Crimson Peak de Guillermo Del Toro
(2015)
J'avais un peu d'appréhension avant de le revoir, car j'avais beau avoir aimé le film à sa sortie, j'y trouvais néanmoins quelques défauts qui me faisait craindre une revision à la baisse. A ma grande surprise, il n'en est rien, et si Crimson Peak apparaît clairement une œuvre assez mineure dans la filmographie de Del Toro, il n'empêche qu'il signe là l'un de ses plus beaux films. Pour le coup, c'est assez simple, il faut vraiment pas en attendre un film de fantômes, sous peine d'être déçu, et Del Toro le dit très rapidement via l'un de ses personnages : le fantôme ne va être ici qu'un prétexte pour poser les bases d'un grand récit romantique fantastique. C'est peut-être d'ailleurs là le mot qui va résumer le mieux Crimson Peak : le romantisme. Le film en déborde, au point que ça risque d'agacer ceux qui attendent quelque chose de plus terre à terre, mais c'est à mon sens la grande qualité du métrage, qui assume pleinement cette identité.
A la revision, l'histoire s'est donc révélée encore plus touchante, avec une empathie plus prononcée pour les personnages, et là encore je me demande si c'est pas une question d'attente, puisqu'une fois le côté horreur relégué au second plan, on peut pleinement s'immerger dans cette romance tragique. Il y a bien encore quelques défauts que je pourrais critiquer sur le film, comme le peu d'épaisseur que possèdent certains personnages secondaires, l'enquête toute simple vers la résolution du mystère, ou encore ce twist final qui se voit venir à des kilomètres, mais le film arrive néanmoins à très bien fonctionner malgré ces faiblesses. Formellement, Del Toro se fait plaisir, et après un Pacific Rim qui s'aidait beaucoup de décors en CG, le réalisateur se permet d'opter pour quelque chose à l'ancienne. Le résultat est assez incroyable, avec une production design qui fait aisément partie de ce qui a pu se faire de mieux ces dernières années. Le décor principal du manoir est un modèle de décor bien foutu et inspiré, à mi-chemin entre le classicisme d'un décor de la Hammer et le baroque de l'école de Suspiria (la photo fait carrément penser à du Argento par moment), et je ne parle même pas des costumes, c'est un peu la honte que le film n'ait même pas eu une nomination pour le boulot de dingue qui a été fait sur tout cet aspect du film.
Surtout qu'à côté de ça, Del Toro ne se prive pas de magnifier ce qu'il filme, et autant le film a une mise en scène à l'approche très classique, autant la majorité du métrage flatte sacrément la rétine, notamment dans ses plans d'ensemble. Côté casting, il faut savoir que le film était pensé à la base pour Emma Stone et Benedict Cumberbatch, et au final c'est pas plus mal d'avoir le casting actuel, tant il y a une véritable alchimie dans le duo principal. Tom Hiddleston en particulier s'en sort à merveille dans le rôle le plus intéressant du film, dommage qu'on puisse pas en dire autant de Jessica Chastain, qui en fait un peu trop dans son registre de méchante à peine cramée. Un petit mot sur la musique de Velázquez, tout simplement sublime, notamment dès qu'il s'agit d'aller traiter la relation amoureuse. J'ai plus trop les compositions des films de Bayona en tête, mais c'est fort probable que ce soit son meilleur travail so far. Crimson Peak, un bien beau film, certes moins pertinent que d'autres œuvres de son auteur, mais d'une sincérité à toute épreuve.
7,5/10