[Olrik] Critiquorama 2016

Modérateur: Dunandan

[Olrik] Critiquorama 2016

Messagepar Olrik » Sam 02 Jan 2016, 15:32

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Soul Power : 8/10
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Soul Power - 8/10

Messagepar Olrik » Sam 02 Jan 2016, 15:32

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Soul Power

(Jeff Levy-Hinte – 2008)


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Quand on voit ce film, on se dit qu’un pays africain sans viols, sans esclavage, sans religieux hystériques ou encore sans kamikazes se faisant sauter sur un marché, ben, c’est quand même vachement sympa. Même moi qui ne suis pas plus que ça attiré par la culture africaine, impossible lors du visionnage de ne pas imaginer comme il aurait bien plaisant d’aller traîner mes guêtres en 1974 du côté de Kinshasa. Surtout lorsque en terme de capillarité masculine on y était assuré de ne pas rencontrer celle de barbus malodorants et agressifs mais celle, infiniment plus virile et distinguée, je veux bien sûr parler de…
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…la moustache de James Brown !


Nous sommes en 1974, le match Mohammed Ali / George Foreman va se disputer dans le stade de la capitale et, histoire de célébrer un peu plus ce match entre deux noirs américains revenus sur les terres de leurs ancêtres, un festival de musique afro-soul est organisé quelques semaines avant la confrontation : Zaïre 74’.

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Préparatifs, incidents qui viennent les ralentir, arrivée des artistes, rencontres avec les autochtones puis extraits de performances musicales, voilà la structure somme toute assez classique qui n’est pas sans rappeler celle de Woodstock (et pas seulement, ce genre de cocus musicaus étaient alors assez à la mode). Pour ressusciter ce concert de trois soirées, Jeff Levy-Hinte est allé farfouiller dans les kilomètres de bandes archivées à l’origine du film de Leon Gast sur la rencontre Ali/Foreman : When We Were Kings.

Le résultat est une petite capsule temporelle absolument délicieuse même si l’on se dit que le film aurait gagné à être beaucoup plus long. D’abord à cause des performances musicales, sympa mais laissant un goût d’inachevé. Voir Bill Withers et B.B. King jouer seulement un morceau est bien frustrant. On apprécie la furie instrumentale du morceau des Crusaders, mais parce qu’on l’apprécie, on se dit qu’il est un peu rageant de ne pas l’avoir eue dans son intégralité.

Je gage qu’on verra un jour ressortir Soul Power dans une version « extended » mais en attendant il faut se contenter de ces 90 minutes qui non seulement résume en une quarantaine des heures de concerts, mais aussi donnent un curieux aperçu de l’aspect « America meets Africa ». Apparemment, les artistes sont tous absolument ravis de se trouver au Zaïre. Et connaissant l’implication d’un James Brown pour la cause noire, on ne mettra pas en doute sa sincérité. Après, on peut se demander jusqu’où ce désir de communion est allé car quelques scènes mises à part, on ne peut pas vraiment dire que le film regorge de moments dans lesquels on voit les stars de la soul communiquer avec l’autochtone. Tout au plus une scène où les Sister Sledge dansent avec une zaïroise, une autre où Ali colle la bise à une gamine, et c’est à peu près tout. Après, il y a sans doute aussi un côté « lost in translation » puisque le Zaïre étant essentiellement francophone, difficile pour les Américains d’aller au-delà de la symbolique poignée de main. Mais il est curieux de voir combien ce langage universel qu’est la musique n’a pas donné lieu sur scène à une collaboration. Fait révélateur : la pauvre Miriam Makeba qui, en coulisse, constate un changement de programme et avoue bien humblement qu’elle ne va surtout pas protester pour ne pas apparaître comme celle qui va rompre l’harmonie de ce beau (et très coûteux) projet. On aurait pu imaginer les stars américaines dans leurs petits souliers à l’idée d’arriver en Afrique mais non, c’est l’inverse, comme si l’aspect gouffre à pognon de ce projet faramineux pour l’époque (aux trois soirées de concert il faut ajouter la somme astronomique pour l’organisation du combat Ali / Foreman) avait eu raison d’une communion sur scène. Les numéraux sont compartimentés, chacun fait son show et chacun repartira à la maison après avoir touché son joli cachet.

