On demande souvent ce que doit être une grande œuvre artistique. A cette question, difficile de répondre. Toutefois, on pourrait s'accorder à dire qu'une œuvre réussie est avant tout le témoignage d'une façon de voir le monde, en fonction de son époque, de son origine, de ses croyances. Un témoignage par la fiction de la réalité d'une époque, de ses préoccupations, de ses peurs, de ses doutes. Au delà d'une simple énième histoire de gangsters mafieux, Les Soprano est surtout l'oeuvre qui répond le mieux à la question de savoir ce que signifie être un homme en Occident en cette fin de XX ème siècle et de début de XXI ème.
A travers cette galerie de personnages neurasthéniques, c'est toute notre société qui nous est montrée du doigt dans ce qu'elle peut avoir de pire. Obsédés par l'image et l'apparence, les personnages des Soprano fantasment un héritage bien lointain (on apprend dans la seconde saison qu'ils n'ont jamais mis les pieds dans l'Italie dont ils se réclament tant) et se rêvent pris au sein d'une mythologie reconstituée à partir de toute l'imagerie que le cinéma et la télévision ont pu donner des gangsters. Mais leur réalité est plutôt l'ennui, le décalage entre les rêves et la réalité de la vie et la difficulté à assumer les conséquences de leurs actes.
Débutant par la décision de Tony Soprano, capo de la famille DiMeo, une famille mafieuse du New Jersey, appelé rapidement à en prendre la tête, de commencer une thérapie suite à des crises d'angoisses, la série va suivre ce personnage et son entourage durant huit ans au cours desquels il devra composer avec les trahisons, les menaces du FBI et des autres familles, les querelles internes, les espoirs déçus des uns et des autres et les exigences de sa famille « naturelle ». L'argument de la thérapie se révèle vite moins un gimmick qu'une occasion de prendre du recul sur les événements dépeints avec leur principal protagoniste. Mais, et c'est là tout le talent de David Chase, au fur et à mesure que Tony en apprend plus sur lui, nous en apprenons également plus sur nous même. Car, au final, les problèmes rencontrés par Tony, les questions qu'ils se posent, sont les mêmes que ceux que nous rencontrons quotidiennement. Seul le cadre où ces questions interviennent diffère.
A travers cette galerie de personnages neurasthéniques, c'est toute notre société qui nous est montrée du doigt dans ce qu'elle peut avoir de pire. Obsédés par l'image et l'apparence, les personnages des Soprano fantasment un héritage bien lointain (on apprend dans la seconde saison qu'ils n'ont jamais mis les pieds dans l'Italie dont ils se réclament tant) et se rêvent pris au sein d'une mythologie reconstituée à partir de toute l'imagerie que le cinéma et la télévision ont pu donner des gangsters. Mais leur réalité est plutôt l'ennui, le décalage entre les rêves et la réalité de la vie et la difficulté à assumer les conséquences de leurs actes.
Débutant par la décision de Tony Soprano, capo de la famille DiMeo, une famille mafieuse du New Jersey, appelé rapidement à en prendre la tête, de commencer une thérapie suite à des crises d'angoisses, la série va suivre ce personnage et son entourage durant huit ans au cours desquels il devra composer avec les trahisons, les menaces du FBI et des autres familles, les querelles internes, les espoirs déçus des uns et des autres et les exigences de sa famille « naturelle ». L'argument de la thérapie se révèle vite moins un gimmick qu'une occasion de prendre du recul sur les événements dépeints avec leur principal protagoniste. Mais, et c'est là tout le talent de David Chase, au fur et à mesure que Tony en apprend plus sur lui, nous en apprenons également plus sur nous même. Car, au final, les problèmes rencontrés par Tony, les questions qu'ils se posent, sont les mêmes que ceux que nous rencontrons quotidiennement. Seul le cadre où ces questions interviennent diffère.
Le choix du monde mafieux est plus que judicieux (au départ, le personnage principal devait être un scénariste de télévision) puisqu'il permet déjà à la série d'être extrêmement divertissante avec son lot de coups bas et de rebondissements mais il permet aussi de questionner les fondements de nos sociétés. Quel univers peut le mieux décrire le poids des traditions qu'un monde aussi réactionnaire et hypocrite que celui-là ? Quel univers est autant empli de fantasmes et de rêves que celui-ci ?
