GODZILLA
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Gareth Edwards (2014) | 3/10
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Des personnages sans consistance, une trame linéaire aussi passionnante qu’un journal de 13H et un sens du rythme emprunté aux pires défilés du 14 juillet, Godzilla conforte la mauvaise santé du blockbuster moderne. Entre tentatives maladroites pour essayer de dépasser le statut de simple divertissement de son bébé et éléments que l’on sent imposés par des studios désireux de rentabiliser l’oseille investi, Gareth Edwards se plante dans les grandes largeurs et livre un film aussi insipide que son Monsters était, lui, bourré de belles propositions.
Mais seulement, dans Monsters, l’homme ne gérait que 2 personnages, qu’il prenait le temps de construire. Ici, il les enchaine, les fait exister deux secondes pour les buter de façon radicale (certainement pour faire genre dans mon blockbuster c’est coupe gorge assuré gros, ta mère y passe aussi, sans scrupule); pire il transforme son protagoniste en un voyageur en treillis qui fait un petit reportage sur les moyens de transports actuels. Entre le petit passage en bateau pour s’infiltrer en zone sinistrée, le petit tour en métro où il sauve du mini japonais que ses parents sont pas foutus de surveiller, la récréation aérienne qui se conclut par un petit saut en parachute (et le plus joli plan du film au passage) et enfin un petit court d’armement en train histoire de boucler la boucle, on confondrait presque l’échappé de Kickass pour un Nicolas Hulot reconverti en journaliste pour le ministère du transport. Le gadjo essaye bien de sauver les apparences en jouant les pros de la bombinette, en livrant le petit trauma qui va bien et en apportant sur la table la carte de la famille unie qui se retrouve au ralenti en fin de bobine, mais ça ne fait qu’amplifier son statut d’huître armée qui n’a jamais rien à dire. Le pauvre Aaron Taylor-Johnson fait ce qu’il peut pour sauver les meubles, mais son personnage n’ayant vraiment rien pour lui sur le papier, c’est peine perdue.
En bref, Godzilla ne vaut que pour le design assez réussi de sa bébette bien montée (la coquine !). Par contre, il ne faut pas trop s’attarder sur les deux ptérodactyles qu’il dégomme, qui eux, sont un joli foutage de tronche en mode kaiju 2.0, auquel il ne manque que l’ombre portée et le reflet aqua de circonstance[1]. C'est donc un peu court, car passés ces affrontements entre les montagnes nucléaires, qui sont avortés avant même d’avoir pu tenir les promesses qu’ils avaient semées pendant une bonne heure et demie, il n’y a vraiment rien à se mettre sous la dent pour combattre l’ennui qui pointe le bout de son nez dès la première heure et ne prend la peine de s’égarer qu'au moment où le rideau final vient jouer son rôle libérateur.
Un calvaire sans âme qui réussit à tirer le plus mauvais d’acteurs que l’on a pourtant connus très bons, c’est dire l’ampleur du désastre. Et par charité, je passe sur toutes les absurdités tournées pour faire avancer l’histoire (non parce que la mère qui fout son gamin adoré dans un bus genre barre toi voir le monstre avant d’aller s’enterrer dans une rame de métro, c’est quand même priceless). De ce ratage presque total subsiste la belle habileté qu’a Edwards à générer des ambiances pittoresques, qui rappelle l’homme qui avait réalisé ce final si poétique dans son premier film. Mais c’est tellement noyé par un ennui lourd que lorsque les placements de caméra se font ambitieux et réussis, il n’y a plus d’œil motivé pour les relever. Et c’est éteint, pour ma part, que je me suis contenté de les admirer, en me disant que tout cela était désespérément vain et définitivement dépourvu d'âme. Un sacré gâchis.
[1] . Déformation professionnelle, je m’en excuse platement.