THE RAID 2
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Gareth Evans (2014) | 5/10
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The raid 2 se prend bien trop au sérieux eut égard au matériau qui l’anime, à savoir un réservoir d’artistes martiaux montés sur ressort qui ne rechignent pas à l’effort. Pourquoi alors ne pas s’assumer en tant que stomb’ movie généreuse sans aller piquer quelques miettes supplémentaires dans la gamelle du voisin. Gareth Evans, certainement surmovité par le relatif succès de son premier opus, grille les étapes, et tente de faire de cette suite un film hommage à trop de grandes œuvres en même temps, alors qu’il n’a pas les cartes en main pour exprimer cette ambition.
Vouloir mettre sur pied une grande fresque mafieuse est respectable mais il aurait fallu garder le challenge pour un tout autre film. A vouloir se faire plus gros que le bœuf, The raid 2 implose. Au lieu de jouer de son statut de tatane movie et d’aligner les combats au moyen d’un script simple et efficace, The raid 2 se perd dans les dédales d’une histoire qui se veut ample mais ne réussit qu’à générer une affreuse migraine. Pour tout développement, les repas longuets s’enchaînent, les affrontements père/fils freudiens se multiplient, pour bien nous faire comprendre que le complexe d’Oedipe qui frappe le rejeton a bien gratiné au four. Quant au dessert, celui qu’on voudrait avaler goulûment sans délai, et bien il est entreposé à la vue de tous, dans une place forte, laquelle est ornée d’une vitre blindée. « Non tu n’y toucheras pas tant que toute l’histoire n’aura pas été éclaircie, que CHAQUE personnages ne sera pas mort au moins 10 fois ».
Et quels personnages ! Entre le boss final tout droit sorti du rayon potager de ton supermarché (franchement, c’est quoi ce sweat molletonné superbement assorti à un pantalon de travail gamme vert ?), la petite aveugle qui passe tout le film à essayer de planter des clous, l’allumé du Homerun qui tape du strike comme tu poses ton meilleur carreau sous anis un soir de juillet et ce délicieux vilain boiteux auquel il ne manque que la dent en or, la caricature est poussée à l’extrême. On serait presque content que Mad Dog soit de retour, c’est le seul personnage, avec notre petit Yuka, quand il ne grimace pas trop, qui fait preuve d’une bonne dose de charisme.
Forcément, devant une telle caricature, on en vient à se dire que c’est voulu. Tous ces personnages exagérés au possible ne peuvent décemment pas avoir été choisis pour leur classe de truands inflexibles. Mais alors pourquoi inscrire tout le film dans un tel degré de sérieux ? Pourquoi, pendant 2H30 aucun personnage ne décroche un sourire, aucun dialogue ne se veut amusant, et surtout aucune scène de tatane ne se teinte d’une petite once de légèreté. Non, parce qu’à motiver chaque déferlement de poings par sa seule finition abrupte faite pour choquer, leur intérêt ne se limite qu’à une démonstration des possibilités qu'offre le corps humain pour éclater son prochain. Ou comment faire grincer des dents son public en allant si loin dans la surenchère que ce dernier prend rendez-vous pour un dentier en sortant de la séance.
Alors, c’est sur, les combats regorgent d’idées, le nier serait hypocrite. Mais ils sont animés par un tel sens du tape à l’œil qu’ils deviennent tristement épuisants. La dernière demi-heure se déguste sous perfusion, le palpitant en mode demi-vie devant le combat final entre les deux mâles alpha qui répète la même erreur que le premier film. Un affrontement qui s’éternise pour se finir en boucherie au sens premier du terme, Yuka taille son adversaire au moins aussi bien que mon pote de Cleveland lorsqu’il me réserve les meilleures pièces à la boucherie de l’Hyper U.
Gareth semble avoir conscience d’avoir manqué sa chance de livrer un pastiche intelligent plutôt qu’un hommage bancal, puisqu’il finit son film par ce petit sourire qu’on attendait, en l’assortissant d’une petite punchline McClanienne qui file la banane. Mais ça arrive bien trop tard et ça ne peut raisonnablement plus désamorcer le trop plein de sérieux dans lequel a baigné ce deuxième raid, ni sa durée beaucoup, beaucoup, mais alors beaucoup, trop longue (mais quelle idée de faire durer ça 2h30, les fans devront-ils poser une matinée pour voir le troisième opus ?).
Finalement, et malgré tous les efforts qu’elle déploie, cette suite est au moins aussi poussive que son grand frère. De sacrés moments de bravoure la traversent lorsqu’il s’agit de filmer les combats — ce plan du dessus dans la bagnole est scotchant — mais ils sont toujours aussi charcutés au montage qu’en fin de projection on passe à la pharmacie pour une cure de magnésium, histoire de retrouver le contrôle de ses pupilles. Si l’on ajoute à cela des acteurs qui n’ont toujours pas appris à jouer —Uco fait fort dans le cabotinage exaspérant— alors qu’ils sont censés jouer des rôles un peu complexe alors le soufflé The Raid 2 fait l’effet d’une préparation mitonnée par un grand chef — les chorégraphies martiales sont quand même d’un sacré niveau — qui aurait été mise au four par un apprenti cordon bleu à la mauvaise température. En bouche se déploie bien en première intention la saveur virtuose d’une association d’ingrédients réussie mais elle se fait immédiatement rattraper par un arrière goût de brûlé qui empêche toute prise de plaisir.
En bref, refilez-moi la même dose de tatane nerveuse, épurée de sa composante de fresque mafieuse trop ambitieuse que vous remplacerez par un script type revenge movie badass sans blabla inutiles (en gros facile 3/4H de moins). Arrosez le tout de punchlines bien fleuries pour inscrire le film dans une démonstration visuelle détendue, et ce sera carton plein. Parce que la fougue et l’envie sont bien présentes, mais il y a un moment, il faut assumer le côté décomplexé du genre qu’on s’approprie et ne pas vouloir manger à tous les râteliers en même temps.