Sound of Metal |
De Darius Marder |
6.75/10 |
Synopsis
Ruben et Lou, ensemble à la ville comme à la scène, sillonnent les Etats-Unis entre deux concerts. Un soir, Ruben est gêné par des acouphènes, et un médecin lui annonce qu'il sera bientôt sourd. Désemparé, et face à ses vieux démons, Ruben va devoir prendre une décision qui changera sa vie à jamais.
Darius MARDER (scénariste sur « The Place Beyond the Pine ») propose ici son premier film avec une collaboration avec Nicolas Becker au niveau du mixage sonore. Becker aime l’alternance entre les sons perçus par le héros qui contrastent avec le brouhaha de l’environnement.
Un film immersif et intelligent qui traite du handicap de façon singulière. Sans avoir le coté moralisateur ou trop bienveillant d'un "Hors normes", on suit la descente aux enfers d'un batteur punk marginal, ex-héroïnomane qui perd l'audition de façon brutale. Ça commence à par un acouphène persistant suivi par un bruit sourd puis un profond silence. Son monde, sa vie s'effondre. Tout d'un coup coupé du monde, de sa copine, de son travail, de ses ambitions.
Il ne faut pas trop se fier au titre qui peut faire penser que les performances musicales seront très présentes, c'est plutôt le parcours du musicien pour se reconnecter aux sons que l'on suit de très près.
Ruben doit rapidement faire face à des options "thérapeutiques" pour soigner son mal et stopper cette descente aux enfers. Soit il débourse une somme importante et opte pour les implants cochléaires, soit il intègre un centre spécialisé de réadaptation.
Etant un artiste indépendant vivant au jour le jour, c'est la seconde option qu'il envisage un peu par défaut et obligation, à reculons.
Le centre spécialisé a plusieurs points en communs avec les centres de désintox. Nécessitant une coupure totale avec le milieu extérieur au niveau relationnel, communications pour se concentrer sur son apprentissage de la surdité.
Une vie communautaire qui oblige ses membres à évoluer entre sourds, sans auto-lamentation mais avec une volonté de s'en sortir. La surdité n'est jamais considérée comme un handicap mais une simple différence.
Notre héros est rapidement intégré et apprécié du groupe, puis commence à appréhender la langue des signes, de s’adapter aux us et coutumes des non-entendants en vivant avec des adultes mais aussi des enfants. Ruben apporte aussi sa pierre à l’édifice en donnant quelques cours d’initiation à la batterie. Joe (Paul Raci) est à la tete de l’institut, à la fois pédagogue mais ferme dans ses principes. Une mise en lumière des sourds et malentendants qui demeurent isolés socialement.
Une problématique se pose lorsqu’une personne sourde se limite à apprendre la langue des signes, c’est que la communication se limite à un interlocuteur qui la connait.
C’est pourquoi Ruben va décider d’opter pour une voie afin de se reconnecter à son ancienne vie et sa compagne (Olivia Cooke).
« Sound of metal » repose sur son expérience sensorielle exemplaire. Elle permet au spectateur de percevoir les sons tels qu’ils sont entendus ou non par Ruben, entre acouphènes, silence absolu, déformations sonores etc…qui provoquent forcément des sentiments de gène, de peur, d’oppression, d’étouffement ou de douleur. On ne peut ressentir que de l’empathie pour Ruben qui subit ces désagréments en permanence. Pourtant quand Ruben a l’opportunité d’entendre, la distorsion des sons peut s’avérer si désagréable que parfois on préfère largement le silence.
Riz AHMED est totalement crédible à la fois en batteur et en non-entendant grâce à sa phase de coaching intense qui lui ont permis d’évoluer de façon spontanée à l’écran.
Darius MARDER n’a pas souhaité développer de façon approfondie le passé de Ruben, il choisit de nous faire vitre l’instant et de suivre ses progrès au jour le jour. Sound of metal reste assez solide psychologiquement, même si le coté romance est un peu boiteux.
Sound of Metal mélange un coté documentaire, un peu répétitif lors du séjour du héros dans l’institut mais c’est grâce à l’osmose entre le public et Ruben que MARDER rend le projet unique sans jamais prendre un ton moralisateur. (ni prendre le parti de la langue des signes ou des implants).