[Jed_Trigado] Mes critiques 2014

[Jed_Trigado]

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[Jed_Trigado]

Pour fêter mon retour à l'écriture, j'ai critiqué un truc assez spécial, vous comprendrez vite.

The Story of Joanna - Gerard Damiano (1975)

On a une image souvent faussée du porno : moyens ridicules, mise en scène inexistante, acteurs mauvais et scénario anecdotique, ça c'est a peu près l'idée reçue. Pourtant il fut un temps où certains réalisateurs ont cru au genre au point de penser les films comme de véritables œuvres de cinéma. Cette période se concentre essentiellement du début des années 70 au début des années 80 (avec un déclin qualitatif né de l’émergence de la vidéo qui réduisit de façon drastique les coûts de production), mais avant ça la pellicule était reine et pour peu qu'on avait un bon chef opérateur, certains boulards avait plus de gueule que pas mal de films "mainstream" et Story of Joanna fait partie de cette catégorie.

Faut dire que Gérard Damiano, des quelques films que j'ai pu voir de lui, est un véritable auteur du cul nu, pour qui la chignole n’était pas une fin en soi à une époque où la société américaine vit une véritable révolution, proposant de vrais portraits d'hommes et de femmes souvent déçus du sexe, pour qui la "libération" se fera dans les expériences charnelles totales (pas la peine de faire un dessin ^^). Malgré tout, il gardera une vision assez pessimiste et sombre des rapports humains où l'épanouissement sexuel n'est pas synonyme de bonheur, les hommes et les femmes étant éternellement voués à souffrir ensemble, car incapables de se comprendre (cf le superbe plan final de l'Enfer pour Miss Jones). De la souffrance, il n'y a que ça dans Story of Joanna, Damiano ayant voulu adapter sans succès le roman Histoire d'O, imagine donc l'histoire d'un riche jeune homme (joué par le remarquable Jamie Gillis) apprenant qu'il n'a que peu de temps à vivre et va convaincre une jeune femme innocente de le suivre dans son château pour assouvir ses lubies extrêmes. Là où le film surprend, c'est le temps qu'il prend pour installer son histoire et attend une bonne demi-heure pour rentrer dans le vif du sujet, proposant des dialogues teintés de philosophie touchante sur les rapports humains (même si l'écriture est parfois un poil pompeuse, comme Cartel), où le ton est donné, l'homme ne donnera pas l'ombre d'un égard pour la femme, alors qu'elle ne demande qu'a s'offrir à lui et l'aimer ("Ne peut on espérer l'amour?" demande t'elle. "Non. Si tu attends de moi que je t'aime en retour tu me fais perdre mon temps" répond l'homme). Difficile de faire plus éloquent.

Un récit cruel donc, teinté de sado-masochisme où la mise en scène précise de Damiano sert à merveille l'aspect tragique de l'histoire, dont je retiens un superbe plan très "Barry Lyndonien" avec un plan séquence d'une ballade dans un jardin où les acteurs sont cadrés via un long dézoom au téléobjectif révélant au fur et à mesure l'immensité du décor. Les moyens sont là et jamais à un moment on vient mettre en doute la qualité de fabrication du film. Les acteurs sont très bien choisis, Jamie Gillis prouve en une seule scène qu'il était un vrai comédien quand on le dirigeait, capable de jouer avec son regard, nous faisant comprendre la détresse de son perso et pareil pour Terri Hall, la Joanna du titre, en plus d'être bien foutue, elle arrive à garder une certaine candeur sur son visage, crédibilisant plus que jamais ce film. Pourtant, malgré son statut de "chef d'oeuvre" du porno, je lui trouve bien plus de défauts que l'Enfer pour Miss Jones, outre la similarité entre les deux films (qui restent des récits d'initiation avec une tonalité macabre), j'ai trouvé Damiano bien moins inspiré sur les scènes de cul, les enquillant de manière déséquilibrée, alors que pendant 30 minutes les comédiens ne se déshabillent pas, ensuite c'est open bar et l'histoire se perd peu à peu au profit de scènes moins virtuoses (même si fidèle à lui-même, Damiano refuse les gros plans gynécologiques interminables), le tout étant rattrapé par une conclusion surprenante car assez imprévisible et toujours sombre.

Mais je ne serais pas bougon, un film de cette qualité dans un tel registre filmique, ça relève de l'exploit qu'il serait bien triste de le bouder. Pour peu qu'on ait l'esprit ouvert et qu'on soit authentiquement intéressé par toutes les facette de l'histoire du cinéma, qu'elles soient plus ou moins avouables, je conseille vivement le travail de Gérard Damiano qui pourrait en surprendre plus d'un, vous voilà prévenus !

7,5/10

[osorojo]

Ben, et les screens ???

Bien sinon, le choix de film pour ce retour au clavier ^^ Un texte intéressant, avec lequel je suis en phase, même s'il est quand même difficile de trouver boulard qui parvient à sortir la tête de l'eau une fois qu'il commence à enchaîner les scènes torrides. Je demande qu'à en découvrir un, même si je reste sceptique tout de même ^^

[Jed_Trigado]

J'ai la flemme pour les screens, m'en veux pas.

Si t'es courageux, tu peux mater Forced Entry (et son remake officieux Waterpower), mais je préviens c'est ULTRA-extrême, faut vraiment avoir une case en moins pour tourner des trucs comme ça et dieu sait que j'en ai vu des trucs dégueulasses.

[Dunandan]

Puis de toutes façons, ton texte se prête à l'imagination .

[Jed_Trigado]

Ouais, j'ai décidé d'être soft, on est un forum où ça cause Disney quand même, faudrait pas choquer notre auditoire.