Impossible de ne pas se reconnaître ou de ne pas reconnaître quelques connaissances dans cette galerie haute en couleurs de bras cassés faisant appel à leurs plus bas instincts. Il y a Tony, un salopard de la pire espèce qui parvient à nous mettre dans sa poche dès le premier épisode car ces défauts sont sans doute aussi les nôtres dans une moindre mesure. Il y a aussi Paulie l'oncle bizarre, pingre et fou furieux capable de se remonter tout seul contre n'importe quelle supposée injustice dont il s'estime victime, Christopher le chien fou pris dans une relation amour-haine avec son oncle Tony, qui rêve de se sortir de ce milieu en devenant scénariste mais qui ne parvient pas à renier son milieu d'origine, Silvio le consigliere doux manipulateur qui démontre une véritable humanité vis à vis des stripteaseuses qu'il emploie dans son club,... et tellement d'autres, tous extraordinairement écrit, même ceux qui ne feront qu'une courte apparition, et magnifiquement interprété.
Impossible de ne pas se reconnaître ou de ne pas reconnaître quelques connaissances dans cette galerie haute en couleurs de bras cassés faisant appel à leurs plus bas instincts. Il y a Tony, un salopard de la pire espèce qui parvient à nous mettre dans sa poche dès le premier épisode car ces défauts sont sans doute aussi les nôtres dans une moindre mesure. Il y a aussi Paulie l'oncle bizarre, pingre et fou furieux capable de se remonter tout seul contre n'importe quelle supposée injustice dont il s'estime victime, Christopher le chien fou pris dans une relation amour-haine avec son oncle Tony, qui rêve de se sortir de ce milieu en devenant scénariste mais qui ne parvient pas à renier son milieu d'origine, Silvio le consigliere doux manipulateur qui démontre une véritable humanité vis à vis des stripteaseuses qu'il emploie dans son club,... et tellement d'autres, tous extraordinairement écrit, même ceux qui ne feront qu'une courte apparition, et magnifiquement interprété.
David Chase a su s'entourer d'une excellente équipe de scénaristes et de réalisateurs qui offrent à la série un cachet visuel largement au dessus de la masse des séries télé. Ne reculant devant rien, la série s'offre le luxe de traiter tout les sujets des plus légers aux plus graves et plus tabous (on y parle de dépression, du suicide, du remord de ne pas avoir été là au bon moment pour certaines personnes, de la difficulté de concilier les traditions, la famille et sa propre vie, de l'infanticide, de la difficulté d'exprimer ce que l'on ressent aux siens,...). Le nombre de scènes poignantes est légion et beaucoup d'images restent en tête après le visionnage de la série, que cela soit grâce à la mise en scène, au jeu des acteurs ou aux thématiques soulevées.
Prenant son temps, capable d'adopter un rythme lancinant pendant plusieurs épisodes pour ensuite devenir plus nerveux avant de se recalmer, Les Soprano trace son petit bout de chemin en faisant confiance à son spectateur et à sa mémoire pour construire une œuvre extrêmement cohérente d'une année sur l'autre, des petits détails apparus dans un épisode pouvant ressurgir à n'importe quel moment deux saisons plus tard pour devenir un élément central de l'intrigue. Pour preuve, il est presque impossible de se rappeler à quel moment apparaît tel ou tel personnage pour la première fois, tant l'ensemble semble couler de source et être finement pensé.
Magistrale, exigeante et profondément adulte dans son traitement et dans ses objectifs, Les Soprano a clairement révolutionné la télévision en lui donnant ses lettres de noblesses et en inventant une nouvelle écriture. Enfin, impossible de pas évoquer le génialissime générique d'ouverture, plein de sens, et la partie musicale où le mélomane David Chase sélectionne brillamment des morceaux de toutes les époques, sous les conseils avisés de Steven Van Zandt, et l'influence de l'utilisation de la musique par Kubrick.
Prenant son temps, capable d'adopter un rythme lancinant pendant plusieurs épisodes pour ensuite devenir plus nerveux avant de se recalmer, Les Soprano trace son petit bout de chemin en faisant confiance à son spectateur et à sa mémoire pour construire une œuvre extrêmement cohérente d'une année sur l'autre, des petits détails apparus dans un épisode pouvant ressurgir à n'importe quel moment deux saisons plus tard pour devenir un élément central de l'intrigue. Pour preuve, il est presque impossible de se rappeler à quel moment apparaît tel ou tel personnage pour la première fois, tant l'ensemble semble couler de source et être finement pensé.
Magistrale, exigeante et profondément adulte dans son traitement et dans ses objectifs, Les Soprano a clairement révolutionné la télévision en lui donnant ses lettres de noblesses et en inventant une nouvelle écriture. Enfin, impossible de pas évoquer le génialissime générique d'ouverture, plein de sens, et la partie musicale où le mélomane David Chase sélectionne brillamment des morceaux de toutes les époques, sous les conseils avisés de Steven Van Zandt, et l'influence de l'utilisation de la musique par Kubrick.