J’avais longtemps repoussé la vision à cause de la durée, mais le fait est que
Das Boot ne fait pas mentir sa réputation. On pourra toujours avoir une préférence pour un autre film de sous-marin, mais le métrage de Petersen est, et restera encore sûrement longtemps, LE classique incontestable de ce sous-genre. Dès le départ, on se doute qu’on va être devant un super film, ne serait-ce que par le point de vue adopté. Car bon, des films de guerre abordant le point de vue anglais, américain ou français, c’est chose courante, mais se retrouver plus de trois heures avec comme seule compagnie un équipage nazi c’est déjà nettement plus rare. D’autant que le récit ne cède pas aux clichés habituels, et à part deux-trois officiers rencontrés en cours de route, on est loin d’être face à des nazis tel qu’on aime bien les dépeindre habituellement. Ici donc, ce sont bien des soldats allemands, mais ce sont surtout des hommes fatigués par la guerre, agissant plus pour leur pays que pour une idéologie quelconque, et d’ailleurs la plupart, le commandant le premier, observent généralement un silence poli dès qu’il s’agit d’évoquer Hitler. Les motivations des personnages sont simples : réussir la mission (couler un maximum de convois anglais) et rentrer sain et sauf, et c’est vraiment ce qui fait la réussite du récit, puisqu’il est dénué de toute notion d’héroïsme qui pourrait rendre le spectacle factice.
A côté de ça, c’est la psychologie à l’intérieur du sous-marin qui est à saluer : j’ai beau avoir vu une quantité non négligeable de films sur le sujet, je n’ai jamais vu un seul qui abordait à ce point la difficulté de vivre à plusieurs dans un étroit habitacle de métal, avec la mort qui pourrait intervenir à n’importe quel moment. Pétages de plombs de certains protagonistes, rangements des vivres et des torpilles, l’ennui qui s’installe lorsqu’il ne se passe rien plusieurs jours d’affilée, la peur silencieuse lorsque les bombes arrivent, autant de détails qui font de
Das Boot le meilleur film sur le sujet : on a réellement l’impression d’y être. A ce titre, le film doit aussi beaucoup à son ambiance claustrophobique à souhait, et pour le coup gros travail de mise en scène (les travellings en caméra portée qui vont d’un bout du sous-marin à l’autre
) et sur le son (clairement le genre de film à voir dans de bonnes conditions de visionnage), au point qu’on se demande comment Petersen a pu flinguer sa carrière comme il a pu le faire ensuite.
A ma grande surprise, la durée de 3H30 passe toute seule. Alors oui, il faut être motivé, mais le fait est que le film gère à merveille son rythme, et je ne peux que conseiller de le voir d’une seule traite, sinon il y a vraiment le risque de perdre l’ambiance en cours de route. J’ai aussi été surpris par la qualité visuelle du film : hormis quelques plans où on sent un écran derrière les acteurs ou des maquettes, jamais on a l’impression de voir un film de 38 ans. Enfin, gros boulot d’interprétation de la totalité du casting (quasiment que des inconnus), c’est pas comme si on connaissait chaque membre de l’équipage mais presque, et ça rend le final d’autant plus déchirant (on le voit venir pourtant, mais pas de cette façon). Un classique que je conseille grandement, ceux qui auront le courage de braver la durée auront la chance de voir le meilleur représentant de son genre, et ça, ce n’est pas rien.