Alors que je n'avais pas revu
Hero depuis des années, et après l'avoir rejeté comme bien du monde tant pour ses surenchères esthétiques (alors que le genre du
Wu Xia Pian avait déjà passé un cap - plus réussi - avec
Tigre et Dragon), que pour sa morale finale douteuse en faveur d'un fondement de la Chine idéalisé et discutable, finalement, avec surprise, voilà que mon appréciation est revue à la hausse.
Pour commencer, j'aime toujours autant sa structure à la
Rashômon qui apporte une certaine richesse et tension au récit, bien que dans son dernier tiers ce procédé devienne assez artificiel en enchaînant les rebondissements jusqu'au-boutisme. Un aspect (artificiel) qui me fascine et me dérange tout à la fois, car la manière dont
Hero est construit tient tant d'une allégorie poétisée et romancée portant sur le sens du héros et du sabre (et donc fatalement, du sacrifice), que de la reconstruction historique flirtant ici avec justification idéologique (bien que le metteur en scène s'en défende dans les interviews).
Mais en laissant de côté ce point qui n'est finalement dérangeant qu'en dernière ligne droite, d'autant plus que le personnage de l'Empereur est certainement l'un des plus intéressants du film, le seul étant avec celui de Jet Li qui connait une véritable évolution dans ses motivations, on ne peut passer à côté du travail d'orfèvre réalisé sur le cadre, les couleurs, et le son, faisant penser à du Chu Yuan ou du King Hu, sauf que là on a droit à du vrai décor naturel. Alors oui, l'abus de CGI fait parfois tiquer, mais on a quand même vu bien pire dans le genre, et cela donne bien souvent des séquences dantesques, que ce soit durant les combats, remplis d'une certaine grâce (mais moins fluides et réussis que ceux de
Tigre et Dragon), ou pour capturer une certaine ambiance, mettant ainsi en valeur les mouvements de foule, la nature, ou plus fondamentalement, les déchirements passionnels.
Enfin, jusqu'à
Swordsmen et surtout
Trois Royaumes (qui, faut l'avouer, lui sont bien supérieurs), on n'aura plus droit à un tel casting, ce qui apporte certainement beaucoup au traitement émotionnel du film qui m'a, pour ma part, beaucoup touché (notamment la destinée de Lame Brisée et de Flocon de Neige, liés à tous jamais, quelle que soit la version de l'histoire suivie), alternant avec une triste délicatesse amour perdu, loyauté, honneur, et confiance. Bref, si je ne hisserai pas
Hero comme porte-étendard du genre (ni même celui de la nouvelle vague), il possède suffisamment de qualités pour faire adhérer l'amateur de
WXP élégants et stylisés.