J'ai beau avoir énormément de sympathie pour Ben Affleck, qui m'apparaît comme un gars plutôt sincère dans la plupart de ses choix de carrière ou ses intentions de réalisateur, j'ai à côté de ça beaucoup de mal avec sa constante inégalité : à chaque fois que j'ai l'impression que le bonhomme repars sur une bonne lancée, il vient toujours un film pour me contredire. Dans le cas de
Live by night, c'était quand même un film sur lequel j'avais pas mal d'espoirs. En regardant les premières images, j'avais l'impression que Affleck se sortait les doigts du cul pour pallier à son plus gros défaut de mise en scène jusqu'ici, à savoir que ses films formellement parlant n'étaient pas irréprochables. Avec l'aide d'un directeur photo doué comme Richardson, j'espérais que
Live by night devienne le film qui justifie tout le délire autour d'
Argo (Oscar du meilleur film devant Zero Dark Thirty et Django Unchained, allez comprendre
), mais une nouvelle fois Affleck livre un métrage au mieux sympathique, autant bourré de qualités que de défauts.
N'ayant pas lu le livre dont il est tiré, je ne jouerais pas au jeu de la comparaison, mais j'ai clairement l'impression que soit Affleck en raconte trop, soit il n'en raconte pas assez, à l'image de sa longue introduction qui aurait pu être franchement écourtée, mais qui aurait pu passer si derrière suivait une longue fresque gangsterienne. Encore une fois, il y a cette constante inégalité que l'on trouve souvent chez Affleck du côté de l'écriture, avec des personnages secondaires à peine esquissés pendant que d'autres ont des pans entiers du film pour leur propre subplot. Surtout que pour un récit de rise and fall dans ce genre, à peu près tout tient dans le dosage de chacune des parties, et ici tant la descente aux enfers se ressent vraiment avec l'étau qui se resserre autour du personnage d'Affleck, que ce soit par la mafia ou par l'opinion publique via la storyline d'Elle Fanning (qui est peut-être bien la plus intéressante du film), autant on croit difficilement à l'apogée d'Affleck dans le monde du crime, lui qui arrive à se débarrasser du Klu Klux Klan en dix minutes de film. Il y a donc cette impression de voir un long film dont on a coupé pas mal de scènes majeures, au détriment de l'écriture des personnages (l'histoire d'amour avec Zoe Saldana est particulièrement loupée de ce côté là).
C'est bête car visuellement le film est franchement joli, Affleck peut dire merci à Richardson qui embellit la majorité de ses plans, car bon à côté de ça en terme de mise en scène pure c'est pas toujours la joie. Ok, parfois Affleck a des idées, notamment lors du climax final (la fusillade dans l'escalier avec le mec qui tombe d'étage en étage, ça pète bien) mais il suffit de voir la course-poursuite au début et son montage aux fraises pour comprendre que Affleck n'a pas encore les épaules pour un film d'une telle ambition. Surtout que ce dernier pose un double problème sur ce film : non seulement il ne m'apparaît pas comme le réalisateur approprié, mais surtout sa manie de se donner le premier rôle commence à devenir vraiment agaçante. Dès le début, il y a un gros problème de charisme sur son personnage, la musculature acquise pour
Batman v Superman n'aidant pas vu que Affleck donne l'impression d'avoir des costumes toujours trop grands pour lui
, et puis bon du côté du jeu lui-même il suffit de voir sa dernière scène avec Saldana pour comprendre qu'il aurait fallu quelqu'un avec une vraie palette d'émotion (j'ai vu que DiCaprio est producteur sur ce film, pour le coup l'avoir dans le rôle aurait amélioré significativement le métrage
). Reste un film pas mauvais en soi, mais où les limites de réalisateur et d'acteur de Ben Affleck se font clairement sentir. Le bonhomme aurait gagné, après le succès d'
Argo, à continuer sur un film plus mesuré dans ses ambitions.