[Dunandan]

C'est clair, et ça a causé un petit débat en plus

[osorojo]

J'ai la flemme pour les screens, m'en veux pas.

Ben un peu quand même

Si t'es courageux, tu peux mater Forced Entry (et son remake officieux Waterpower), mais je préviens c'est ULTRA-extrême, faut vraiment avoir une case en moins pour tourner des trucs comme ça et dieu sait que j'en ai vu des trucs dégueulasses.

J'vais me rencarder, mais si c'est trop hardcore, j'vais passer, j'ai donné dans les films chelous, j'y arrive plus quand trop tendu ^^

[Jed_Trigado]

Wayne's World - Pénélope Spheeris (1992)

Je me suis refait un film qui a tourné en boucle pendant mon enfance, plus qu'Austin Powers, Mike Myers restera pour moi Wayne Campbell, cet éternel branleur fan de rock aux vannes parfois incompréhensibles (Le sphincter a dit quoi ?) et animateur d'une émission de télé débile comme on en aimerait en voir plus souvent. En bon transfuge du Saturday Night Live qu'il était et au vu du succès incroyable de son personnage, il était impensable de ne pas le voir franchir le pas du grand écran, pas qu'il réussit prodigieusement par un sens du gag, de la rythmique et aussi faut le reconnaitre, d'une VF qui a su prendre les libertés nécessaires pour rendre la chose plus drôle pour un public francophone, pas forcément au fait des références très américaines de la version originale.

Si pendant longtemps ma préférence allait au second épisode, a cause d'un "bad guy" remarquable (merci Christopher Walken), ce premier film à le mérite de se suffire à lui-même, voir mieux de ne jamais hésiter à avoir conscience de ses défauts et de s'en moquer (ce fameux message lourdaud sur le fait de vendre son âme au showbiz qui est retourné dans un final d'anthologie). Chaque personnage est bien caractérisé, mention spéciale a Rob Lowe en fouine hypocrite et Tia Carrere en robe moulante, la réalisation est loin d'être fonctionnelle (le nombre de gags visuels est étonnant pour être souligné), bref on est loin des autres films de transfuges de SNL comme ceux de Chris Farley ou même Will Ferrell (qui sont pas très drôles faut l'avouer) et si en plus, on est un gros nostalgique du rock plus ou moins hard, il y a de fortes chances que cette comédie fonctionne encore, notamment par son rythme qui refuse le coup de mou, quitte à tenter des gags WTF.

"Gigateuf !!!!"

8/10

[Dunandan]

C'est dans celui-là qu'il y a la fin scoubidou ?

Sinon comme toi, je l'ai vu un bon paquet de fois

[Jed_Trigado]

Ouais c'est bien dans celui-là.

[maltese]

Un classique

[pabelbaba]

Pareil, ça fait un sacré bout de temps que j'ai pas revu le premier.

[Jed_Trigado]

Extreme Justice - Mark L.Lester (1993)

J'ai véritablement de la sympathie pour Mark Lester, honnête faiseur de séries b a tendance bourrine qui n'aura jamais su se défaire de l'emprise des années 80, en proposant souvent des films très cons mais toujours divertissants. Extreme Justice était un peu la dernière "grosse" œuvre du bonhomme qu'il me restait à découvrir, puisque ensuite sa carrière se prolongera essentiellement à la télé et en dtv. Un film assez particulier, car Lester abandonne un temps l'actionner et aborde le polar avec une louchée de vigilante (très grosse la louchée), d'ailleurs, le titre ne ment pas sur la marchandise, il est bien question de justice extrême où des flics ont leur vision toute particulière de la loi. Moi qui pensait avoir tout vu en termes de vigilante movie, me voilà servi, je crois avoir été en face du plus douteux idéologiquement du genre : ici, pas de voyous capables de se défendre, là c'est du 5 contre 1 (faut voir la scène d'intro ) et à l'arme de guerre si possible (l'amoureux de gros flingues que je suis s'est régalé), puis pour ensuite plaider la légitime défense après coup pour se couvrir alors que les bandits ont été transformés en compote. Impossible n'est pas Lester.

Connaissant bien les idées politiques du réalisateur cela ne me choque guère, même si parfois le film en devient très dérangeant (notamment la scène de viol où les flics veulent pas agir immédiatement et qui finit de manière dramatique). Pour le reste on repassera, si les scènes d'action sont très cash avec du passant buté gratos et en plein cadre svp, on sent que Lester croit un peu trop à son histoire et patauge entre son délire vigilantesque et son désir de raconter quelque chose (en gros il essaye de nous faire du sous-sous-Lumet avec Lou Diamond Philips qui doit lutter entre sa raison et son amitié envers ses collègues, couplée à une sous-intrigue de journaliste inutile), sauf que c'est traité de manière ultra-grossière, certains personnages et situations prêtent vraiment à rire (Yaphet Kotto sapé comme un cow-boy d'opérette ou la meuf de Philips qui nous fait le coup de la blouse blanche piquée dans le réfectoire pour aller interroger un croque-mort, c'est pas sérieux tout ça ) du coup, j'en ressort avec une impression assez mitigée au vu de sa réputation.

Extreme Justice y aurait franchement gagné à assumer ses défauts, être moins sérieux, quitte à n'être qu'un simple divertissement sans prise de tête parce que l'idée est vraiment pas mal et que certains acteurs tirent leur épingle du jeu comme Scott Glenn et Andrew Divoff en flics borderlines.

6/10

[Jack Spret]

Tiens, tu me tentes bien. Je suis assez friand de ce genre de péloches.