Uncharted 4. Extraordinairement nul. Autant génial et inspiré que bête et abrutissant. Sans doute le jeu de l'année tant il cristallise tout ce qu'il y a de bon et réussi mais aussi de plus archaïque et stupide dans un jeu vidéo. A l'image du précédent de Druckmann en somme, The Last of Us (qui n'avait, lui, aucun autre avantage que l'hiver).
Un contraste saisissant continuel ; entre décrochage de mâchoire, coups de génie et exaspérations régulières.
Au banc des accusés : tout ce qui est nul dans The Last of Us et Uncharted. Un rythme mal maîtrisé, un level design prévisible et peu inspiré, ces putains de GUNFIGHTS DE MERDE réglées avec la bite qui viennent péter régulièrement l'enthousiasme et le bonheur de la découverte et de l'exploration (même si, dans le dernier quart du jeu, on a l'impression de The Last of Us 1.5). Sans compter ce réalisme à deux vitesses épuisant de connerie qui vient constamment détruire les (hautes et nobles) ambitions de la narration, des personnages et de l'acting encore une fois impressionnants ; les ambitions seulement car le jeu a pour seul vrai talent de se tirer des chargeurs complets dans le genou en rappelant à quel point sa réflexion est basique voire inadéquate ; ne considérant l'évolution du média que par la mise en scène et le visuel. En faisant fi voire en méprisant les règles élémentaires du jeu vidéo ; pire en utilisant sa forme la plus paresseuse, la plus surannée. Une sorte de conservatisme par manque total d'idées et de génie. On est à deux doigts parfois d'un jeu de Cage (réussi).
Un comble lorsque l'on constate l'attention - incroyable - portée à la mise en scène pour raconter une histoire où tout marche ou presque. Où les "acteurs" (car il s'agit de ça) sont convaincants, attachants et cohérents... en cours de cinématiques car tout est oublié en jeu (le même syndrome que GTA en somme) en dépit des efforts pour essayer de lier les parties purement narratives et la narration par le gameplay (quelques idées géniales mais très/trop rares). Mais c'est loin d'être suffisant. L'interaction en tant que langage ne raconte hélas rien ou presque, agace voire exaspère.
Action surannée, problème de caméra, de maniabilité, bugs inexcusables (vu la qualité technique à la limite de la perfection), situations constamment téléphonées, gameplay lourdingue au possible. Les seules vraies grandes idées progressives (le grappin, le treuil, "l'infiltration") sont utilisées avec de gros sabots bien lourds, mal voire très mal, jusqu'à l'overdose et finalement, les seules sources de satisfaction deviennent autant de sanctions à l'encontre du jeu et nouvelle source de plaintes,
C'est ça le plus gros problème du jeu : passé l'effet waouh (de ce côté-là, pas de soucis, ils savent faire), on s'emmerde, on râle, on jure, on s'agace devant les incohérences, on prie pour que la prochaine scène de gunfight soit le plus loin possible. On doit se faire violence pour ne pas arrêter de "jouer à ce jeu de merde". On développe un rapport masochiste avec le jeu (qui n'excède heureusement pas 15 heures), une addiction pour voir le bout tout en se faisant du mal, en devant rogner sur ses principes pour trouver ce foutu trésor. Se battre pour continuer cette aventure poussive, inutilement longue et lourdingue. Epuisante. A l'image de ce que va vivre Nathan dans la dernière partie du jeu.
En résumé, un début (vraiment) merdique, un milieu fragile qui devient grandiose une fois à Madagascar - le jeu se transforme et se métamorphose pendant plusieurs heures pour livrer le meilleur de lui-même frôlant le génie absolu et la perfection en termes de rythme, d'accomplissement et d'équilibre tout en étant complètement dans son sujet. Et alors que l'on ressort galvanisé de tout cela et que l'on s'attend avec cet excellent jeu de pistes sur la plage à un dénouement tout aussi violent et excitant, on enclenche finalement une dernière partie longue, poussive, chiante et sincèrement éprouvante, qui oscille constamment le plaisir de l'exploration et ce sentiment de découverte d'un vrai morceau de l'histoire par ce que raconte ses murs et l'épuisement du trop/trop/trop : trop de grimpette, trop de gunfights DE MERDE, décors trop grands, trop longs à parcourir, et trop de bonnes idées transformées en purge parce qu'à un moment, il faut arrêter les effets de manche et se concentrer sur le plaisir du joueur. Pas sur une séance d'onanisme en cercle en se trouvant géniaux. Et ce trop, trop, trop aboutit à un ras-le-bol, qui tue progressivement la motivation et définitivement le rythme... au gré de la dégradation physique et morale de notre (génial) héros.
J'écrirai peut être un truc plus inspiré et structuré plus tard.
Une chose est sûre en tout cas, c'est le meilleur et le pire d'Uncharted, de The Last of Us et du jeu vidéo tout court à l'heure actuelle.
A découvrir tout de même parce que c'est un vrai jeu d'aventure qui permet d'en prendre plein la gueule dans tous le sens du terme mais aussi de comprendre ce qu'il y a de plus merdique dans le jeu vidéo. Un putain de paradoxe qui résume à la perfection cette génération totalement schizophrène de jeux amorcée quelques mois avant les premiers pas du fringant Nathan Drake.