Knight of Cups de Terrence Malick
La surprise de l’année
après un To The Wonder tournant complétement à vide avec des acteurs absent, Malick réussit à nouveau à me captiver avec ce Knight of Cup sur pratiquement toute la longueur. Il retrouve enfin un propos pertinent qui me touche et qui se marie parfaitement à la forme de son film qui n’est plus autant dans l’esbroufe esthétique, la recherche pur de beau plan pour le beau plan même si il y en a à la pelle mais dans un kaléidoscope d’image diverse et difforme, de séquences qui se répondent tout en se questionnant et tentant de donner un sens à sa vie.
Malick arrive à renouveler ici son cinéma par petites touches avec un aspect plus brut moins poseur alors oui on retrouve tous les tics formel de l’artiste, le style développé au cours des années avec Lubezki (le plus grand directeur photo avec Deakins), les contre plongé sur le ciel, la steadycam qui se rapproche de la nuque de ses acteurs et leur tourne autour en les filmant la plupart du temps de dos. Cette volonté de faire danser ses perso, les faire courir, naviguer dans l’espace pour donner du mouvement à son film.
Mais le fait de placer ses acteurs dans un décor urbain change tout, le film est un véritable documentaire sur Los Angeles et ses environs, la vallée de la mort, Las Vegas. Malick n’en fait pas une carte postale, il nous montre les vices de ses environs, le côté esbroufe clinquant, sale et impersonnel de cette ville. Une véritable vitrine factice, vide, un décor dans le décor comme ces passages dans les studios de cinéma. Perso moi ça m’a rappelé beaucoup de souvenirs, les mexicains qui se baignent tout habillé, les PIMP de Vegas, cette impression d’une ville gigantesque (super accéléré sur les routes véritable autoroute de cette ville), étalé mais profondément recluse et inégalitaire avec un centre-ville digne de pire coin du tiers monde.
Exemple tout simple de ce renouveau, il y a une micro scène de braquage, assez marrante ou les voleurs se plaignent que la baraque est vide, comme la vie de notre héros finalement, passage totalement inattendu dans le cinéma de Malick, c’est ce côté-là qui m’a plus, aborder des genres différents qui permettra à l’œuvre de Malick de tenir sur la durée, on a même une séquence film catastrophe au début.
Là le côté improvisation, film qui se cherche, son réalisateur qui tâtonne, véritable terrain d’expérimentation et d’improvisation trouve tout son sens dans un film qui suit un héros qui lui aussi se cherche, se pose des questions et tente de vivre au jour le jour, de résister et suivre ses pulsions. De vivre tout simplement.
Autre astuce qui permet d’éviter le naufrage de son précédent métrage désincarné, le principe même du film, celui d’un homme volage qui butine de femme en femme, de déesse en déesse, le film est rempli de femme toute plus belles les unes que les autres. Le tournage a dû être sympa comme le démontre un Antonio Banderas qui s’amuse comme un petit fou alors que Bale ne cesse d’errer tel un pèlerin, un chevalier en perdition. Oui soyons objectif l’acteur n’a pas grand-chose à jouer mais il reste profondément plus intéressant à regarder qu’un Ben Affleck perdu et inerte, ici durant 2/3 brève séquence on retrouve l’homme bon, impliqué et touchant comme on n’avait plus vu l’acteur depuis Le nouveau Monde/Prestige.
C’est un film sur la passion amoureuse, le désir. Une véritable ode à ses actrices, c’est ça l’attraction principale du film un casting féminin 5 étoile, c’est autre chose qu’une Olga Kurylenko fadasse, ici chaque nouvelle apparition féminine permet de relancer le film, d’esquisser une nouvelle relation différente de la précédente, du coup ce sont des scènes ou il y a de la vie et des actrices qui peuvent montrer leur sensibilité, leur talent.
Bien sur Cate Blanchette, Natalie Portman et Imogen Poots sont juste parfaite
, tellement qu’on voudrait les voir plus que le bref temps d’écran qu’elles ont finalement même Freido Pinto est ici intéressante dirigé par Malick mais la révélation du film est Teresa Palmer
qui semble être la plus à l’aise dans ce monde de débauche ou une femme est remplacé par la suivante. Enorme potentiel cette actrice, elle devrait exploser sous peu.
Attention même avec tous ces éloges, le métrage n’est pas dénué de défaut, Malick pourra difficilement retrouver la grâce de ses précédents travaux sans plus de travail en amont, ce procédé d’improvisation totale possède des limites qui se font sentir sur la toute fin, les 10/15 dernières minutes pour moi tourne à nouveau à vide et arrive presque à m’irriter.
Même si le fait d’avoir réussi à créer une cohérence dans cet amas d’image improvisé, pris sur le vif est un véritable tour de force, l’absence de récit structuré ou de monté tragique dans le récit fait que l’on ressent que Malick ne sait pas où il va finalement et qu’il n’a pas prévu sa fin, qu’il improvise en nous répétant des images et phrase du début et en laissant marcher son Christian Bale dans le vide… ça c’est le Malick que je redoute.
Le chapitrage comme la parabole sur la figure de Tarot est l’esbroufe narrative du film, un symptôme d’un film malade qui tente de dépeindre une certaine vacuité de la vie et de l’image factice que l’on essaye de renvoyer mais qui lui-même repose essentiellement sur son style plus que son fond improvisé. Là c’est le côté de Malick que je ne supporte plus qui lorsqu’il ne sait plus quoi raconter ne fait que ressasser ses fondamentaux qui moi me fatigue comme les quelques travelling avant, presque au ras du sol en steadycam sur une nature magnifique mais qui sont des décors qui n’ont rien avoir avec l’histoire ou les personnages.
La fin christique avec Armin en prêtre est encore plus lourd que Bardem dans To The Wonder ou les problèmes entre frères et Père n’ont pas convaincu encore moins Isabelle Lucas anorexique qui se baigne nu ou qui désigne des formes sur la plage. Cela donne plus envie de lui donner à manger, un bon repas, de la consistance. Voilà ce qu’il manque à ce cinéma en roue libre.
A côté de ça il y a aussi des tentatives formelles raté comme tous ces mini passages/plans en base résolution et Gopro qui me sorte totalement du film en délivrant des plans hideux d’autant plus projeté sur un grand écran au milieu de ce festival visuel qui ne recherche pas la facilité.
Un long métrage qui divague en voulant se perdre dans ces rêveries, à la fois étrange, terre à terre les yeux au ciel et prenant. Cherchant une élévation qui ne peut être atteinte. Bien que Malick se ramasse un peu sur sa fin, Ce Knight of Cups rend optimiste et redonne espoir dans son cinéma
car il a retrouvé une certaine vitalité et sensualité qui rend confiant pour son prochain film qui cette fois possède un scénario et a un casting 5 étoile encore plus attrayant
. En espérant que Malick se pose plus sur ces prochain films, laisse tombé le côté fragmenté, éparpillé qui tente tant bien que mal de créer un lien pour cette fois narrer une véritable histoire pensé en amont qui laisse ses personnages vivre plus longtemps à l’écran.
8.5/10