Mad Max - George Miller (1979)
Avec l'annonce de la sortie de Fury Road, il est devenu de bon ton de cracher sur le premier opus de Mad Max, assailli par le doute, j'ai revu ce film majeur de la nouvelle vague fantastique du cinéma Australien et à ma grande surprise je constate que non seulement le film n'a pas vieilli, mais qu'en plus les défauts qu'on lui impute (bad guys mauvais et décors dépouillés surtout) sont finalement inhérents a chaque épisode de la saga, où l’intérêt se situe ailleurs, essentiellement dans la vision d'un monde qui littéralement sombré dans le chaos à l'image de son personnage principal qui emprunte autant aux récits d'anticipation qu'au western. Mais là où je pense qu'il y a une vraie méprise sur le film, c'est bien sur ses partis pris qui en font un film à mon sens valant plus qu'une "simple" série B, à la base, il faut revenir à la genèse du film qui est importante : avant de devenir réalisateur, George Miller bossa de nombreuses années comme infirmier, un moment de sa vie qu'il considérera comme son plus traumatisant a force de côtoyer les accidentés de la route et de voir de ses propres yeux les conséquences réelles de la violence, dès lors il va s'inspirer de son vécu pour écrire Mad Max, qui comme par hasard est l'histoire d'un flic qui veut raccrocher parce qu'il en a marre de côtoyer des malades qui risquent leur vie et la sienne a chaque instant.
Ce qui est particulièrement interessant dans le film, ce n'est pas l'ampleur de l'univers d'anticipation mais davantage la peinture d'un monde qui est encore dans l'entre-deux, si on peut parler de film post-apocalyptique pour Mad Max 2, alors Mad Max serait lui un film de pré-apocalypse où l'humanité a de rares exceptions près a littéralement basculé dans la folie totale, où même la police n'honore plus son rôle et se contente de jouer le même jeu que les loubards (la course-poursuite introductive est déjà une belle mise en bouche de cet aspect où les flics semblent presque prendre la chose avec amusement). Max devenant dès lors notre repère moral, coincé entre son professionnalisme (la façon dont il est iconisé au début montre un caractère méthodique et posé que n'ont pas ses collègues) et sa famille, qui intervient systématiquement après chaque moment "fort" histoire d'apporter un répit, d'abord après la finalité tragique de la première course-poursuite, puis, surtout l'efficace hors-champ de Max qui découvre son collègue mutilé pour citer un exemple concret. La fameuse menace guidée par Toecutter et ses bikers n'est au final qu'un moyen abstrait pour traiter a fond la thématique posée par Miller, qu'on a certes vu dans d'autres films, mais rarement avec autant de cohérence : celle de la folie qui contamine les hommes, à l'image de ce final superbe où Max devient la machine a tuer qu’espérait de lui son supérieur, ce "héros" qui a perdu toute conscience humaine.
Parlons du point qu'en général que l'on retient le plus et qui mettra tout le monde d'accord, la qualité des courses-poursuites, qui restent 35 ans après la sortie du film encore de sacrés morceaux de bravoure tant par leur dynamisme (bien qu'on gaule parfois un recours aux plans accélérés mais ça passe en général car le montage est remarquable de nervosité fluide) que par leur réalisme, du point de vue de l'impact réel des accidents qui ne sont jamais vus comme des moments spectaculaires mais bien comme des passages éprouvants (tout le contraire de
Mad Max 2 où Miller n'insiste plus autant sur les conséquences), où l'on ressent la violence des collisions ou bien alors les séquelles physiques irréversibles (je pense au flic qui se fait lacérer la gorge pendant la première course-poursuite et qui est condamné a utiliser un boitier vocal pour s'exprimer). Rien que pour ça,
Mad Max a sa raison d'exister, contrairement à certaines personnes je ne vois pas en quoi on devrait garder que le deuxième film, les deux films se valent par leurs approches et leurs propos différents tout en formant un diptyque cohérent sur un homme passant de l'humanité au cynisme le plus complet.
Alors traitez moi d'aveugle ou de fanboy, lâchez vous, j'ai dit ce que j'avais a dire pour la défense de ce film qui le mérite VRAIMENT.
"They say people don't believe in heroes anymore, well damn them! You and me Max, we're gonna give 'em back their heroes!" 9/10