Je pense que pour beaucoup, ce
coming back de Rocky s'annonçait dès le début comme une catastrophe (surtout après
Rocky Balboa qui semblait avoir épuisé tout ce qui avait à dire sur Rocky tout en lui offrant un magnifique chant du cygne), même s'il ne s'agissait plus pour lui d'endosser le rôle principal. En effet, le doute était permis vu le (maigre) pedigree du réalisateur et de son poulain, et le caractère ridicule de l'amorce du projet (ce fils caché d'Apollo dont personne n'avait encore entendu parlé). Et pourtant,
Creed se montre rapidement au niveau des meilleurs Rocky. Sans parler du niveau technique qui affiche une véritable maîtrise du plan-séquence, notamment durant les combats,
Creed capte parfaitement l'esprit de la saga tout en lui injectant une identité propre. L'affiche ne ment pas à ce sujet. Ainsi, on parle d'héritage, rimant certes avec continuité, mais sans jamais nous donner l'impression qu'on se refait un ancien épisode (comme le fait de remplacer subtilement le thème phare par du rap pour coller aux goûts d'Adonis). Un retour aux sources reprenant donc les éléments bien connus de transmission et de quête d'identité, de cette rage au ventre qui ne peut décidément pas se régler hors du ring, mais qui se permet également de poser les premières pierres d'une nouvelle mythologie.
Cette réussite, on la doit aussi beaucoup à Ryan Coogler, et il serait d'ailleurs intéressant de voir à quel point son précédent essai,
Fruitvale Salvation, a pu influencer ses choix tant narratifs que stylistiques pour
Creed. Car ce parcours d'un jeune black venant faire table-rase de ses origines pour se conquérir un nom à la force des poings sans vraiment questionner ses raisons, et cette peinture des rues de Philadelphie, sonnent tout simplement justes. Sans fausse nostalgie, on y ressent une pulsation, une vérité. Tout cela, bien que fidèle à ce qui faisait l'essence des
Rocky, ne semble jamais préfabriqué, avec un environnement qui devient lui aussi un personnage à part entière pour plus d'immersion. Résultat, les séquences émotionnelles qu'on attendait un petit peu au tournant nous prennent à la gorge, et pas forcément là où on pourrait s'attendre le plus (je pense à toutes les scènes en rapport avec le père d'Adonis), le tout avec une certaine retenue (exceptés peut-être l'encouragement à distance de la maman ou les racailles à moto venant accompagner Creed Jr lors du traditionnel
footing en faisant les kékés) qui force le respect. Bref,
Creed est une renaissance inespérée de la saga et une conclusion idéale qui auront évidemment une résonance particulière pour ceux qui auraient entretenu un rapport particulier avec le personnage.
Note : 8/10