[Velvet] Mes critiques en 2014

Modérateur: Dunandan

Night Call - 8/10

Messagepar Velvet » Ven 28 Nov 2014, 11:26

Night Call de Dan Gilroy (2014) - 8/10


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Los Angeles est devenue un terrain de jeu nocturne, une cour de récréation pour sociopathe qui ont la bave aux lèvres dans une quête dérangée vers un individualisme arriviste et misanthrope sans issue. C’est n’est plus le théâtre des rêves mais celui des cauchemars des courses effrénées pour le droit à l’image qui tache. La nuit arrive, quand le chat n’est pas là, les souris dansent, les vautours mangent les carcasses. Les instincts primaires s’amusent à ressurgir dans une ville de L.A. grandiloquente et fantomatique parfaitement mise en image par le travail visuel parfois assez somptueux de Dan Gilroy, et Robert Elswit faisant irrémédiablement penser à Collateral de Mann ou Drive de Refn.

Des courses poursuites avec la police, des tueries en plein restaurant, le droit à l’image est une jungle qui n’a plus de règles, sauf celui du plus fort, du plus aventureux, du plus mensonger. C’est juste un moyen de vivre, de ressentir même. Lou, un peu fou et vaut rien intellectuel sur les bords, se sent pousser des ailes pour devenir une sorte de paparazzi visuel de la mort, de l’exclusivité morbide pour vendre ses droits aux chaines d’informations en continue avec la maline et manipulatrice Rene Russo qui sont représentées comme les crématoriums des actes de la société.

C’est la simple histoire d’un homme qui comprend la société et ses codes et se met au diapason de l’offre et de la demande : du sang, du trash, du scandale. Night Call, ce n’est pas Drive, au contraire, tout est plus ou moins extériorisé notamment la folie et la fougue verbale du personnage de Lou Bloom, interprété par un Jake Gyllenhaal euphorisant, à la fois inquiétant et amusant grâce à d’innombrables dialogues à la férocité parfois caricaturales jouissives. Dan Gilroy dresse un portrait schizophrène.

La satire amusée du personnage fait parfois penser à celle de Jordan Belfort du Loup de Wall Street où coexiste l’ambiguïté de la volonté de réussir et l’adrénaline devenant une drogue, une sorte de consommation de la destruction de la vie comme l’évoquait Crash de David Cronenberg sur le bitume. Parfois un peu surréaliste ou bancal, sans révolutionner ni enfoncer des portes ouvertes, Night Call n’en reste pas moins une œuvre qui offre un panel de sensations diverses, une descente en enfer qui jouit de son envie de cracher sur le système pour varier les plaisirs entre séquences psychologiques, drôlement cyniques et moments de suspenses haletants.
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Alleluia - 8/10

Messagepar Velvet » Ven 28 Nov 2014, 19:43

Alleluia de Fabrice du Welz (2014) - 8/10


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Je te tiens, tu me tiens par la barbichette, le premier de nous deux qui criera, prendra une hachette. Sur la brèche, autour d’un feu de camp improvisé qui fait perdre tout sens de la réalité, Alleluia est le récit d’un amour fou, cet amour charnel qui ne connait pas de limites, celui qui rend copieusement aveugle. Après s’être perdu dans la production délicate et infructueuse de Colt 45, Fabrice du Welz revient à ses premiers amours, sans son chef opérateur habituel Benoit Debie. Laurent Lucas et Lola Duenas, géniaux, portent sur leurs épaules, un film ambivalent, qui nous fait suivre un couple apparaissant pathétique mais aussi terriblement attachant. Il y a presque un côté Possession de Andrzej Zulawski dans cette hystérie amoureuse.

Lui drague pour voler, baise pour vivre et s’acheter, un vendeur/gigolo un peu mystique mais rapidement patibulaire et dépassé par ses propres actes. Elle, semble amoureuse, avec son regard de gentille biche égarée mais qui cache derrière son sourire d’ange, un démon jaloux et machinalement possédé. Ils vont jouer les « Bonny and Clyde » version rednecks campagnards et dépouiller des femmes solitaires en recherche de compagnie masculine et dans le même temps, mettre à l’épreuve la confiance qu’ils ont l’un pour l’autre. L’absence de Benoit Debie se fait sentir au premier coup d’œil. Le grain de l’image est plus sale voire crade, la cadre et la photographie beaucoup plus approximatifs, près des corps et des visages, tout en étant construit autour d’une luminosité magnifique et d’un montage plus rapide et désarticulé comme peut le faire un Philippe Grandrieux.

Alleluia est un film de genre sans en être un, avec une atmosphère littéralement schizophrène qui ne sait pas forcément sur quel pied danser ou chanter, viscéralement drôle et monstrueusement effrayant. C’est son défaut mais aussi sa qualité, une générosité sanglante en trop plein qui s’amuse de soi même sans regarder derrière son dos. A la fois beau et laid, sexuel et gore, intime et frénétique, psychologique et charnel, Alleluia est une œuvre imparfaite qui aime parfois se contempler dans son ridicule granguignolesque, préférant alors dévisager les corps au lieu de s’immiscer dans l’inconscient de ses personnages, filme les scènes de sexe comme des scènes de meurtre et inversement.

