Nombreux sont les films qui, au cours de l'histoire du cinéma, ont reçu une récompense beaucoup trop grande, la preuve étant qu'ils ont été oubliés depuis. On pourrait citer des exemples en pagaille, comme celui de
Crash, petit film sorti de nulle part réalisé par un scénariste en vogue à l'époque (Paul Haggis, qui sortait du succès de
Million Dollar Baby, et qui allait signer peu après
Casino Royale et le diptyque Iwo Jima) et qui, face à l'un des meilleurs Spielberg contemporains, allait rafler la statuette alors que tout le monde pensait qu'il ferait office d'outsider. Aujourd'hui, avec le recul, on se souvient de la plupart des films nominés cette année là, mais qui parle encore de ce soi-disant meilleur film de l'année ? Si
Crash n'est pas un mauvais film en soi, il est ahurissant de constater à quel point un film aussi grossièrement écrit a pu gagner un tel prix (sachant qu'il a remporté aussi celui du meilleur script), à croire que l'Académie ne pouvait faire que les yeux doux face à un métrage qui parle de façon frontale du racisme en Amérique. Un film choral sur un tel sujet, pourquoi pas, mais en l’occurrence le film de Haggis pose quelques problèmes. Tout d'abord, il faut être aveugle pour voir que le réalisateur singe tant qu'il peut un vrai chef-d’œuvre, à savoir le
Magnolia de Paul Thomas Anderson (d'ailleurs, c'est justement cette influence qui m'a fait découvrir le cinéma de PTA). Les sujets des deux films sont totalement différents mais difficile de ne pas voir une vraie comparaison dans le montage du film, dans la façon dont se croisent les différentes storylines, bref c'est clairement la version less-talented d'un grand film.
Ensuite, et c'est là le gros défaut du métrage : c'est écrit n'importe comment. Le pitch de départ est prometteur, certains arcs tiennent leurs promesses (je pense notamment à celui du serrurier mexicain, touchant) mais à côté de ça il faut se farcir du racisme pour les nuls traité avec la grâce d'un éléphant, et ce n'est pas les disputes de couple sur la question du racisme qui vont me faire mentir (les discussions entre Thandie Newton et Terrence Howard, c'est totalement nawak
). D'ailleurs, c'est globalement toutes les évolutions de personnages qui foirent le propos. N'importe quelle situation dans le film est propice à mettre en lumière ne discrimination raciale, et le film ne loupe jamais l'occasion de le faire. Sur deux heures de film, autant dire qu'on a envie de hurler qu'on avait compris au bout de vingt minutes, ce qui aurait largement suffi. Pas étonnant donc qu'on ait totalement oublié ce tout petit film qui ne méritait pas un tel baroud d'honneur, quand bien même il présente quelques qualités, comme un montage bien pensé (les match cuts notamment), une mise en scène propre, une jolie BO et surtout un casting entièrement constitués de têtes connues mais pas souvent mises en avant. Reste que Crash est un film on ne peut plus anecdotique, au contraire de
Munich, qui lui, partira complètement bredouille.