« Your butt looks awesome »
Vanité des vanités, tout est vanité. Plongée dans la jeunesse oisive en manque de sensations fortes, The Bling Ring ne nous épargne rien de tout ce qui peut creuser le fossé entre cet âge et celui des adultes. Vocabulaire, invariabilité des occupations (fêtes, coke, fringues, portables) et pauvreté absolue des conversations.
Il est intéressant de comparer ce portait à celui fait par Korine dans Springbreakers : l’idée de départ est assez similaire, si ce n’est que la classe sociale varie un peu. Chez Sofia, la fille de, ce sont des riches qui vont voler aux indécemment riches. Chez Korine, on déclasse, mais surtout, on esthétise et l’on tente un lyrisme fasciné qui se plante dans les grandes largeurs.
Ici, tout est étrangement facile : les clés sont sous le paillasson, les Porsche sont ouvertes, internet donne toutes les adresses, et les villas des stars recèlent des coffres ouverts, des boites qui se succèdent, et dans lesquelles on trouve toujours mieux : rolex, cash, coke, flingue. Pas de drame, pas de conséquence, même lorsqu’on joue avec le flingue en question ou qu’on se prend une voiture à un carrefour, si ce n’est des travaux d’intérêt généraux à faire la journée avant de retourner faire la fête le soir.
Le regard est froid et clinique, sans interventions, souvent en plan fixe, à l’image d’une des belles séquences de cambriolage d’une villa entièrement vitrée vue du haut de la colline où nous suivons les déplacements des jeunes dans le silence de la nuit californienne.
Ce regard sur le groupe est une des composantes intéressantes du film : accrocs au selfies, filmés par les caméras de surveillance, puis par les médias qui prennent tout naturellement le relais, les personnages persistent à ne rien dire, à ne rien affirmer. Pire, plus ils sont exposés, plus les éléments de langage prennent le dessus par rapport au fond, ironie suprême lorsqu’ils évoquent les leçons, l’accomplissement personnel et le don aux autres par les associations caritatives. Au bout de la chaîne, le regard de Sofia Coppola qui se contente de livrer, sans l’écraser d’aucune démonstration didactique, ce monde froid et anxiogène.
The Bling Ring est un étrange petit film, tout entier à hauteur de son sujet, et qui se condamne à la même destinée que lui : regard éphémère bien que pertinent sur une mode fugace, il s’oubliera bien vite.