C’est sans doute un mal pour un bien, le cinéma du cinéaste belge gagne en incarnation. Le réalisateur, notamment dans Calvaire, avait eu tendance à seulement se reposer sur le travail visuel de son chef opérateur. Dans Alleluia, Fabrice du Welz semble avoir enlevé ses chaines pour ne s’imposer aucune barrière et laisse libre cours cette fois ci, à une folie douce machiavéliquement bancale et joyeusement attendrissante.
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Re: [Velvet] Mes critiques en 2014

Messagepar osorojo » Ven 28 Nov 2014, 20:18

J'dois être l'un des seuls qui avait kiffé Calvaire, du coup là tu éveilles ma curiosité. Je pense que ça va être coton pour moi de le voir en salle, et ça m'embête bien :(
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New-York Melody - 7/10

Messagepar Velvet » Lun 01 Déc 2014, 14:07

New York Melody de John Carney (2014) - 7/10


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New York Melody, c’est une visite guidée de la ville de New York par le biais de la production d’un album. Le personnage principal de cette petite bluette est la musique, symbolisée par cette solidarité DIY où l’authenticité du vécu et de l’atmosphère d’une ville valent bien toutes les candeurs d’un studio placardisé et d’une célébrité passagère. C’est aussi paradoxalement une volonté d’honorer aussi la ville de New York, tous ses vestiges, tous ses recoins, une ville où tout est possible même le pire. Ne vous détrompez pas, vous êtes bien dans un feel good movie avec ses habituels bons sentiments et problèmes de conscience où tout le monde a le droit à une deuxième chance. Ici, quand on écoute de la musique, on ne le fait pas qu’à moitié, c’est limite si des petits oisillons venus du ciel ne vont pas vous pousser la chansonnette.

Mais pourquoi se priver de ces tous petits plaisirs ? Pourtant, le message du long métrage, avec cette représentation de la méchante industrie qui consomme le talent vers le bas, qui inhibe la création est un peu surfaite et facile, mais John Carney ne se repose pas sur une simple dénonciation factice d’un système vrai-semblant. Même si New York Melody n’évite pas les écueils narratifs en tant que tout bon feel good movie, avec sa légèreté cousue de fil blanc, ses clichés sur la jeunesse et le monde de la musique (le rappeur noir), tout en saupoudrant son histoire d’amourette un peu guimauve, le pari est allégrement réussi, avec ses deux personnages attachants et sa symbiose totale, cette proportion à ne jamais se détacher de ce qui est réellement important : le lien musical.

Un père et une fille qui renoue le lien à travers un solo saturé de guitare, un couple qui se quitte en écoutant l’aveu d’impuissance d’une chanson, une rencontre fortuite faite d’alcool et d’arrangements musicaux imaginés, c’est aussi ça New York Melody. Entre un producteur alcoolique s’emmerdant aux écoutes de toutes les merdes qu’on lui propose et une chanteuse larguée comme une chaussette par son boy-friend devenu star (interprété par le chanteur des Maroon 5), New York Melody s’avère beaucoup plus humble dans ses intentions, plus fin dans sa construction, plus original dans sa dévotion, avec des personnages qui laissés sur le bas-côté de la route par le système, voient alors en la musique une possibilité de s’affranchir.

Derrière sa bande son pop/folk sublimement aiguillée par la douce voix de Keira Knightley et sa mise en scène feutrée, John Carney voit la musique comme un vecteur de sentiments, un catalyseur de liens sociaux, où la musique fait avancer les mœurs, nous permet de communiquer, de nous évader et de s’inventer une histoire autour de choses anodines. Un riff, une note, une sonorité discordante en dit plus sur une personne que tout autre chose. Oui, New York Melody n’a qu’une simple ambition, celle de lier les gens par la musique et non pas par la pensée, de faire ressentir tout cet amour de la musique. Au lieu de marcher le long des trottoirs en se parlant ou en se regardant droit dans les yeux, on prend un MP3, et on vit l’instant présent à travers les mélodies de singles cultes ou de plaisirs coupables mémorables.
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Re: [Velvet] Mes critiques en 2014

Messagepar dagokhiouma » Lun 01 Déc 2014, 14:51

Avec toutes ses belles critiques superbement écrites, je ressens une nouvelle fois mon manque de talent littéraire pour rédiger un truc potable pour le film. Je vous chante ma critique sur votre répondeur ? :mrgreen:
Les hommes livrent leur âme, comme les femmes leur corps, par zones successives et bien défendues.
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Re: [Velvet] Mes critiques en 2014

Messagepar Velvet » Lun 01 Déc 2014, 18:00

:eheh: :eheh:


Novembre:

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236) Série noire de Alain Corneau (1979) - 8/10
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240) Night Call de Dan Gilroy (2014) - 8/10 - CRITIQUE
241) Alleluia de Fabrice du Welz (2014) - 8/10 - CRITIQUE
242) The New York Melody de John Carney (2014) - 7/10 - CRITIQUE


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Re: [Velvet] Mes critiques en 2014

Messagepar Mark Chopper » Lun 01 Déc 2014, 18:04

On a trouvé le second fan de la mystérieuse Anaïs Demoustier.
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Re: [Velvet] Mes critiques en 2014

Messagepar Velvet » Lun 01 Déc 2014, 18:14

C'est qui le premier? :lol:
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Re: [Velvet] Mes critiques en 2014

Messagepar Val » Lun 01 Déc 2014, 18:25

Je suis le troisième alors.
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Re: [Velvet] Mes critiques en 2014

Messagepar Mark Chopper » Lun 01 Déc 2014, 19:25

OK, je commence à dresser le portrait robot de son fan type.
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Before sunrise - 7/10

Messagepar Velvet » Mar 02 Déc 2014, 18:25

Before Sunrise de Richard Linklater (1994) - 7/10



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La vie, c’est parfois tout simple. Un voyage, un trajet anodin dans un train. Un couple se dispute sans que l’on sache pourquoi, et par le biais de ces quolibets sonores, deux inconnus croisent leur regard avec ce sentiment que l’on connait tous, celui de cette première effusion visuelle : avec la gêne que cela engendre et ce mystère que l’on a envie d’outre passer. Jesse est américain, beau parleur et râleur vagabond. Céline est française, romantique, et étudiante essayant d’œuvrer pour des causes sociales et culturelles qui lui sont chères. Un lien s’installe vite entre les deux.

C’est terriblement banal mais parfaitement identifiable. Ils passeront la journée ensemble à Vienne. Seulement cette journée. Après quoi, ils reprendront leurs vies, comme une main courante où le seul plaisir de nouer un souvenir éternel va devenir une envie de figer une réalité passagère. A partir de là, Before Sunrise montre peu de choses mais raconte le plus important, la première rencontre, ce coup de foudre qui n’en a pas l’air, cette première connivence qui change une vie ou une simple journée.

Un destin que l’on prend en main, une simple volonté de se divertir, de passer une journée pas comme les autres quitte à ne plus y penser par la suite. Richard Linklater minimalise ses effets visuels et narratifs pour suivre l’ombre de ses deux personnages qui discutent sans cesse jusqu’aux aurores, dans les moindres recoins de la capitale autrichienne. Chaque lieu est un prétexte pour évoquer un sujet, et plus le temps passe, plus le rapprochement est fort pour s’immiscer dans l’intimité de l’autre.

La caméra en devient un personnage, un témoin invisible du premier émoi amoureux. Mais est-il réellement question d’amour dans Before Sunrise ? Comme le dit Jesse, il est difficile de décortiquer le sens premier de l’expression « Je t’aime ». Durant le bilan, d’une pensée journalière, cette rencontre, c’est même plus que de l’amour, c’est un vide, une solitude, une individualité, qui pour une journée, s’extériorisera dans les yeux d’un inconnu comme un roman-photo, un ensemble d’instantanés qui leur restera en tête.

Sans aucune facétie ni artificialité, le film en est presque monolithique, linéaire, va tout droit sans savoir où il atterrira, avançant petit à petit le long de ces dialogues qui ne s’arrêtent quasiment jamais. Peut être parfois trop bavard, le long métrage a l’intelligence de savoir se jouer des silences et des non-dits comme durant cette merveilleuse séquence dans une cabine où nos deux compères écoutent un vinyle dévoilant un jeu de regard à la fois envieux et indifférent. Before Sunrise est le portrait amusé d’un couple du destin mais est celui aussi de deux êtres qui se délivrent l’un à l’autre sans se dévisager, parlant de tout et de rien faisant alors du film, un joli récit initiatique de l’amour.
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Re: [Velvet] Mes critiques en 2014

Messagepar Dunandan » Mar 02 Déc 2014, 19:33

Si tu penses que celui-ci est bavard, que vas-tu penser des deux autres... :mrgreen: (surtout le second)
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Re: [Velvet] Mes critiques en 2014

Messagepar logan » Jeu 04 Déc 2014, 00:11

Velvet a écrit:C'est qui le premier? :lol:


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Re: [Velvet] Mes critiques en 2014

Messagepar Val » Jeu 04 Déc 2014, 01:01

Michael ou Anaïs, il faut choisir.
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Re: [Velvet] Mes critiques en 2014

Messagepar pabelbaba » Jeu 04 Déc 2014, 08:35

Toutafé, parce que Michael prend pas mal de place dans le lit... :chut:
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Sinon, oui, j'aime les nibards. :chut:
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