Bref on reste sur notre faim concernant la réception et sur ce qu’a pu être l’immersion des artistes américains sur leur terre d’origine. Et puis, il y a bien sûr Mobutu. Il est drôle de voir un Ali faire son numéro sur la liberté qu’il affirme ressentir à Kinshasa. Sorte de prototype du noir fier et arborant une farouche hostilité envers le blanc, il est en cela un double de Mobutu. Mais justement, qu’en pense-t-il de Mobutu ? Que pense-t-il du massacre d’étudiants en 1969 ? Plutôt que de l’entendre pérorer sur son bonheur d’être là, on aurait aimé entendre un journaliste lui poser ces questions, tout comme on aurait aimé connaître l’opinion de quelques habitants sur leur cher président. On ne saura jamais si dans les kilomètres de rushs de telles scènes ont été filmée. Le but est tout autre : célébrer l’homme noir et sa musique. Et en cela le film, malgré sa courte durée, est réussi, surtout lorsque déboule cet homme pour irradier la scène de son brio :



J’avoue, les jabs verbaux d’Ali m’ont un peu gavé mais les beignes que Brown assène à son micro m’ont beaucoup plus fasciné. Eructant, feulant, transpirant à grosses gouttes au fur et à mesure du concert, Brown, par son charisme, sa classe musicale mais aussi deux sorties très à propos glissés entre deux morceaux, donne moins l’impression qu’Ali d’être un pantin à la solde de Mobutu. Pas de déclaration hâtive sur le bonheur d’être là ou sur un sentiment de liberté qu’on a beau jeu de ressentir lorsqu’on débarque tout juste dans un pays. Juste une anecdote (à 2’52), celle assez fameuse qui explique qu’à la question d’un quidam demandant à Brown ce qui, dans sa carrière, constituait « le meilleur de James Brown », celui-ci répondit que le meilleur était à venir. Comme Ali, il y a bien sûr cette cohérence par rapport à un personnage haut en couleur et orgueilleux, mais aussi, peut-être, la volonté d’évoquer à travers lui un futur meilleur pour un peuple alors dans une décennie bien entamée par des déboires économiques.

Enfin, il y a ce mot de la fin (à 6’00), cette demande d’éteindre les lumières pour qu’il y ait « more black ». Simple, sobre, et claquant de la même manière que le « fuck » de Country Joe Mc Donald à Woodstock, la phrase brownienne est bien plus cool que le cataplasme verbal d’Ali, et conclut comme il se doit un film inégal mais vraiment fascinant.


8/10
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Cité de l'indicible peur (La) - 7/10

Messagepar Olrik » Sam 09 Jan 2016, 18:48

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La Grande Frousse (aka la Cité de l’indicible peur)
(Jean-Pierre Mocky – 1964)


L’inspecteur Triquet est sur les dents ! Mickey le bénédictin, un dangereux faussaire, vient de s’échapper de son exécution et semble avoir trouvé refuge dans le petit village de Barges (le bien nommé) en Auvergne. Menant l’enquête parmi de bien étranges villageois, Triquet ne dispose que de trois indices : l’homme qu’il recherche est un ivrogne, il est frileux et il n’aime pas le cassoulet…


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Avec un tel synopsis on aura du mal à croire que le film est l’adaptation d’un roman de Jean Ray avec Harry Dickson, la Cité de l’indicible Peur. Et on aura tout bonnement du mal à croire ce que l’on voit à l’écran tant Mocky cultive avec frénésie le n’importe quoi. Avec bonheur ou pas, c’est la question. Pour ma part j’ai écarquillé les yeux pendant dix minutes, me demandant si j’allais continuer ou pas puis… j’ai poursuivi avec un certain plaisir le déroulement de l’enquête foireuse de Triquet au milieu de ce village médiéval tout aussi foireux. Le genre de film que l’on aura du mal à placer dans la catégorie des nanars ou dans celle des petites comédies réussies. Qu’importe, si on aime les films à la Hammer, avec des ambiances nocturnes orageuses, d’odieux crimes et des craignos monsters…


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Bouh !


… et surtout si on aime les personnages croquignolets et les situations décalées, on est largement servi. Petit panorama de la faune qui hante la sinistre ville de Barges. Tout d’abord Chabriant (Raymond Rouleau), le maire en fourrure du village, affublé d’un horripilant sourire en bandoulière mais aussi d’un tic de langage que l’on ne met pas longtemps à détecter :

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Je suis le maire, quoi !

M. Franqui, joué par Francis Blanche, scrute de ses jumelles les passants tout en bavardant avec une réplique de Sainte Urodèle, celle qui d’après la légende est parvenu à tuer la bargeasque, immonde bête que certains prétendent avoir vue rôder dans la lande :

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Mais aussi le boucher (René-Louis Lafforgue), homme rude dont le terrible secret va laisser le spectateur dans la stupéfaction la plus époustouflifiante, ou encore la secrétaire du maire (Jouée par Véronique Nordey, alors l’épouse de Mocky) bien trop jolie pour être honnête, M. Gosseran (Jacques Duffilho) le jardinier farceur, M. Clabert (Victor Francen) le docteur alcoolique ou le brigadier Loupiac (Jean Poiret), lui aussi affublé d’un tic et qui va seconder comme il peut l’inspecteur Triquet dans son enquête :

