Snake Eyes
Brian De Palma, 1998
Excellent thriller – huit clos dans lequel De Palma étale tout son savoir-faire. J'ai un rapport assez particulier à ce film, qui m'a introduit à l'oeuvre de De Palma, depuis devenu l'un de mes chouchous. Une vraie claque lorsque je l'ai découvert; un film assez représentatif du cinéma de son auteur, à la fois très ludique et poussant à la réflexion sur le pouvoir de l'image et la manipulation qui en découle.
C’est une merveille de mise en scène, depuis le formidable plan-séquence introductif de 12 minutes (truqué évidemment, mais exceptionnel) jusqu’au générique de fin, en passant par ces multiples autres plan-séquences, ces prises de vue suggestives, etc. Et bien sûr cet art de tromper le spectateur en lui faisant croire qu’il a tout vu alors qu’il n’en est rien ; un des thèmes fétiches de De Palma, ici magnifiquement traité dans l’enquête du flic Rick Santori (Nicolas Cage, excentrique et très bon) qui progresse au fur et à mesure qu’on découvre les différents points de vue de la scène du crime (l’assassinat du Secrétaire à la Défense en plein match de boxe à Atlantic City). Les points de vue des protagonistes, des témoins, des caméras. La construction narrative, avec ses flash-backs et ses coups de théâtres, entrainent le spectateur dans l’enquête tout en lui faisant comprendre que seul le réalisateur est omniscient ; si l’on ne suit qu’un personnage, un seul point de vue, on ne peut accéder à la vérité.
Le scénario est vraiment palpitant, je ne m’en lasse pas : on nous montre une cité corrompue à tous les étage où les méchants semblent cependant avoir leurs raisons pour commettre leur crime. Et puis, c’est assez rare pour être souligné, la fin du film est totalement pessimiste :
Si Cage est vraiment bon, c’est Gary Sinise qui m’impressionne le plus ici, un acteur que j’aime beaucoup et qui aurait mérité une autre carrière. De façon générale, De Palma peut compter sur un très bon casting, dans lequel on retrouve Carla Gugino, brune à perruque blonde, énième clin d’œil à Hitchcock de la part de son disciple. D’ailleurs, la B.O. de Ryuichi Sakamoto fait penser par moments aux compositions de Bernard Herrmann.
Au final, il est juste regrettable que la fin (avant l’épilogue) soit un peu facile : passé le climax de la confrontation Cage-Sinise dans la salle des caméras, on se traine longuement, dommage. Mais ça reste un excellent film, vraiment peu reconnu à sa juste valeur selon moi.
9/10