[Dunandan] Mes critiques en 2015

[Dunandan]

La vengeance de Monte Cristo, Kevin Reynolds (2002)

Kevin Reynolds est un réalisateur que j'affectionne particulièrement, l'un des derniers bons faiseurs de films d'aventures à l'ancienne. Et là, il a entre les mains du caviar dans le genre, avec son lot de trahison, de romance, et de vengeance, qu'il adapte avec la fameuse règle en trois actes. On a certes parfois l'impression que ça avance un peu trop vite en besogne, mais on n'a du coup jamais le temps de s'ennuyer, d'autant plus que le rythme va crescendo. J'ai une notable préférence pour le passage de la prison qui met un coup d'honneur à l'évolution d'Edmond Dantes, qui du jeune naïf emprisonné en toute innocence, devient un homme pleinement formé et préparé, ce qui aura toute son importance considérant ses plans machiavéliques de vengeance.

Qui dit réalisation des années 90, dit décors en dur, et ça fait toujours plaisir de retrouver de l'authenticité là où la moitié des plans se ferait en CGI de nos jours. Si la réalisation se fait dans un premier temps peu démonstrative, Reynolds nous en met ensuite plein les yeux lorsque Edmond devient Comte, avec de magnifiques intérieurs de palais et de fastueuses fêtes, des plans qui usent de jolis jeux de lumière, et des affrontements à l'épée qui se font un peu plus présents. L'émotion répond aussi présente via certaines séquences désormais classiques dans le genre (l'amour éternel contrarié par des évènements malheureux, ou encore le Comte qui joue brièvement à être père et vole ainsi la place de son adversaire dans sa propre famille), même si encore une fois, le rythme est certainement trop rapide dans son ensemble.

Ainsi, le plus gros soucis du film, ce sont ses raccourcis narratifs qui nuisent à la caractérisation de certains personnages, et c'est le duo fraternel, pourtant élément central du récit, qui en souffre le plus, pas vraiment nuancé et même un peu manichéen dans la forme, alors que la lutte de classes qu'il représente est très intéressant à suivre. Malgré tout, l'histoire ne manque pas de souffle avec des dialogues qui font souvent mouche, et le casting, d'implication, en dépit de personnages auxquels il manquerait une ou deux lignes d'écriture pour gagner en profondeur. Mais bon, en ces temps de disette, on ne va pas faire la fine bouche, d'autant que je n'ai pas vu mieux dans le genre depuis le Zorro de Martin Campbell (le premier, bien sûr), les cascades à califourchon et les explosions en moins.

Note : 7.5/10

[Dunandan]

L'aventure de Madame Muir : 8.5/10

Il passe bien le cap de la seconde vision, et l'image du BR est juste magnifique

[Dunandan]

Pas vraiment envie de faire de critique pour ces films là... :


- The Other woman, Don Roos (2009) : 5/10

Un film très réaliste sur le deuil (de ce côté là, pas de soucis) post-natal d'un bébé, qui aborde aussi le problème de la famille recomposée. Mais ça reste globalement anecdotique d'un point de vue cinématographique, on dirait ces nouveaux romans pour femmes avec donc de la psychologie et de la dramatisation à outrance (surtout vers la fin). Cependant, la conclusion est assez touchante.


- Docteur Patch, Tom Shadyac (1998) : 6.5/10

Un film basé sur le véritable Dr Patch, Robin Williams était un choix évident pour interpréter ce rôle de clown - médecin pour les malades. J'aime bien la première partie qui porte sur cette fameuse thérapie du rire (parfois drôle et surtout touchante), moins celle du procès contre l'institution des médecins (jugés trop scientifiques et pas assez humains). Rien contre cette idée là (elle est même nécessaire), mais c'est loin d'être subtil dans le traitement.

