Jeannette, l'Enfance de Jeanne d'Arc de Bruno Dumont - 2017
Je dois indiquer avant tout que c'est le thème de Jeanne d'Arc qui m'intéressait ici, et pas le travail de Bruno Dumont dont je n'avais rien vu auparavant. Le personnage a un destin incroyable et aucun raisonnement logique ne permet de comprendre ce qu'il s'est vraiment passé. En cela, j'avais bien aimé la version de Besson. Pas en tant que film, qui est plutôt quelconque, mais plutôt en raison de la proposition faite via Dustin Hoffman, qui était vraiment bien vue.
Ici Dumont s'attache à la partie la plus intéressante de la vie du personnage, à savoir sa jeunesse à Domrémy où son destin s'est écrit. Pour cela, il s'appuie sur les textes de Charles Péguy de la fin du XIXème et du début du XXème siècle. Autant dire de façon austère et difficilement abordable littéralement, tant le langage employé est à présent loin du nôtre.
Je pense que c'est pour cette raison que Dumont a choisi d'en faire un film musical, cela permet d'adoucir ces textes d'un autre temps et de faire diversion. La technique est extrêmement casse-gueule, ce d'autant plus que Dumont va le plus loin possible dans la démarche en se lançant dans des scènes d'une nanardise complètement folle. Quand les nonnes enlèvent leurs coiffes et se mettent à headbangger... Quand l'oncle rappe de façon maladroite et danse la tektonik pendant qu'une vieille chante faux... Quand les apparitions de Jeanne se mettent à faire passer leurs doigts devant les yeux comme Mia Wallace et Vincent Vega...
Le facepalm dépasse tout ce que l'on a déjà vu. Et de très loin.
Mais malgré tout, les textes passent. C'est impensable, mais on les suit et on comprend finalement en quoi l'environnement de Jeanne dans sa jeunesse l'a amené à vouloir se battre contre les anglais. Cette solitude, son entourage religieux, ces infos au compte-goutte, cette absence de voyage et de connaissance du reste du royaume, sont finalement assez bien retranscrits. Le fait de n'avoir tourné que dans une dune avec pour seuls figurants quelques moutons a bien aidé de ce côté là.
Et puis le chant des deux jeunes filles qui se succèdent pour interpréter le rôle principal a une double facette, d'un côté horripilant parce qu'il est trop présent et peu assuré, mais aussi entêtant comme une prière chantée qui dure trop longtemps. Sans compter sur leur amateurisme total qui nous retient de leur jeter la pierre quand cela devient épuisant.
Au final, c'est une vraie expérience cinématographique, totalement imparfaite mais dont la démarche n'est pas aussi vaine qu'elle en a l'air. Un peu à la manière de
Dogville de Lars Von Trier, mais dans un tout autre style.
7,5/10