[Dun] Mes critiques en 2020

[Dunandan]

First Mission, Sammo Hung (1985)

Voilà un Sammo Hung très différent de ce à quoi il nous a habitué, et franchement très réussi alors que le sujet est casse-gueule à la base. D'un côté on suit Jackie Chan dans un rôle très standard, à savoir un flic très fort en bagarre, mais là où ça devient plus spécial, c'est que son frère est un retardé mental, et franchement ça fonctionne très bien, grâce une interprétation de Sammo Hung pas si éloignée de ses rôles de mongolito, sauf qu'il assume complètement cet aspect sans jamais utiliser ses talents martiaux. Ainsi, il dévoile une partition dramatique convaincante et touchante, mais sans jamais sombrer dans le pathos, et pourtant il y avait de quoi. Faut dire que Sammo parvient à alterner de manière plutôt équilibrée drame et comédie. J'ai rigolé comme un goret quand il se fait rouler par les gamins, particulièrement lorsque l'un d'entre-eux lui demande de jouer son papa, mais c'est aussi une séquence dérangeante, on ne sait vraiment pas les limites à sa connerie... Bref, Sammo est vraiment bon et crédible dedans.

Du coup, quand je regarde en arrière tous les films de Sammo, celui-ci se retrouve contre toute attente en tête de liste alors que ce n'était pas gagné. C'est vraiment au fond une histoire très belle, et ce qui est fort, c'est que Sammo arrive à rendre Jackie assez antipathique pour mieux ensuite nous le rendre sympathique à l'égard de sa situation et de ses désirs (la séquence lorsqu'il fait sa demande en mariage (très jolie choupinette au passage) est du coup vraiment étrange, sensible de prime abord malgré ou grâce à son aspect cheap, mais aussi terriblement égoïste lorsqu'on comprend mieux via son ami flic ses véritables intentions. En outre, sinon ce ne serait pas un vrai Sammo, les séquences de baston sont toujours très réussies et particulièrement violentes, les policiers n'hésitent pas à tirer dans le dos ou contre des adversaires désarmés. Cela crée un contraste intéressant avec ces séquences plus intimistes. Bref, un beau film, et par delà son sujet, un beau film sur l'esprit fraternel. À voir absolument rien que pour voir la palette variée du bonhomme qui semble à l'aise dans tous les registres.

Note : 7.5/10

[Dunandan]

Song of the exile, Anne Hui (1990)

J'avais d'abord quelques réticences sur ce film, car bon avec Anne Hui derrière la caméra, en porte-étendard du cinéma féministe de Hong-Kong, ça ne vend pas forcément du rêve, mais mon amour pour Maggie Cheung a été le plus fort, et heureusement que j'en ai saisi l'occasion vu sa relative rareté aujourd'hui (en 16mm siouplaît, même si la copie n'était pas fameuse). Alors tout d'abord, cette dernière a rarement paru aussi magnifique, ce qui est une gageure quand on connaît sa filmo, et au final il s'agit aussi d'un joli film. J'avoue que je n'ai pas embarqué tout de suite, la partie à Hong Kong est un poil poussive dans le drama, mais dès qu'on arrive au Japon, quelle bouffée d'air. Et je dirais que c'est raccord avec le script, puisqu'on y suit en fait une fille et sa mère en plein conflit. On penserait qu'il s'agit d'un banal conflit intergénérationnel, mais le portrait de cette relation gagne progressivement en profondeur, via les flashbacks disséminés et les dialogues, et surtout lorsqu'on apporte des raisons à la mère, alors que c'était plutôt la fille qui était mise en avant, et forcément tout s'éclaire.

