Une histoire d'amour et de ténèbres |
Réalisé par Natalie Portman Avec Natalie Portman, Gilad Kahana, Amir Tessler
Long-métrage USA Genre : drame Durée : 01h35min Année de production : 2015 |
5/10 |
SynopsisLe destin d'un homme, notamment son éducation à Jérusalem durant la création de l'Etat d'Israël.
A Jérusalem, encore sous mandat britannique, le jeune Amoz Oz vit dans un kibboutz. Il y assiste aux premiers jours de la naissance de l'Etat d'Israël. Les relations qu'il entretient avec sa mère, Fania, sont particulières, à la fois privilégiées et de temps à autre tendues.
CritiqueD'après l'autobiographie d’Amos Oz, "Une histoire d'amour et de ténèbres" retrace la vie de l'auteur dans les années 40. Le jeune Amos est issu d'une famille d'immigrés : son père (Gilad Kahana) est un vrai rat de bibliothèque d'origine lituanienne et de l'autre Fania (Natalie Portman) est issue de la bourgeoisie Polonaise.
Cette famille rejetée de toutes parts arrive bientôt en Israël pour s'y établir dans une quête de bonheur et de stabilité.
Première réalisation de la célèbre actrice qui a eu du mal à bâtir ce projet qui lui tenait à cœur. Un best seller mêlant à la fois l'Histoire du peuple Israélien mais aussi les scènes intimes au sein de cette famille bouleversée qui souhaite à la fois respecter les traditions mais qui doit faire face aux mutations liées au contexte géopolitique.
Le résultat est en demi-teinte, on aurait pu s'attendre à un film très militant et une religion omni-présente mais les pratiques rituels juifs sont au final très peu présents, de même que les signes distinctifs, à l'image du livre c'est plus la philosophie ou la culture Juive qui est représentée sous tous ses angles.
Un film à éviter en cas de déprime, car il faut sérieusement s'accrocher pour adhérer au script, même si cette histoire est relatée à travers les yeux d'un enfant, le film laisse extrêmement peu de place à la fantaisie, à l'humour et la poésie qui y règne est difficilement abordable par le premier venu.
Certes, on se laissera porter par des séquences esthétiques (quelques unes inspirées par Malick selon Natalie), mais on sent que Portman a souhaiter rester dans l'esprit du recueil, les scènes oniriques sont donc rares.
L'atmosphère est d'une rare austérité, si bien que le spectateur n'attend qu'une seule chose, qu'un des membres de la famille ne prenne le taureau par les cornes et fasse voler en éclats ce quotidien d'une fadeur sans nom, mais il n'en sera rien.
Arieh le père souhaite élever son fils à son image, c'est à dire un intellectuel sans reproche et cultivé qui après tout est maladroit et obsédé par les mots. Dès son plus jeune age, au lieu d'apprendre la vraie vie à son fils, il lui bourre la tete de poèmes classiques, de références historiques ...
Le film nous dévoile que Arieh a toujours eu un physique malingre et a été raillé étant plus jeune et souhaite que son enfant ne soit pas la risée des autres et tente ainsi de lui inculquer des tours pour que celà ne se reproduise pas. Les scènes mettant en scène de façon sincère et complice leur relation sont rares et maladroites : le père qui peine à planter un petit poteau et à faire pousser ses légumes qui va au final acheter les plants faisant croire à son fils à sa réussite.
Amos est un gamin comme les autres, qui fait des bêtises très rapidement réprimés par ses parents, autant dire qu'il devient rapidement un enfant modèle qui s'auto-réprimande et se calque sur le modèle parental d'une droiture extrême mais perd toute son expression, sa fraîcheur et sa personnalité: un adulte dans un corps d'enfant.
Fania la mère est sous le joug total de son mari, lui obéit comme son fils au doigt et à l’œil même si Arieh n'exerce aucune violence physique ou psychologique sur elle.
Son train de vie gris, sans avenir joyeux rythmé par un éternel recommencement de misère infinie et de rares moments de complicité avec Amos. Natalie Portman a un rôle à l'écran tout aussi important que celui de son enfant. Hélas, Fania ne pourra plus supporter cette rudesse et va peu à peu dépérir sous les yeux de sa famille.
On a la voit à plusieurs reprises tenter de reprendre du poil de la bête, invitant sa famille à casser leurs habitudes, ce qui tourne rapidement au fiasco et la fait retomber de plus belle dans la noirceur la plus profonde.
Le fait d'avoir vu ainsi sa maman se laisser happer par le système va faire réagir Amos qui se rendra compte quelques années après qu'il n'est pas obligé de suivre les pas de son père et peut voler de ses propres ailes.
Fania est le personnage qui incarne les moments de vivacité et de fantaisie du film où l'amour parental est le plus palpable.
Un contraste saisissant entre le paradis palestinien rêve et la dure réalité empli de ruines et de pauvreté.
La mise en scène un peu trop léchée est en opposition par moment avec les images : filtre jaune sépia, ralentis, gros plans sur des parties du corps : un copié/collé permanent de styles visuellement agréables mais qui manquent de consistance stylistiques mis bout à bout.
Portman souhaite ne pas oublier le peuple Palestinien et leur consacre deux séquences pour que le film ne soit pas qu'une vision unilatérale du contexte historique d'après Guerre.
L'enfant-auteur censé être au cœur de l'histoire est plutôt passif et spectateur du déroulement narratif, il n'exprime jamais ses pensées, ne se rebelle jamais si bien qu'il devient un personnage secondaire et c'est Fania qui devient la pierre angulaire du récit.
Globalement, l’interaction émotionnelle entre les personnages qui sont tous en mode introspection n'aide pas du point de vue émotionnel avec un manque de spontanéité et de naturel évident. L'attachement à cette famille austère est difficile d'autant que l'évolution des personnages est lente et laborieuse, rythmé par les faits historiques plutôt que par les drames familiaux.
Malgré la bonne volonté employée par la réalisatrice dont l'histoire personnelle a des échos avec celle de la famille Oz, "Une histoire d'amour et de ténèbres" flirte avec une démonstration académique pesante, austère qui ne touchera que le public passionné par l'histoire du peuple israélien ou de la réalisatrice.
La séquence finale se détache du reste du film avec une note d'espoir de renouveau à la fois dans l'histoire mais aussi dans la mise en scène et permet de remettre du baume au cœur au spectateur.