Je n'ai pas vu grand chose en 2015. Vu la qualité plus que discutable de ce qui nous a été proposé, Sicario, en raison de ses thématiques et son approche, m'est apparu comme une bouffée d'oxygène salvatrice au milieu de ce marasme cinématographique. J'ai tout entendu à propos de ce film, mais toujours de manière subjective, ce qui ne me dérange pas plus que ça. Pour ma part, j'ai eu ce que j'étais venu chercher. Un shoot d'adrénaline caractérisé par sa relative avarice en matière d'action. Passés l'ouverture, la descente sur Juarez et le final, le fim de Denis Vileneuve se caractérise plutôt par son caractère bavard.
Qu'est-ce que ça raconte au fait? Une super fliquette du FBI (Emily Blunt) se retrouve parachutée presque malgré elle (elle choisit mais subit) dans un groupe d'intervention d'élite dont le seul but est d'endiguer le fléau que représente le trafic de stupéfiants. Par endiguer, il faut plutôt comprendre "garder la main-mise". C'est en ce sens que Sicario tient parfaitement la route d'un bout à l'autre. On reproche souvent la passivité du perso de Blunt, mais celle-ci n'est qu'un témoin du mal, totalement impuissante, mais pas naïve pour autant. Certains spectateurs souhaiteraient qu'elle foute un coup de pied dans cette fourmilière vérolée par le non respect de la loi, mais elle ne peut rien faire, seule une mort passée sous silence l'attendra au tournant.
Juaaaaaaaaa...reeeeeeeeeeezzzzzz, ton univers impitoyaaaaaa-ble!!!
Dans le rôle de la grande faucheuse et du mastermind/pied nickelé, Benicio Del Toro (glaçant) et Josh Brolin (personnage presque anachronique dans ce microcosme où les gueules patibulaires prédominent) sont impeccables. Ils n'étaient pas étrangers à l'aridité du polar en terre mexicaine puisque tout deux ont déjà mis les pieds dans un film (ou segment de film) à l'approche similaire (Traffic pour le premier et No Country for Old Men pour le second). A eux deux, ils véhiculent tout du long le leitmotiv principal du script. La fin justifie les moyens (illicites, en l’occurrence).
Un qualificatif qui convient à merveille à la mise en scène de Denis Villeneuve, volontairement tapageuse et nerveuse. Elle traduit en permanence le sentiment d'urgence et le degré très faible de moralité de l'histoire. Couplée à l'excellente BO de Johann Johannsson, on suffoque avec les personnages, on sait qu'on plonge dans un panier de crabes mais on veut en avoir le coeur net. A la photo, Deakins est égal à lui même et son travail sur Sicario rejoint ses innombrables réussites.
Contrairement à Prisoners, qui se cassait un peu la gueule en raison d'un cheminement trop prévisible et d'un usage excessif du pathos, Sicario se tient de bout en bout. Ne dérogeant qu'à de très rares occasions (mais quelles scènes joussives!!!!) à sa démarche anti-spectaculaire, il véhicule comme un parfum de cinéma du siècle dernier. Hormis une storyline avec un flic mexicain traitée avec des gros sabots (résurgence de Prisoners...), Sicario ne trahit pas les promesses que sa genèse avait laissé entrevoir.