Faire une suite a un film qui n'en appelle pas forcément une est toujours un défi en soi, Aliens éclot assez tardivement après l'opus original, entre-temps la donne du cinéma populaire a changé et le jeune Cameron l'a bien compris. Pas question de refaire un copier-coller du film de Scott, non monsieur a de l'ambition, après un
Terminator tourné a l'huile de coude, il passe enfin dans la catégorie "série A" lui permettant d'accoucher d'un authentique divertissement bigger and louder selon la logique hollywoodienne, de plus, on est au milieu des eighties, le temps n'est pas aux discussions entre scientifiques dans des bureux, le Mal on va le traquer comme des hommes et a coups de bastos s'il le faut ! Pourtant, le scénario parvient a se raccorder assez bien au
Huitième Passager, en oubliant pas de faire rappeler les événements anterieurs (ainsi qu'en développant ce qui touche a la Compagnie Weyland via le perso de Paul Reiser) et de montrer Ripley comme une survivante aguerrie connaissant déjà l'ennemi, ceci dit avec le recul il est difficile de ne pas y voir un "Prisoners of War" (un sous-genre popularisé par les saga
Rambo ou
Portés Disparus notamment, d'autant que Cameron fut le co-scénariste de
Rambo 2 ce qui renforce l'évidence de la filiation) déguisé en film de SF où les marines reviennent sur un terrain qu'ils n'ont pas réussi a conquérir, la différence étant qu'
Aliens se veut plus "réaliste" dans son ensemble, d'ailleurs je l'ai toujours considéré comme l'une des influences majeures du monument cynique qu'est
Starship Troopers.
En effet, si les Marines paraissent au départ suffisamment badass et cools pour qu'on se dise que l'affaire est dans la poche, l'arrivée sur LV-421 va remettre les choses en perspective : la technologie et les armes ne sont rien si on ne connait pas le terrain, ni même l'ennemi qu'on est censé affronter. Par là,
Aliens est plutôt courageux dans sa manière de représenter un conflit armé en plein Reaganisme triomphant, puisque qu'on comprend assez rapidement l'allégorie "post-Vietnam" (il suffit juste de voir les tenues des soldats, plus leur armement qui est composé des mêmes composantes que les factions armées de l'époque avec le trio fusil d'assaut/fusil d'artilleur plus lourd porté par Vasquez et Drake/lance-flamme), de plus la mise en scène qui procure par moments le même sentiment de peur que dans le film précédent, notamment dans l'excellente séquence (repompée grossièrement dans le nullissime
Rec 2) du traquenard observé quasi-intégralement du point de vue des caméras embarqués de chaque soldat observé de manière impuissante par les seuls personnages non-entrainés (en qualité vidéo a basse définition, autant dire que l'effet chaotique en est décuplé), l'horreur venant justement du fait qu'on ne comprend jamais vraiment ce qu'il se passe. La seconde moitié se veut plus réfléchie, les bourrins devront agir en groupe et de manière intelligente s'ils veulent s'en sortir, là encore Cameron ne met jamais en sourdine sa volonté de proposer un spectacle généreux puis qu'il ne cessera de montrer toujours plus d'Aliens et de Facehuggers a exploser, tout en explorant un thème interessant, lui-même lié a une des figures de proue : Ripley a tout de la femme forte cameronienne, mais va surtout développer un instinct maternel plutôt logique dès qu'elle découvre la seule survivante de la colonie (d'ailleurs, il est bien dommage que la scène vraiment importante de la version longue où elle apprend la mort de sa fille biologique pendant son hypersommeil n'ait pas été gardée pour le montage ciné), plus le film avance et plus cette obsession de la famille recomposée prend forme où le groupe va se rétrécir de plus en plus, jusqu’à garder la figure de Hicks comme un père de substitution (on pourra aller plus loin en disant que Bishop pourrait faire le tonton mais bon je pense que j'extrapole en disant ça

). Avec cette lecture-là, le climax final prend une dimension différente, si on omet les nombreuses incohérences pour rajouter toujours plus d'action (mais bon il y a un Mecha donc c'est pardonné), c'est clairement le combat entre deux mères (la Reine Mère, certainement l'ajout le plus évident de la patte Cameron

) qui se battent pour défendre leur progéniture jusqu'au bout, là encore Cameron arrive parfaitement prendre le meilleur de son époque tout en contournant certaines contraintes qui pourraient faire mousser certains journaleux bobos (oui, je parle a toi qui crache sur
Rocky 4 ou
Invasion USA).
Aliens est donc l'opus fun et guerrier de la saga même s'il n'égale pas son ainé, a cause de fautes de goût parfois gênantes, déjà de ne pas avoir pas retravaillé avec Giger, ce qui donne aux Aliens un design assez différent sans la moindre explication (même si Winston bon faut pas déconner, ça reste un cador), ainsi qu'un montage qui aurait gagné a être revu entre le trop plein de séquences de la version longue et des informations qui nous échappent dans la version salles, il y aurait moyen de pondre un petit director's cut.
8/10