Zaroff mis au goût du jour est vraiment cool, et donne lieu à certaines des meilleures séquences du métrage (l’intro, la traque du black dans le cimetière, le final dans le hangar), mais c’est cruellement sous-exploité, et on en vient rapidement à damner cette foutue enquête, traitée par dessus la jambe, et qui prend pourtant une trop grande part du récit. Dès que le film se prend trop au sérieux du côté de l'investigation, il se foire dans les grandes largeurs, et ça donne lieu non seulement à des scènes insipides avec la nana (pire acting du film, et de loin) mais aussi à des trucs hyper mal écrits, genre JCVD qui peut aller sur les scènes de crime pour toucher des indices, juste avec l’aval d’une flic qui suit le dossier de la disparition du père
. C’est vraiment quand les bad-guys rentrent en jeu que le film décolle, et même si ça débouche sur le concours de qui surjouera le plus (Henriksen et Vosloo sont on fire
), ça permet surtout au film d’arrêter de faire semblant d’être ce qu’il n’est pas, et d’assumer son action brainless.
Et pour le coup, c’est vraiment l’action, enfin surtout la façon dont John Woo la filme, qui sauve le métrage : le réalisateur a beau avoir une marge de manoeuvre sans doute bien plus limité qu’à Hong Kong et être privé de ses monteurs habituels, son style est bien présent à chaque plan et chaque cut. Pour le coup, des films américains de Woo, c’est celui dont l’action ressemble le plus aux films qu’il a pu faire chez lui, et même si ça a parfois un côté cheap à cause du format et de la photo qui se limite souvent au minimum, c’est toujours lisible dans ce que ça montre (le gunfight dans la rue avec la flic qui crève est exemplaire sur ce point), spectaculaire avec pas grand chose, et ça déborde d’idées de situations et de montage. Le final dans le hangar notamment est d’une générosité rare : c’est violent à souhait, les cadavres pleuvent, les inserts cools aussi, les gimmicks de Woo sont bien présents (même si les colombes sont remplacées par des pigeons
), bref ça rappelle que Woo n’a pas son pareil pour livrer ce genre de scènes, même sans sa liberté d’antan. Dommage donc que le film se plante autant avec toute la première heure en mode trop sérieux, car tout l’aspect actionner m’a rappelé tout le plaisir que pouvait me procurer les bonnes scènes d’action signée John Woo.