Enfin. Enfin un film sur la banlieue telle qu'elle est vraiment : un endroit comme les autres. Un collège français avec des gamins paumés. On est plus proche du Cercle des Poètes Disparus que de Entre les Murs, avant tout grâce à la fibre humaniste apportée par le duo Grand Corps Malade / Mehdi Idir. Contrairement à la Palme d’Or 2008 où l’angle était clairement sociologique, avec la radiographie du système scolaire par le regard des professeurs, là on donne vraiment la parole aux enfants. Du début à la fin. On mets les jeunes au même niveau que le corps enseignant. Tous, avec leur trajectoire propre, sont placés dans un contexte difficile et en chient. On les voit vivre au rythme très spécial d’un collège en ZEP. C’est le bordel, ça chambre, ça mythonne, ça court et ça se fritte, mais comme partout ailleurs, ça rit, ça pleure, ça s’amuse et ça panique. On est plutôt entre les lignes. La subtilité des situations vient du regard bienveillant des deux réals qui s’efforcent de mettre tout le monde au même niveau. Tout cela est imposé dès le début, par la mise en scène, et continue tout le long d’inister sur le fait que tout le monde, de la CPE aux SEGPA, sont dans le même bateau. Faut galérer plus qu’ailleurs, mais on est là tous ensemble dans un collectif, et on va tous s’en sortir d’une manière ou d’une autre. Le ton est vraiment positif, sans nier la part de violence inhérente à la pauvreté ambiante. On n’est pas dans le jugement, ni dans le misérabilisme. Oui, c’est Saint-Denis. C’est pauvre. Y’a du traffic. De la violence. De la criminalité, même. Mais en bas des immeubles, t’as surtout des gamins qui glandent. Chez les profs, t’as des mecs en insécurité mais on n’est pas dans Polisse, on va pas se jeter par la fenêtre. On est juste devant, par ex, un prof peu sur de lui qui, par son manque de confiance en lui, et par sa crainte (compréhensible, là encore) alimente le système qui veut que personne ne déborde des rangs. Le système ne cherche pas à comprendre, il lit les mots sur les cahiers comme un vulgaire algorithme. Des absences, une échauffourée, tu es un élément perturbateur. Et le système est tellement fort qu’il persuade les gosses eux-même de leur incompatibilité. Ils jettent l’éponge avant même d’avoir enfilé les gants. C’est tragique. Mais c’est la réalité. Le film est dans cette fibre là. Il est vrai. C’est pas un documentaire en plan fixe, c’est habité d’une réelle envie de montrer les choses par le biais de la caméra. On a des plans séquences, du split screen, des plans très chargés en émotion. Bref, c’est pas le doc France 2 de la rentrée sur les difficultés scolaires. C’est la vie à l’école, tout simplement.