Inherent Vice de Paul Thomas Anderson
(2015)
Sacré douche froide avec ce film, qui est du coup le premier film de Paul Thomas Anderson que je trouve très moyen. Jusque là, même dans ses œuvres plus mineures comme Hard Eight, j'arrivais toujours à trouver mon compte et des justifications concernant certains choix de traitement. Avec Inherent Vice, je me retrouve devant un film qui non seulement me fatigue au plus haut point, mais surtout dont je ne comprend pas spécialement l'intérêt , surtout vu la façon dont Anderson a procédé à son adaptation. Au final, le sentiment de se retrouver devant un Cosmopolis-bis est grande, tant l'impression de voir le livre adapté au mot près, sans aucune nuance ou travail de réécriture derrière, est permanente. Que l'intrigue ne raconte pas grand chose, c'est quelque chose que j'aurais pu aisément pardonner si en substance le film arrivait à poser un point de vue sur ce qu'il montre (à savoir la décadence totale d'une génération et d'une société, à la manière d'un Boogie Nights), mais ce n'est pas le cas, loin de là.
Inherent Vice, c'est finalement une simple succession de scénettes, chacune faisant progresser (ou pas) l'intrigue (incompréhensible par moment) de façon lente, et mettant en lumière un des nombreux seconds rôles le temps d'une dizaine de minutes avant qu'il disparaisse pour le restant du métrage. Que ce procédé fonctionne sur le support littéraire soit, mais au cinéma, où le spectateur demande un minimum de cohésion et de rationalisation, cela donne un résultat profondément ennuyeux et forcé. Quand à l'aspect comédie, malgré quelques gags vraiment très réussis (tout ce qui touche à Josh Brolin, le passage où Phoenix regarde la photo du bébé), il donne l'impression de n'être jamais réellement assumé, la faute à un rythme léthargique qui fait que l'on attend avec impatience le prochain gag pour nous sortir de notre torpeur. A partir de là, deux hypothèses : soit Anderson a réussi à plonger son spectateur pendant plus de deux heures dans un état second, à la manière du personnage principal, soit il a tout simplement raté la rythmique de son métrage. Même niveau mise en scène, difficile d'y trouver son compte. Là où l’extrémisme formel de The Master pouvait être oublié grâce à une photographie magnifique, Inherent Vice se complaît dans le plan long pour pas grand chose, ce qui donne l'impression constante de voir Anderson tenter au maximum la patience de son spectateur.
Enfin, côté casting, c'est déjà plus convaincant. Alors oui, on se fout totalement de ce qui arrive aux personnages, d'autant que la majorité n'est jamais visible plus de dix minutes, mais ils sont indéniablement réussis et bien interprétés, à quelques exceptions près comme celui d'Owen Wilson dont je n'ai toujours pas compris l'utilité. Mention spéciale au personnage de Josh Brolin qui repousse à chaque scène les limites du WTF. Il paraît que le livre de Pynchon est chiant comme la mort, on pourrait donc dire que Inherent Vice est une plutôt bonne adaptation, pour le reste c'est quand même franchement dommage de voir Paul Thomas Anderson réaliser un film aussi pépère, lui qui a justement su perfectionner sur de longues durées des rythmes frénétiques. Son premier mauvais film donc, ça fait mal.
4,5/10