Mon dieu que c’était nul. Je suis clairement pas fan de Branagh en général, c’est quand même un mec dont la filmo de réalisateur parle pour lui, mais là je suis assez fasciné qu’un tel film, qui flirte autant avec le nanar, n’ait pas condamné direct sa carrière. Sérieux, il y a des réals qui ont eu leur carrière stoppée net pour moins que ça. Le projet est pourtant carrément intéressant : après le succès de son
Dracula, Coppola décide de produire un autre classique du fantastique, à savoir Frankenstein, sur un script de Darabont. Le scénario se veut le plus fidèle possible à l’ouvrage de Mary Shelley, et c’est clairement ce qui sauve le résultat final de la nullité absolue : qu’importe ce qu’a fait Branagh derrière, le script reste un beau morceau d’adaptation, avec des supers thèmes bien traités, et des figures tragiques mises en avant.
Le problème, vous l’aurez compris, c’est l’enrobage de ce script, et là attention car comme dit plus haut, il y a un paquet de scènes dignes d’un nanar, mais les défauts sont tellement agaçants que la gêne prend le pas sur le comique involontaire. Déjà, il faut oublier la moindre filiation avec le Dracula de Coppola : il y a bien quelques élans baroques/gores qui rappellent le film de 1992 (le cœur arraché, le longue robe rouge dans les escaliers
, la pendaison de la sœur), mais pour le reste c’est mis en scène n’importe comment. J’ai beau chercher de la cohérence dans la réalisation de Branagh, mais impossible d’en trouver : le bonhomme semble croire que le mouvement de sa caméra va forcément améliorer ses scènes, et du coup il l’a fait bouger dès que c’est possible. Ça ne se repose jamais, dès que les acteurs évoluent dans un décor la caméra va tournoyer sans fin autour d’eux, et c’est pas aidé par un montage fait n’importe comment, où on a des déchaînements de plans de deux secondes pour créer du rythme ou cacher la misère (dès le naufrage du bateau au début, ça pose le niveau). Si on ajoute en plus la musique de Patrick Doyle qui en fait des tonnes, ça donne un résultat visuel et sonore assez insupportable.
Et à la limite, si le problème de Branagh ne venait que de sa mise en scène, pourquoi pas, mais il se révèle en plus un très mauvais directeur d’acteurs. C’est bien simple : quasiment tout le monde dans le film cabotine, à commencer par Branagh lui-même. C’est amplifié par le fait que l’acteur-réalisateur semble être pas mal imbu de lui-même, du coup il se met en valeur dès que possible, le must étant atteint lors de la création du monstre où Branagh laisse tomber la chemise pour dévoiler son corps d’athlète (on décrit le mec comme quelqu'un qui passe sa vie dans ses bouquins, mais il a quand même le physique d'un top-model
), ou lors d’une scène érotique (enfin faut le dire vite, on là aussi très loin du Coppola) où la caméra s'attarde plus sur le corps de l’acteur que sur celui de l’actrice
. Mais revenons au cabotinage : ça crie dès que c’est possible (à chaque fois qu’un perso meurt, ça gueule les mains vers le ciel, le pire c’est la mort du professeur avec Branagh qui frappe le corps en hurlant, fou rire garanti
), ça surjoue les sentiments, bref ça fait pitié à voir.
Et quand ça ne surjoue pas, ça ne joue tout simplement pas, le meilleur exemple étant Tom Hulce qui est d’une transparence affolante (sérieux, qui croit sérieusement à son amitié avec Branagh ?). De Niro, de son côté, je ne sais pas si c’est la couche de maquillage sur la tronche qui est à mettre en cause, mais il y a clairement un souci, et ça fait aisément partie des prestations les plus mineures de sa carrière (c’est con car encore une fois l’écriture était là, genre la scène de fin il y avait vraiment moyen d’avoir quelque chose de déchirant). Les maquillages d’ailleurs sont l’un des rares bons points du métrage : on les accepte complètement, et leur réalisme est assez troublant par moment (celui de Helena Bonham Carter notamment, très réussi). Globalement, j’ai l’impression que Branagh a voulu faire une adaptation over the top sur quasiment tous les points, sans se rendre compte que chez Coppola ça pouvait être accepté sans problème parce qu’il y avait une direction artistique forte, des choix formels à l’opposé de la recherche de réalisme, et une sensualité particulièrement mise en avant. Un bon gros ratage donc, à l’image de la majorité de la filmo de son réal.