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Et je passe sur le pharmacien, le bourreau décapité, le chef de gare et le contrôleur bègue. Avec une telle faune on peut se dire que le film a tout pour être parfaitement insupportable au bout d’un quart d’heure et pourtant, il faut bien reconnaître que Mocky, en plus de sa capacité à restituer une ambiance nocturne réussie, a su dégainer l’arme ultime pour donner du liant à l’ensemble : les dialogues, ici concoctés par Raymond Queneau. Incongruités, jeu sur les répétitions, sur les sons, on est dans du pur Queneau et c’est souvent du pur plaisir d’entendre ces dialogues ciselés à la virgule près être restitués par ces comédiens dans l’ensemble très bons. Tout cela sent bien sûr l’artifice mais c’est un artifice qui, coulé dans un univers en toc, finit par marquer voire enchanter l’esprit et peut faire comprendre pourquoi ce film, après avoir fait un bide à sa sortie, a été redécouvert en 1972 sous son véritable titre (la grande Frousse, « titre racoleur et crétin à destination des beaufs » dixit Mocky dans ses mémoires, ayant été imposé par les producteurs) avec cette fois-ci le statut plus flatteur de petite perle méconnue. Pour les spectateurs contemporains qui seraient des amateurs de Twin Peaks, la Grande Frousse a en tout cas sans doute tout pour les divertir.


7/10


+

– Les dialogues de Queneau
– Des personnages WTF parfaitement assumés par les acteurs.
– Un décor et une ambiance nocturne réussis.

-

– Clairement, le film a un aspect « trip » qui peut rebuter.
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Re: [Olrik] Critiquorama 2016

Messagepar pabelbaba » Sam 09 Jan 2016, 18:53

Casting de fou, film bancal... C'est un Mocky habituel. :mrgreen:
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Sinon, oui, j'aime les nibards. :chut:
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Re: [Olrik] Critiquorama 2016

Messagepar Olrik » Sam 09 Jan 2016, 19:03

Foutraque plutôt que bancal. Et cet aspect lui réussit assez bien je trouve.
Incontestablement le film le plus WTF que j'ai pu voir en cette fin d'année 2015.
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Re: [Olrik] Critiquorama 2016

Messagepar Alegas » Lun 20 Juin 2016, 11:31

Encore un membre perdu en cours de route ? :|

EDIT : Ah bah non, mais il ne poste plus qu'en partie musique. :(
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Re: [Olrik] Critiquorama 2016

Messagepar Val » Lun 20 Juin 2016, 11:41

Normal, on est pas chez Bouvard et Pécuchet ici !
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Re: [Olrik] Critiquorama 2016

Messagepar Olrik » Dim 26 Juin 2016, 19:25

@ Alegas : juste un peu chaud à la longue d'être sur trois sites en même temps. Quand j'aurai un bon stock d'articles d'avance sur le 2ème, j'en uploaderai quelques-uns.

@ Val : Complètement. Ni chez Homais ou M. Jourdain du reste.
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Re: [Olrik] Critiquorama 2016

Messagepar Mark Chopper » Dim 26 Juin 2016, 19:34

Si tu appâtes Alegas avec du Duvivier, il va te manger dans la main.
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Re: [Olrik] Critiquorama 2016

Messagepar Olrik » Dim 26 Juin 2016, 20:03

C'est vrai, je crois avoir lu de lui quelques critiques enthousiastes sur des films de Duvivier. Un honnête homme que cet Alegas (même si certaines critiques sur des Kurosawa m'ont un peu fait froncer les sourcils).
Toujours un plaisir de se replonger de temps à autre dans la filmo de Duvivier. Par contre je me sens incapable de me replonger dans ses Don Camillo, jamais pu blairer Fernandel.
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Re: [Olrik] Critiquorama 2016

Messagepar Alegas » Dim 26 Juin 2016, 20:05

Personne ne t'en voudra pour Fernandel. :mrgreen:
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Re: [Olrik] Critiquorama 2016

Messagepar Olrik » Dim 26 Juin 2016, 20:21

Je veux bien le croire. Un coup d’œil sur la base : nulle trace des Don Camillo, de la Cuisine au beurre ou de la Vache et le prisonnier, ce qui est une bonne chose, il y a des limites aux vieilleries surannées qui ont torturé d'ennui des générations de mômes devant le téléviseur familial.
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Re: [Olrik] Critiquorama 2016

Messagepar Val » Dim 26 Juin 2016, 20:39

Un jour, je réhabiliterai La Vache et le prisonnier (tout comme dans un autre genre, La Soupe aux Choux). :chut:
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Re: [Olrik] Critiquorama 2016

Messagepar logan » Dim 26 Juin 2016, 20:50

Après faut pas t'étonner qu'on oublie la moitié de ce que t'écris...
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Re: [Olrik] Critiquorama 2016

Messagepar Mark Chopper » Dim 26 Juin 2016, 20:55

:eheh:
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