[Dunandan]

Psychose, Alfred Hitchcock (1960)

Même en connaissant le fameux twist final, quelle leçon de mise en scène nous livre ici Hitchocok (ce sens du cadre et du hors-champ, c'est de l'art). La première partie, jouant la carte de la parano à donf (jusqu'à en faire son perso principal), moins connue et mise en avant par les connaisseurs, m'épate encore plus que la première. C'était en effet vraiment couillu de Hitchcock de brouiller ainsi les pistes, passant du film d'arnaque au huis-clos, livrant alors un déroulement qui n'a rien de linéaire (on change quand même deux fois de personnages clé avant de s'intéresser au tueur). C'est comme s'il nous livrait deux films en un (voire trois avec son orientation psychanalytique), le tout formant une cohérence à toute épreuve à travers son ambiance travaillée et sa gestion du suspens. Le genre du thriller psychologique continue aujourd'hui (à raison) à porter sa marque et pourrait encore en tirer des leçons, ne serait-ce que dans son écriture ingénieuse. Mais son charme est ailleurs selon moi, à chercher entre ses influences classiques (un véritable abcdaire du film noir avec sa voix off et son petit côté femme fatale) et ce qu'on pourrait classer comme avant-gardiste dans son approche horrifique (presque du giallo avant l'heure dixit la célèbre scène de la douche). Un classique au statut culte mérité, qui continue à me fasciner vision après vision.

Note : 8.5/10

[Dunandan]

Blind Woman's Curse, Teruo Ishii (1970)

Blind Woman's Curse est un chambara qui détonne dans un genre dominé par la gente masculine. On y retrouve une Meiko Kaji au regard froid et impitoyable que requiert son statut de boss de clan, opposée à une mystérieuse tueuse aveugle que rien ne semble arrêter. Mais cette proposition atypique ne s'arrête pas à cette ré-distribution des rôles femmes/hommes, avec des choix formels et une esthétique cohérents par rapport à cette approche qui tendent parfois vers le fantastique, voire le Bis, offrant ainsi une liberté de ton surprenante au sein d'un cavenas somme toute classique (surprise : une énième histoire de vengeance et de guerre territoriale interclanique).

Mais si les personnalités qu'on y côtoie, souvent fortement colorées (épique le boss qui se balade en slip à qui on reproche sa puanteur), ne manquent pas de panache, on perd parfois un peu le fil d'une intrigue qui part un peu dans tous les sens, pourtant simple au fond, comme si Teruo Ishii avait parfois de la difficulté à jongler entre ses prises de liberté formelles et thématiques, et délivrer une histoire au déroulement fluide. Dommage aussi que le traitement des tatouages, pourtant central, ne requiert pas plus d'attention de sa part (on retient quand même cette superbe séquence où leurs détenteurs forment un corps de dragon avec leur dos). Sinon ça livre bien la marchandise (mais il ne faut pas s'attendre à un Baby Cart féminin), et la fin est particulièrement magnifique (malgré l'effet cheap du chat), nous suggérant que ce monde n'est peut-être pas fait pour ces femmes, aussi puissantes et dévastatrices soient-elles à l'arme blanche.

En bref, même si je préfère largement Lady Snowblood avec la même Meiko Kaji, l'approche de Blind Woman's Curse, avec ses accents fantasmagoriques mais aussi ses petites touches de mauvais goût qui ne sont pas là que pour régaler le déviant mais aussi pour dénoncer le sexisme à l'oeuvre, ne manque pas d'intérêt.

Note : 7/10

[Dunandan]

7 hommes à abattre, Budd Boetticher (1956)

Mon premier Boetticher, et le moins qu'on puisse dire, c'est carré et efficace. On sait assez vite à quoi s'attendre. Randolph incarne un dur à cuir (à ce titre, l'introduction dénote, comme le reste, un véritable effort de construction avec cet affrontement sec et brutal, en faisant de lui une menace ambulante pour les autres - je pensais même qu'il était le bad guy du film -). Il accompagne par la suite un wagon conduit par un couple apparemment vulnérable, et déjà à ce point de l'histoire, on offre à sa personnalité un gain de contraste, obliquant donc entre sa soif de vengeance et ses principes élémentaires de justice. Une ambivalence qu'on retrouvera moins présente chez ses deux acolytes (Lee Marvin lui offre une excellente répartie en ce sens), d'autant plus que cette femme faisant parti du convoi possède des charmes à réveiller les instincts les plus primaires. En outre, le sous-texte sur ce qui fait un homme en ces terres inhospitalières où le sens de l'honneur y a toute son importance a beau être simple, ça a de la gueule. Quant à la réalisation, elle n'a rien d'extraordinaire, mais elle fait son travail, avec des décors bien gérés (je retiens surtout la façon dont les rochers sont utilisés durant les affrontements, on dirait du Anthony Mann) avec un dénouement certes attendu mais bien tendu et qui va jusqu'au bout des intentions du métrage. Bref, une série B que tout amateur de western devrait apprécier.

