Green Book Sur les routes du sud |
Réalisé par Peter Farrelly Avec Mortensen, Mahershala Ali. USA Genre : drame Durée : 02h10min 2018 |
8/10 |
SynopsisEn 1962, alors que règne la ségrégation, Tony Lip, un videur italo-américain du Bronx, est engagé pour conduire et protéger le Dr Don Shirley, un pianiste noir de renommée mondiale, lors d’une tournée de concerts. Durant leur périple de Manhattan jusqu’au Sud profond, ils s’appuient sur le Green Book pour dénicher les établissements accueillant les personnes de couleur, où l’on ne refusera pas de servir Shirley et où il ne sera ni humilié ni maltraité.
Dans un pays où le mouvement des droits civiques commence à se faire entendre, les deux hommes vont être confrontés au pire de l’âme humaine, dont ils se guérissent grâce à leur générosité et leur humour. Ensemble, ils vont devoir dépasser leurs préjugés, oublier ce qu’ils considéraient comme des différences insurmontables, pour découvrir leur humanité commune.
CritiqueInspiré d’une histoire vraie, Green Book mélange élégamment les genres et les styles, un road/buddy movie ou un « miss Daisy et son chauffeur » inversé, une belle réalisation de la part de l’un des frères Farrelly.
Une rencontre incongrue entre deux hommes de classes différentes qui n’ont pas grand-chose en commun mais qui vont apprendre à se connaitre et à échanger leur savoir dans divers domaines, tout en opposant leurs points de vue.
Sur leur route, les obstacles, les rencontres, les souvenirs les confrontent à des situations banales, émouvantes ou uluberluesques.
Tout d’abord, je ne pense pas qu’ici (tout du moins eu Europe), les gens connaissent ce qu’est le fameux « Green Book / vacations without aggravation » : c’est tout simplement un guide de voyage qui indique les établissements acceptant les gens de couleurs. Bien entendu, le film parle de ségrégation et comme dans « la couleur pourpre » ou « la couleur des sentiments » , « green book » souligne la débilité de certaines règles interdisant certains endroits, certains accès aux noirs sans aucune logique.
Viggo Mortensen (Tony Vallelongai) incarne un père de famille d’origine italienne dans la même veine qu’un Soprano, qui aime la bonne chair, les plaisirs simples de la vie, décomplexé, d’une grossièreté naturelle, l’immigré américain moyen, qui est un vrai moulin à paroles. Une interprétation toute en justesse, car avec ce type de personnage au sang chaud et balourd, il est facile de tomber dans l’excès ou la caricature, son naturel déconcertant ne peut que s’attirer la sympathie du public.
Il est engagé par Dr. Shirley (Mahershala Ali) qui est l’alter ego d’un Mariah Carey des sixties, vivant dans un mini-palace doré au-dessus du Carnegie Hall, un génie du piano, multi-lingues toujours tiré à 4 épingles qui a toujours vécu dans sa bulle d’intellos. En revanche, même si intérieurement il est la caricature d’un dandy blanc, sa peau est bien noire. De ce fait, les blancs l’acceptent dans une certaine mesure par son talent musical mais il est rejeté des siens car son mode de vie n’a rien à voir avec l’afro-américain moyen.
Ainsi, Dr Shirley va faire découvrir à Tony le monde des concertos de la musique classique, tenter de lui inculquer les bonnes manières, d’éviter les jurons et d’écrire des lettres d’amour inspirées à sa femme.
Même si Tony est moins cultivé, c’est un chatteur/arnaqueur né qui va lui aussi transmettre son savoir-faire à la diva et souvent lui sauver la mise lors de leur traversée chez les rednecks.
Green Book montre que le mot Culture avec un grand C n’a rien d’universel (que par exemple la musique populaire souvent dénigrée appartient aussi au patrimoine culturel) et que le respect des lois à lettres n’a rien de logique surtout dans le contexte historique du script.
Ce choc de cultures offre de nombreuses situations cocasses et des répliques bien trouvées, la sorte de répulsion initiale que possède Dr Shirley pour son chauffeur aux manières peu ragoutantes s’effacent pour se transformer en amitié et respect mutuel à travers des initiations musicales, gastronomiques truculentes..(une rencontre de gens qui s'opposent qui me rappelle celle de Holy Lands entre un rabbin et un éleveur de porcs)
Enfin, Tony tente de comprendre pourquoi ce musicien si prestigieux ose faire une tournée de concerts dans des contrées où il n’est pas le bienvenu et où il n’est pas en sécurité.
Un feel good movie délicat qui dénonce des injustices flagrantes tout en narrant une belle histoire d’amitié improbable.