Il ne s'agit pas d'un film sans défauts, on lutte même, encore une fois, contre une partie du film, on se croirait dans un Bergman sur les relations humaines, mais bon sang, réussir aussi vite à nous laisser happer par le voyage au Japon, et surtout par la compréhension mutuelle qui s'opère entre les deux femmes, qui ont finalement chacune leurs raisons de partir de Chine et d'y retourner ensuite, c'est tout simplement beau. Et cela on le doit aussi aux interprètes, notamment les deux actrices principales. Maggie Cheung y trouve l'un de ses rôles les plus touchants, et surtout Lu Hsiao-fen est parfaitement convaincante en japonaise expatriée en Chine. J'ai quelques réticences contre l'imbrication des retours vers le passé qui n'est pas toujours fait de manière évidente, et encore une fois le début est éprouvant tant la mère semble porter le mauvais rôle, mais les traits s'adoucissent dans la seconde partie, portée par un humour doux-amer qui fonctionne bien (la scène du "vol" de la pomme - qui offre un typique exemple du problème de compréhension linguistique - est géniale). Une belle surprise, donc sur la famille, les racines, et la loyauté (un aspect qui prend tout son sens via le jeune frère de la mère).

Note : 7/10

[pabelbaba]

Ca remonte maintenant, mais je trouve que Maggie est complètement éclipsée par sa mère. Sinon à peu près pareil.

[Dunandan]

Ouais je ne la connaissais pas du tout l'actrice qui joue sa mère, et en effet je l'ai aussi trouvée au-dessus, même si je ne l'ai pas souligné tant que ça ("surtout" ).

[Dunandan]

Prodigal Son, Sammo Hung (1981)

Celui-ci s'inscrit dans la droite lignée de Warriors Two (la structure sous forme de vengeance est la même, et surtout on retrouve le même art martial, le Wing Chun), mais parvient à mettre la barre un peu plus haute. Déjà, l'humour passe mieux (le sidekick comique de service, l'acolyte de Biao qui se fait taper dessus pour son "bien", est autrement plus drôle), mais surtout on a droit à deux maîtres en arts-martiaux pour conduire l'entraînement de feu de Yuen Biao. D'ailleurs, le point de départ n'est pas non plus très courant (une supercherie visant à protéger le fils d'une famille privilégiée). Et pour couronner le tout, les situations et cadres rencontrés sont très diversifiés, avec notamment l'opéra de Pékin, des ninjas, et l'atelier de calligraphie de Sammo.

L'attraction principale du film, cest Yuen Biao (d'habitude éternel second rôle des films de Sammo), mieux mis en valeur que jamais, avec une montée de puissance bien sympathique grâce à l'entraînement conjoint de deux maîtres (suite à une fabuleuse déroute via un autre maître). Cependant, ma partie préférée n'en est pas moins le passage avec Sammo Hung, justement l'un des deux maîtres de Yuen qui s'improvise spécialiste de la calligraphie en utilisant des positions saugrenues de kung fu sous l'oeil blasé de sa fille. Un point de détail que j'ai trouvé sympa, c'est le fait que celle qui joue cette dernière ne soit pas pour une fois une beauté, mais lui ressemble vraiment, et elle se retrouve d'ailleurs dans des situations particulièrement drôles (la scène de "drague" avec Yuen Biao).

Enfin, on y retrouve le mélange des genres cher au gros Sammo, ce qui crée des séquences à l'impact bien violent et parfois inattendu, à l'instar de la scène d'élimination nocturne de la petite troupe de théâtre qui n'épargne personne. Cerise sur le gâteau, le climax envoie du pâté, mais ça on a l'habitude avec le gros Sammo. Par delà des qualités que l'on attend habituellement d'un bon film martial avec des chorégraphies péchues et millimétrées (le casting aide forcément), et encore une fois une montée en puissance constante, j'ai trouvé que les personnages étaient aussi particulièrement travaillés. C'est bien simple, aucun n'est lisse (même l'antagoniste ne cherche qu'à se mesurer à plus fort, sans intention fallacieuse). Bref, toutes les qualités d'un Kung Fu comedy de première qualité.

