Tout d’abord, big up à Dunandan qui m’a offert le dvd, et qui m’a donc permis de découvrir un film que j’avais envie de voir depuis plus de dix ans, depuis qu’un prof au lycée m’avait montré un extrait pour analyser un des fights. Tout d’abord, ça ne fait pas mentir sa réputation : c’est effectivement un des meilleurs films de kung-fu que j’ai pu voir, mais autant je savais que j’allais être convaincu par les combats, autant je ne m’attendais pas à être aussi séduit par le travail côté script. Exit les déclarations de certains sur ce forum il y a quelques années, comme quoi il ne faut pas être exigeant sur le scénario dans ce genre de films,
Fist of Legend prouve qu’on peut concilier action généreuse et stylée avec une histoire travaillée et des personnages qui sont autre chose que des archétypes (coucou
Ip Man ). Dès le début du film, ça pose le niveau sur la note d’intention du métrage : ça part d’un truc tout bête (un chinois apprend que son maître a été tué par un japonais, et va le venger) mais on hésite pas à tisser quelque chose d’assez inhabituel du côté de la relation chinois/japonais. Héros qui fait ses études au Japon, qui a une petite amie japonaise, des japonais qui n’acceptent pas les décisions de leurs compatriotes, on est clairement pas face à un truc manichéen (même si certains personnages le sont), et c’est d’autant plus surprenant que d’habitude on hésite pas à traiter les japonais comme des raclures absolues (et je suppose que le film avec Bruce Lee, dont
Fist of Legend est un remake, ne faisait pas exception).
Bref, ça donne un côté très rafraîchissant, surtout pour les personnages où l’empathie fonctionne bien plus, surtout qu’à côté de ça on a un côté enquête qui est bien sympa (quand Jet Li va combattre le tueur de son maître pour vérifier, via les capacités kung-fu, si ce dernier a bien pu le tuer seul), et le fait qu’on brouille les relations entres les personnages d’un même camp apporte encore plus d’intérêt à l’histoire (la jalousie de l’autre disciple quand Jet Li reprend inconsciemment les rênes de l’école, la love-story qui finit trois points de suspension, ou encore la scène où le meurtrier critique l’officier japonais sur l’utilisation du poison, typiquement le genre d’ajouts hyper appréciable dans un récit pareil). Cerise sur le gâteau, c’est du premier degré assumé de bout en bout, et ça fonctionne très bien. Du coup,
Fist of Legend évite le piège qu’on retrouve souvent dans le genre, où les fights sont plus intéressants à suivre que le reste, et là les deux arrivent à un pied d’égalité qui rend l’ensemble très agréable à regarder.
Parce que oui, côté fights c’est aussi du beau niveau, et rapidement on comprend vite pourquoi
Fist of Legend est une référence. Cadrages, montage, chorégraphie : le travail supervisé par Yuen Woo-ping est complètement dingue par moment, ultra fluide, réfléchi et diversifié. J’étais même surpris, à certains moments, de retrouver des idées de cadre et d’enchaînements qui sont repris telles quelles dans la trilogie Matrix, preuve que le film doit sûrement être l’une des nombreuses raisons pour lesquelles le chorégraphe a été engagé par les Wachowski quelques années plus tard (et je parle même pas du fait que Jet Li était voulu à la base pour le personnage de Seraph, et qu’il porte une tenue qui ne dénoterait pas dans
Matrix). Le premier fight contre l’école japonaise pose direct le niveau
, et le film se termine sur deux combats assez dingues en terme d’efficacité et d’idée (celle du combat à l’aveugle où les personnages se guident avec le son et le toucher
, et le fait d’avoir le bad-guy traité comme un Terminator avec son finish ultime
). Bref, ce film, c’est la preuve qu’on peut faire un KFP avec une histoire intéressante et un traitement pertinent.