Audition, de Takashi Miike (1999)
L'histoire : Un veuf d'âge mûr envisage de se remarier. Un de ses amis, producteur, le convainc d'organiser une fausse audition pour un film afin de dénicher la perle rare...
Voici le long-métrage qui a révélé Takashi Miike sur la scène internationale... presque dix ans après ses débuts. A l'origine, comme toujours avec le cinéaste, il s'agit d'une commande, ici pensée pour profiter de la popularité naissante de la J-Horror (Ring, de Hideo Nakata, est sorti l'année précédente et a rencontré un succès fracassant). Mais le réalisateur de Fudoh a perverti le concept initial et déjoué bien des attentes, tant du côté des producteurs que des spectateurs, au point qu'il s'avère difficile, aujourd'hui, de considérer Audition comme un film d'horreur qui ne vaut que pour sa conclusion choquante... Avec cette adaptation d'un roman de Ryû Murakami, Miike livre un film unique au sein de sa production stakhanoviste, une œuvre sombre qui illustre de manière perverse et jusqu'au-boutiste l'idée que les hommes et les femmes parlent une langue différente et ne pourront jamais se comprendre. En ce sens, Audition s'apparente moins à un film d'horreur qu'à un drame, une tragédie qui met en lumière deux âmes en peine à qui le bonheur semble interdit... D'un côté, un veuf d'âge mûr, bon père, qui certes trompe sa solitude par des moyens condamnables (une aventure avec sa secrétaire, sans tenir compte de ses sentiments, et la fameuse audition), mais cherche avant tout un amour sincère. De l'autre, une jeune femme qui apparaît dans un premier temps comme pure et innocente mais qui, une fois le masque tombé, révèle des fêlures irréparables et une folie furieuse. Takashi Miike prend son temps pour mettre en scène leur relation, trop peut-être... Le rythme du film peut ainsi, selon les spectateurs, endormir ou hypnotiser. Et si sa conclusion marque les esprits, ce n'est pas tant grâce à sa violence graphique (le réalisateur nous en montre peu) que grâce à l'interprétation habitée d'Eihi Shiina et à l'utilisation du son... et parce qu'elle consacre l'échec de deux vies qui, pourtant, désiraient la même chose.
Note : 8/10