Note : 8/10

[Dunandan]

Me reste plus qu'à mettre la main sur Le maître intrépide pour clore honorablement ma rétro sur Sammo Hung. Mais même via l'import, difficile de le trouver à un prix raisonnable.

[pabelbaba]

Même notre Z2 est épuisé...

J'ai le Z1 je crois, ça devrait sortir en BR chez 88 Films je pense.

[Dunandan]

Sinon il est dispo sur Youtube, mais me faire casser les couilles par les pubs toutes les 30 min, non merci...

[angel.heart]

Pour rester sur Sammo, mais cette fois-ci juste en tant qu'acteur, as-tu vu Le héros magnifique de Yuen Woo-ping?

De mémoire c'est mortel, facile dans mon top 10 du genre.

[Dunandan]

Non, mais j'ai commandé le coffret Eureka, et il est dedans (The magnificent Butcher).

[Dunandan]

Battleship Island, Ryoo Seung-wan (2017)

Pour commencer, ce n'est pas vraiment un film de guerre ni d'action pure, mais plutôt un film sur la guerre. Ça pète dans tous les sens seulement dans un climax intense de 15 minutes, mais sinon on est plus dans le drame historique avec des enjeux humains. Et première chose qui saute aux yeux, c'est que c'est bien shooté. C'est bien simple, il n'y a pas un seul plan qui ne soit pas travaillé au niveau du cadrage ou de la photographie, et c'est donc plutôt agréable à suivre malgré un sujet forcément sombre. D'autant plus que les protagonistes sont tous intéressants (les musiciens - surtout évidemment le père et sa fille -, l'espion, le meneur, ou encore le gangster et la prostituée), même si les personnages plus secondaires ont tendance à s'oublier dans la masse. Il faut dire que la reconstitution a de la gueule, et on sent les moyens à chaque instant.

Encore une fois, bien que l'action soit en retrait, l'histoire n'en est pas moins intéressante grâce aux personnages évoqués ci-dessus. Le fond, la folie de la guerre, puis dans un second temps l'effort collectif contre les injustices, est simple mais efficace, mené avec intensité, passion, et crédibilité. Je regretterais à la limite un montage un peu trop rushant par moments, accusant du coup quelques soucis de rythmique, mais sinon c'est du tout bon, surtout que ça aborde un aspect de la seconde guerre mondiale que je n'ai jamais vu traité au cinéma (la place des coréens dans l'effort de guerre japonais). Même si ça reste relativement sage, certains passages évoqués sont glaçants (genre je pensais à plusieurs reprises que la gamine allait passer à la petite casserole), et quand bien même la relation entre japonais et coréens n'est pas toujours traitée de manière très subtile, je m'attendais franchement à bien pire, surtout avec la présence du traître qui vient apporter un peu d'équilibre au tout.

Pour revenir sur la fin, c'est une petite dinguerie. C'est cash, violent, et épique (l'évasion avec la musique de Morricone, pur moment, et cette bataille de tranchée où les balles fusent de partout tandis qu'on essaie de lever cette foutue échelle, pfff). Et en plus ça arrive à faire passer plein de moments d'émotion, via, encore une fois, les relations entre le père et sa fille, puis le gangster et la prostituée (ce plan final entre eux-deux, et la petite chanson au générique, rien de tel pour filer le bourdon). Enfin, même si je ne me rappelais plus de l'implication de chaque personnage, chaque mort au combat accuse un certain poids à l'écran, ce qui apporte un petit supplément d'âme qui fait du bien. Un film que j'ai déjà envie de revoir, ce qui est plutôt bon signe.

Note : 8/10

[Jed_Trigado]

[lvri]

Je garde un excellent souvenir de ce film ! Révision prévue d'ici peu !

[Alegas]

Ryu seung-wan c'est bon, mangez-en.

[Dunandan]

À date, sûrement son meilleur film. Je ne suis pas très fan de The Unjust, mais The Berlin et City of violence, je dis oui. J'ai Veteran sur ma liste.