Vu l'anonymat relatif dans lequel est tombé le film aujourd'hui, je pensais que la talent de Costa-Gavras n'exploserait réellement qu'à partir de son troisième film,
Z, autrement plus réputé. Au final, la surprise est grande tant
Un homme de trop me paraît déjà être la confirmation totale des qualités de son réalisateur, à la fois en tant que metteur en scène et scénariste. Sur un sujet encore aujourd'hui peu exploité correctement par le cinéma français, Costa-Gavras livre tout simplement l'un des meilleurs films sur la Résistance, ce qui est d'autant plus surprenant qu'il s'attaque à un angle généralement mis de côté, puisque c'est ici la guérilla et les escarmouches dans le maquis qui intéressent ici. On suit donc le quotidien d'un commando de résistants en pleine guerre dans la France occupée, l'originalité étant qu'on est loin d'avoir en face de nous des combattants expérimentés, mais bien beaucoup de novices guidés par leur amour de la liberté et de leur patrie, ainsi que par un leader charismatique.
Si le film démarre de façon plutôt classique, on se rend bien compte assez vite à quel point Costa-Gavras sait exploiter son sujet au maximum. C'est bien simple, il y a des idées à chaque minute (rien que le début avec les fausses grenades, et les pièges laissés sur les portes ou dans les tiroirs), preuve d'un grosse documentation en amont, et dès les premiers dialogues on saisit que ce qui intéresse le réalisateur dans ce film ce n'est pas forcément le combat en lui-même, mais bien ce qu'il engendre sur les hommes. A ce niveau là, le film ne cherche pas à faire dans la dentelle et n'hésite pas à rappeler que parmi les français, il y en avait un paquet qui n'hésitait pas à protéger le régime de Vichy (tout l'arc autour du collabo blessé, l'une des meilleures idées du métrage) et que même chez les résistants ce n'était pas forcément tout blanc. C'est clairement ce souci du réalisme, et cette recherche du non-manichéisme qui fait toute la richesse d'
Un homme de trop, bien loin des productions calibrées que l'on se tape encore parfois de temps en temps.
A cela s'ajoute l'autre très gros point fort du film, à savoir la mise en scène de Costa-Gavras, qui gagne énormément en ampleur pour finalement livrer certaines des meilleures scènes de combat que j'ai pu voir dans un production française. Que ce soit l'utilisation de la caméra portée (ce travelling où Cremer s'avance sur le place pour déloger le tireur isolé
), la maîtrise du scope, la gestion de la tension (la séquence de la fuite en bus) ou encore les quelques sublimes plans en hélicoptère (la séquence du camion, et surtout ce final sur le pont), j'ai rarement vu autant d'ambition visuelle dans un film de ce genre, ce qui me surprend d'autant plus que je vois à quel point le film est quasiment oublié. Quand au casting, à l'instar de son premier long-métrage, Costa-Gavras se fait clairement plaisir en alignant les talents, et si Cremer, Vanel ainsi que Brasseur en imposent, c'est clairement Piccoli qui vole le film à mes yeux, avec un personnage mystérieux écrit et interprété tout en finesse. Encore une fois, je ne peux qu'être révolté devant le peu de réputation que possède cet excellent film, qui est clairement à ranger aux côtés de
L'Armée des ombres, avec lequel il partage une vision sans concession de la Résistance française.