Un des plaisirs que je peux parfois trouver en allant au cinéma est de me retrouver devant un film qui dépasse mes attentes. C’est encore plus vrai lorsque la chose arrive devant un film français, et ça l’est encore davantage lorsque le film en question est un film de genre. Et c’est exactement ce qui s’est passé avec ce
Burn Out, qui sort un peu de nulle part et qui se range pourtant à mes yeux parmi ce que la France a pu livrer de mieux dans le genre depuis bien longtemps. Pour autant, je ne vendrais pas le film pour ce qu’il n’est pas, c’est clairement pas un grand film, ni même un truc un tant soit peu révolutionnaire sur le plan cinématographique, mais c’est juste un divertissement sur lequel j’ai finalement peu de réserves, qui fait très bien son job de tension et qui, hormis deux-trois pirouettes scénaristiques, ne m’a jamais donné l’impression d’être pris pour un idiot.
Côté script, c’est très classique avec un motard professionnel contraint de faire le go fast durant trois mois pour effacer la dette de la mère de son enfant, mais là où le film est vraiment intéressant c’est du côté du héros qui va subir les évènements, contraints de se plier à l’exigence de ses nouveaux employeurs. En choisissant d’adhérer au point de vue d’un personnage qui ne peut rien faire si ce n’est obéir aux ordres, la tension en devient plus palpable, le danger peut réellement s’inviter à la moindre scène, et surtout ça donne un côté très appréciable avec le personnage qui tente de réussir son rêve professionnel le jour et qui procède à des trajets illégaux la nuit, le tout sans quasiment jamais dormir. Pour le coup, l’empathie fonctionne complètement, d’autant que Civil s’avère plutôt bon dans le rôle (ce qui n’était pas gagné à la base vu que c’est un acteur qui vire plutôt dans le registre comique), et de mon côté j’étais littéralement scotché à mon siège en me demandant avec appréhension ce qui allait se passer à la scène suivante, et ça mine de rien ça devient plutôt rare pour être souligné.
Et puis là où je trouve le film admirable, c’est vraiment du côté formel, et là il n'y a pas à chier c’est clairement un des films français les plus travaillés que j’ai pu voir visuellement (assez pour me donner envie de voir le reste de la filmo de Gozlan). Ca arrive à jouer avec des codes clipesques sans tomber dans la réalisation tape à l’œil (la séquence montage qui s’accélère au fur et à mesure de la prise des drogues, j’ai pas mal pensé à du Tsukamoto/Aronofsky toutes proportions gardées) et ça arrive à livrer des passages assez impressionnants qui font plaisir à voir pour de la prod française (toute la séquence style
Escape from New York où il faut infiltrer une banlieue en état de siège
). C’est aussi bien filmé dans les séquences à moto ultra-immersives que dans des passages plus posés (il y a un plan de miroir qui reprend celui de
Contact, entre celui là et le Dupontel on dirait qu’il y a quelques réals français fans de Zemeckis
) et même côté photo c’est très réussi : c’est pas juste là pour faire joli, il y a vraiment des idées de mise en scène derrière, tout en jouant sur l’économie de moyens (le long plan-séquence de poursuite dans la banlieue où les traqueurs sont majoritairement des ombres sur les murs et des voix hors-champ
). Non vraiment je pourrais faire mon chieur et critiquer quelques points du script, mais pour le coup vu la surprise que je me suis pris je n’en ai aucune envie, et je ne peux que ardemment conseiller la vision de
Burn Out tant c’est, à mes yeux, la qualité et l’ambition qu’il nous faudrait plus souvent dans notre production nationale.