Le moins que l’on puisse dire, c’est que ce film ne partait pas du bon pied avec moi. Il faut dire que le film précédent de Lánthimos figure aisément parmi l’un des pires films de ces dernières années à mes yeux, le genre qui m’horripile au plus haut point, et où chaque scène me donnait envie de quitter la salle. Pour celui là, c’est donc vraiment le casting et le choix du film d’époque qui a suscité ma curiosité, et heureusement car c’est vraiment une belle surprise au final. Si je devais résumer rapidement le film, je le ferais avec une comparaison : on a souvent l’impression de voir
Ridicule, de Patrice Leconte, dans le contexte de la cour anglaise, mais avec une ambiance plus malsaine et des coups bas qui ne se limitent pas à des mots bien choisis.
On va donc assister à une sorte de triangle amoureux qui se transforme rapidement en un duel sans merci pour devenir la servante préférée de la reine et ainsi avoir les faveurs de cette dernière, et autant ça aurait pu donner quelque chose d’assez générique chez un nobody, autant chez Lánthimos il y a une folie apportée au récit et aux personnages qui rend le spectacle aussi repoussant (dans le bon sens du terme : la cruauté va très loin dans cette histoire) que jouissif (j’avais un grand sourire à chacune des parties de tirs entre Stone et Weisz
). Pour moi donc, c’était carrément étonnant de voir cette ambiance malsaine si particulière, que j’avais détesté dans
KIlling of a sacred deer, transformée pour s’adapter parfaitement à un contexte de film de costumes, genre sur lequel peu de personnes osent aller dans ce genre de directions.
The Favourite fait donc vraiment figure à mes yeux de film réellement original, autant dans ses propositions formelles (une photo très sombre, l’utilisation de focales très courtes) que dans son approche quasiment inédite, et c’était donc un vrai plaisir que de suivre ces joutes dont on peut difficilement prévoir l’issue.
Et pour le coup, je pense que le film ne serait clairement pas le même sans son casting : déjà, les seconds rôles sont vraiment excellents, Nicholas Hoult en tête (il est carrément on fire lui, faut voir la scène où il se fait un plaisir de discréditer la reine en public
), mais c’est vraiment le trio d’actrices qui élève le métrage à des hauteurs qualitatives étonnantes. Emma Stone, c’est bien simple, c’est la meilleure prestation de sa carrière, kif-kif avec
La La Land, elle gère parfaitement son personnage complètement manipulateur. Rachel Weisz, c’est sûrement son meilleur rôle depuis dix ans (et encore, je n’ai pas vu
The Lobster, que j’ai du coup très envie de découvrir
), et moi qui adore cette actrice ça fait un bien fou de la voir incarner un personnage qui soit aussi surprenant sur la durée. Et puis, enfin, Olivia Colman est vraiment la révélation du film, faut voir le rôle pas évident qu’elle a, et qu’elle arrive pourtant à gérer merveilleusement bien, inspirant autant de la compassion que du dégoût pur et simple. Pour le coup, l’Oscar n’a pas été volé, c’est le moins qu’on puisse dire. Un film que j’ai déjà envie de revoir, de la part d’un réalisateur dont je n’attendais absolument rien, je pense que je n’exagèrerais pas si je dis que c’est ma plus belle surprise ciné de ce début d’année.