Mad Max 2 - George Miller (1982)
Nanti d'un succès commercial considérable avec
Mad Max, il était évident que George Miller n'allait pas en rester là avec cet univers et ce personnage, il profite dès lors du soutien financier des américains pour monter une suite pensée à la fois comme "bigger and louder" mais également comme un prolongement évident de la psyché de son héros, tel
Josey Wales, après l’expérience traumatisante du premier film Max a perdu son humanité et erre désormais comme un fantôme sur les routes d'un monde qui a totalement sombré a tous les niveaux, au point d'être littéralement présenté comme une légende (voix-off a l'appui), chose qui va changer la donne et l'allure du récit : exit l'écriture repliée, ainsi que la suggestion et place a quelque chose d'ouvertement archétypal, reprenant dans les grandes lignes le meilleur du western américain (on pense surtout a Howard Hawks,
Rio Bravo et les films de convoi en tête) et italien (Max qui est un pistolero cynique que n'aurait pas renié Sergio Leone et l'idée du pétrole qui remplace l'Or comme nerf de la guerre). Un choix payant tant Miller nous offre une relecture moderne passionnante d'un genre alors en pleine agonie et qui ne trouvera plus vraiment de films capable de l'égaler en termes d'imagerie pure, il faut dire que derrière on va se surtout se taper des contrefaçons italiennes et philippines de bas étage signées Enzo Castellari ou Cirio Santiago qui vont hélas ternir le filon au point de lui donner une aura ringarde.
Malgré un budget démultiplié, Mad Max 2 reste encore un film très dépouillé en termes de décorum (le film est quasi-intégralement tourné a ciel ouvert) mais à l'image de ce qu'il raconte, ce n'est pas parce que l'on nous montre pas tout, que cet univers n'existe pas et mise tout sur sa simplicité narrative pour accrocher le spectateur (je pense que c'est pour cette raison que cet opus reste le préféré du public, même des non-fans de la saga), ceci dit Miller se lâche complètement sur la mise en scène en réutilisant les mêmes ficelles (l'alternance gros plans serrés/plans d'ensemble vertigineux ou les accélérés pendant les poursuites) mais en ajoutant certaines nouveautés comme un aspect quasi-chorégraphique des courses poursuites lors du final avec une gestion hallucinante de l'espace et du mouvement (c'est encore plus impressionnant de voir qu'il a fait ça avec une dizaine de véhicules en même temps, chapeau) aidé par des plans d'hélicoptères qui donne une ampleur supplémentaire a l'action. Autre atout de choix, le film se permet de révéler l'un des chefs opérateurs les plus talentueux de ces trente dernières années, Dean Semler alors inconnu et qui va dévouer une bonne partie de sa carrière au genre western en allant aux States, comme quoi Miller sait choisir ses collaborateurs avec soin dans une industrie pas complètement installée.
Loin de n'être qu'un simple film de technicien, Mad Max 2 me touche particulièrement car malgré son univers désespéré, il apporte une lueur d'espoir salvatrice (dont le tardif Fury Road sera la conclusion évidente, après un Mad Max 3 raté), nous montrant que le chaos ne peut pas rester éternel (l'idée du retour à la civilisation se dessine petit à petit) et que Max devra un jour ou l'autre accepter son sort de libérateur pour enfin redevenir un homme. Je pense notamment tout ce qui touche a sa relation avec le petit gamin pourrait n'être qu'un prétexte pourtant j'ai trouvé ça traité avec crédibilité, par de simples regards, on voit la carapace de Max se fendre légèrement, nous rappelant qu'il n'y a pas si longtemps il était encore un être humain.
Je pourrais parler encore longtemps du film, mais vous l'aurez compris, je salue une fois encore l'incroyable cohérence de cette saga et le fait qu'elle ait marqué mon imaginaire de cinéphile n'est certainement pas étrangère a mon ressenti.
"My life fades. The vision dims. All that remains are memories. I remember a time of chaos... ruined dreams... this wasted land. But most of all, I remember The Road Warrior. The man we called "Max." 9/10