Note : 7.5/10

[Scalp]

C'est con t'as commencé par le meilleur

[Dunandan]

Je ne voulais pas perdre de temps

[Dunandan]

Predator 2, Stephen Hopkins (1990)

Parmi les suites réussies de films qui n'en avaient pas vraiment besoin, j'ai nommé Predator 2. Après une introduction efficace qui nous plonge direct dans l'action, on réalise que la substance de l'original est respectée. Ainsi, on se retrouve dans une jungle urbaine gangrenée par la violence qui va devenir le nouveau terrain de jeu du prédateur extra-terrestre. Certes, on ne peut nier certains défauts. Si la patte propre aux années 90 avec son ton bien souvent décomplexé (c'est généreux en scènes gores et en jurons avec un point bonus nudité, du vrai R comme on en fait plus) fait plaisir à voir, l'esthétique a parfois bien vieilli (comme les looks qui font plus 80's que 90's alors qu'on est censé se situer dans un futur proche), et surtout le héros (Danny Glover, un bon choix de casting, incarnant une figure plus humaine et vulnérable que Schwarzy, mais assure aussi avec un shotgun entre les mains) est encombré de deux sidekicks franchement inutiles (et interprétés par des quiches) qui semblent juste être là pour remplir le quota de la pouliche bad-ass et du comique de service.

Mais passé ces petits inconvénients, dès que ça se recentre sur le Predator, c'est franchement jouissif. La fusion entre l'ambiance tribale et celle des ghettos avec ses ruelles exigües est du plus bel effet, elle colle parfaitement à l'esprit du premier opus et de sa chasse au trophée, et finit par faire oublier le boss jamaïcain adepte de Voodoo frisant avec le ridicule (malgré les bonnes intentions affichées de coller avec cette thématique tribale). A chacune de ses entrées, il a vraiment la classe et nous gratifie de mises à mort fort diversifiées et qui tâchent. L'intrigue, minimaliste au possible, fait office de simple cadre pour mettre en scène cet affrontement entre le Predator et Glover qui finit par occuper tout l'espace avec un dénouement visiblement influencé par celui d'Aliens (d'ailleurs, c'est tout de suite moins intéressant dès lors qu'on dérive de cette trajectoire, et le réalisateur semble même s'en amuser en rendant parfois le tout hystérique - comme les gangsters en mode Scarface - contribuant ainsi à l'ambiance borderline de son film). En prime, plusieurs touches d'humour qui ne tombent jamais dans le cynisme ou le lourdingue, et ajoute même une touche de fun à l'ensemble. En Bref, Predator 2 incarne un action-movie SF sans prise de tête qui, malgré ses tares, remplit largement son contrat de divertissement.

Note : 7/10

[Dunandan]

Les Croods, Kirk DeMicco et Chris Sanders (2013)

Vraiment sympa ce film d'animation, un classique en puissance. Non content d'être l'un des plus beaux formellement que j'ai pu voir ces derniers temps avec les Happy Feet et les Dragons, il est également brillant et subtil sur le fond, revisitant l'histoire de l'évolution humaine avec beaucoup d'humour et de fantaisie. Le cadre préhistorique n'est pas vraiment celui qu'on a appris à connaître, bien au contraire, les créateurs des Croods ont visiblement énormément puisé dans leur imaginaire pour nous livrer un bestiaire qui ne ressemble à rien de connu ou presque. En outre, plus surprenant encore, l'inspiration du mythe platonicien de la caverne, qui sert non seulement de moteur narratif (la tribu qui a peur de tout et adopte la peur comme survie, et finit par la surmonter pour se mettre à la découverte de ce qui les entoure), mais aussi de mise en abîme sur l'intelligence humaine avec des anachronismes souvent jubilatoires. En outre, il s'agit d'une belle histoire sur la famille, centrée sur le père désirant protéger cette dernière par dessus tout mais du coup a tendance à se replier sur elle, et sa fille ado qui désire découvrir le monde. Deux points de vue sur le monde qui finissent par se réconcilier avec beaucoup d'optimisme. Pour terminer, les personnages sont plutôt attachants (le design ne fera pas l'unanimité, mais son côté cartoonesque a du charme), dont l'aspect hystérique (ils ont une sacrée bougeotte, ce qui donne lieu à des moments d'action ultra dynamiques et rythmés - les scènes de chasse sont tout simplement délirantes -) est cohérente avec le fait qu'ils sont décrits comme une souche (encore) sous-évoluée de l'humanité, ce qui encore une fois, est à la base de gags souvent très drôles (à l'image du père qui essaie d'avoir des idées pour impressionner le nouveau venu). En bref, une belle surprise, et un idéal de divertissement familial qui ne devrait laisser personne sur le bas-côté.

