S'il y a bien un film que j'attendais à la fois avec curiosité et impatience, c'est bien celui-là. Car bon, revoir Edgar Wright après son adaptation avortée d'Ant-Man, mine de rien, ça fait plaisir, mais d'un autre côté ce projet donnait l'impression d'être difficilement vendu par la promo, chose qui se confirme puisque cette dernière n'effleure finalement que la surface du potentiel du métrage. La relation entre Wright et la musique a toujours été quelque chose de fort dans sa filmographie, que ce soit dans le répertoire de chansons ou dans la façon de les utiliser avec un montage ultra-efficace, et ici c'est clairement le summum de cet aspect, puisque Wright cherchait justement à faire un blockbuster dans le rythme entier se ferait en fonction d'une soundtrack choisie en amont. Du coup, dès le début de
Baby Driver, on connaît en quelques secondes la note d'intention de Wright, avec un montage et les actions des personnages calqués sur de la musique qui envoie du lourd, et autant cela peut paraître un peu banal quand il s'agit de filmer un personnage qui attend dans une voiture (et encore, même à ce stade il y a déjà beaucoup d'idées de mise en scène), autant dès que la course-poursuite commence, on entre dans le vif du sujet.
A partir de là, c'est du Wright en mode show-off, mais sans jamais oublier l'efficacité de la narration, et autant le film est carrément concept à première vue, avec son montage intimement lié à la musique (il y a carrément une fusillade où la moindre note correspond à un coup de feu), autant ça reste un film très humain, qui laisse parler ses personnages avant tout, et du coup on se retrouve un peu devant
Drive en version
Scott Pilgrim. Visuellement, autant le dire tout de suite, c'est peut-être bien le film le plus abouti de Wright, avec cette éternelle recherche du détail qui va faire toute la différence (le plan-séquence où Baby va chercher du café, et où les paroles de la chansons sont écrites dans la rue sans que ça ne saute forcément aux yeux), mais à côté de ça il y a une certaine sobriété bienvenue, qui donne du coup l'impression d'avoir un film qui a à la fois un pied dans une période 60's/70's et à la fois dans notre époque. De ce côté là donc, le film est vraiment une bouffée d'air frais à une période où la majorité des films se ressemblent, et quand on voit le peu de budget que ça a coûté on se dit que Wright gère vraiment à merveille le côté spectaculaire de son film.
Surtout qu'à côté de ça, la partie comédie est vraiment efficace (le gag sur les masques de Myers
, l'écoute des mixtapes
) et enfin l'écriture est du Wright pur jus, avec des personnages très codifiés qui finalement étonnent de par leur revirement émotionnel. Même du côté des bad-guys il y a une envie de ne pas tomber dans le manichéisme et c'est tout à l'honneur de Wright qui livre un film dont le concept repose à première vue sur un gimmick de mise en scène, mais qui finalement se repose entièrement sur ses personnages (le perso du black sourd c'est le genre de perso qui fait peur de base mais qui finalement est très réussi). Côté soundtrack, Wright et concept oblige, c'est du pur bonheur, le must étant de constater qu'il n'y a pas un morceau qui se fait remarquer plus qu'un autre, non toute la BO est vraiment excellente du début jusqu'à la fin, preuve du bon goût du réalisateur. Enfin, côté casting, tout le monde est bon, même Ansel Elgort dont je me méfiais un peu, et puis ça fait vraiment plaisir de revoir Kevin Spacey dans un bon film.
Baby Driver, c'est un peu la meilleure chose qui pouvait arriver à Wright : après s'être fait avoir par un studio, il livre un film qui va mettre une branlée monumentale aux blockbusters estivaux dix fois plus friqués. Comme quoi, tout n'est pas perdu.