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ABASHIRI BANGAICHITeruo Ishii | 1965 |
7/10••••••••••••••••••••••••••••••••••••• Challenge découverte Janvier/Février 2015 •Si les contraintes budgétaires serrées à l’origine de Abashiri Bangaichi se ressentent dans le manque d’ampleur qui frappe parfois le film, se dégage tout de même de l’ensemble un charme indéniable, celui né de la débrouille et d’une envie farouche de dompter les éléments. Dans des décors atypiques hantés par une neige indomptable, Teruo Ishii (Female Yakuza Tale et autres joyeusetés sans soutif) déroule un film de prison dans la plus pure tradition. Entre arrivée bruyante des nouveaux chiens fous, acclimatation de ces derniers aux lois propres au lieu, tensions entre codétenus, comparaisons des faits d’arme ayant propulsé tout ce petit monde entre les 4 murs de la prison d’Abashiri, l’écriture de Ishii paraît même très linéaire, sans grande surprise mais d’une belle efficacité.
Pour le cinéaste, l’important ne se trouve nullement dans l’action à proprement parler, mais plutôt dans les traits de caractère du personnage qu’il choisit comme point central de son histoire. A savoir un homme peu gâté par la vie, animé par un farouche sens du principe, qui le rend honorable aux yeux de ceux qui prennent le temps de le connaître, spectateur y compris forcément. A travers quelques flashback bien dosés, Ishii fait de son jeune « héro » poissard à la langue bien pendue un bagnard romantique, animé d’une droiture à toute épreuve, qui inspire d’emblée la compassion. Alors quand l’homme, après avoir refreiné son envie de se rendre au chevet de sa mère malade par tous les moyens possibles, y compris les moins légaux, se fait embarquer malgré lui dans une évasion sans issue, la tension est à son comble, l’empathie également : ce n’est pas pour rien que Ken Takakura assoira définitivement sa réputation montante au sortir de ce film. Son talent évident, combiné à l’écriture sans détour de ce personnage facile à aimer, suffiront à faire de lui un acteur incontournable au Japon à cette époque.
Mais outre la magnétique présence de l’acteur, si Abashiri Bangaichi fait belle impression, c’est aussi pour toute sa dernière demi-heure, dynamique en diable et de très belle tenue, formellement parlant. Après un petit tour dans un wagonnet aux freins capricieux, qui aura peut-être inspiré Spielby pour le petit tour de manège du Professeur Jones et Demi-Lune dans Le temple Maudit (bon j’en doute, mais j’ai pensé fortement aux deux bougres pendant la séquence ^^), c’est le même humanisme qui a animé tout le film et ses personnages qui a le dernier mot. Certains trouveront la révérence finale un peu cavalière —j’attendais un dénouement plus noir de mon côté— mais elle a le mérite d’apposer une ultime ponctuation positive à une histoire qui n’a jamais souhaité diaboliser son sujet. Une recette gagnante si l’on en croit l’histoire du film, puisque la Toei, en opportuniste de compétition, fera tourner à Ishii, la même année, deux suites à Abashiri Bangaichi, pour lancer une saga de pas moins de 18 films. Une belle opération pour le studio qui n’avait pourtant pas misé un copec sur le « pilote ». Comme quoi …