Note : 8/10

[Alegas]

Totalement d'accord avec toi évidemment, tu me donnes envie de le revoir du coup.

[Dunandan]

J'avoue que j'avais une petite attente à son égard, et je n'ai pas été déçu. Il y a une idée toutes les 5 min., sans que ça fatigue la rétine. Je viens de voir que l'un des créateurs de Dragons était derrière ce film, on la sent tout de suite sa patte, mais je trouve qu'il passe la vitesse supérieure avec celui-là.

[Dunandan]

Fargo, Ethan Coen et Joel Coen, (1996)

Les frères Coen n'ont pas leur pareil lorsqu'il s'agit de raconter l'histoire de low life, et lorsqu'ils combinent ce talent à l'atmosphère du film noir (film blanc devrait-on dire en vertu de son cadre hivernal), ça prend une toute autre proportion. Alors certes le début n'est pas des plus palpitants, et la dispersion des personnages n'aide pas en ce sens, mais passée cette première impression, Fargo est la parfaite illustration de ce que peut donner un plan entre les mains d'une personne peu maligne (très bon William H. Macy dans la peau d'un antipathique loser de première catégorie qui essaie à tout prix de se faire une situation au sein de sa famille pas très agréable non plus), et entre celle de deux sociopathes qui ne le sont pas moins. Après un départ en douceur, la machine grippe donc rapidement, hors de contrôle, marquée par des exécutions imprévues et plus sommaires les unes que les autres, dotées d'un sens du macabre très prononcé.

Mais Fargo ne se résume pas qu'à ces deux éléments, déjà très bons. Car même s'il n'apparaît qu'un peu plus tard, l'inspecteur de police (Frances McDormand qui y trouve l'un de ses plus beaux rôles), en incarnant un regard rationnel et posé face à cette histoire délirante partie de rien ou presque, devient en quelque sorte le personnage central et surtout celui envers lequel on peut éprouver une quelconque empathie. De même, si Norman, son mari, semble véritablement amorphe et à la limite demeuré, ses déjeuners qu'il prépare au petit matin avant que sa douce file accomplir son devoir représentent en fait une épaule rassurante sur laquelle elle peut se reposer face à ces horreurs dont elle est témoin. Personnellement, je préfère le portrait que dressera The Big Lebowski sur les losers de l'Amérique profonde, à la fois plus attachant, riche, et profond, mais rien que cette dernière séquence, où on retrouve les deux tourtereaux qui ne sont pas si mal dans leur banalité quotidienne pas très folichonne, vaut son pesant d'or.

J'irai très vite sur le casting qui a rarement été pris en défaut chez les Coen et celui-ci ne fera pas l'exception, avec une mention spéciale pour Buscemi qui incarne ici une petite fouine énervée (une de ses dernières bonnes interprétations avant de tomber dans la facilité avec ses dépressifs mono-expressifs). En outre, les deux fréros savent jouer avec le cadre (ce qui a toute son importance pour figurer les rapports de force entre les personnages, je pense surtout aux couples de Macy et Frances, mais aussi pour surprendre son spectateur avec un coup d'oeil complice) et le hors-champ (la violence est d'autant plus frontale), mais la mise en scène n'en est pas moins au service du fond, avec une place toute particulière accordé à l'environnement, théâtre muet de choses bien étranges, de mouvements parfois hasardeux manquant de finesse pour un tel plan d'arnaque. Les amoureux de l'humour noir à froid et des personnages idiots à la Coen seront comblés. Une belle redécouverte (je ne me rappelais pas d'une fin aussi touchante) même si je le revois un poil à la baisse.

Note : 8/10

[Jimmy Two Times]

Je l'aime toujours autant ce film somme des Coen. Je vois beaucoup de monde le rabaisser depuis quelques temps, moi je l'aime toujours autant. Parce que c'est avant tout une putain de farce noire, un des films qui me fait le plus marrer.

[Dunandan]

Ben tu vois, je ne l'ai pas trouvé si drôle ^^. Mais ouais, une belle "farce noire" comme tu dis, avec des moments bien creepy ^^.