Lucy de Luc Besson (2014) - 0/10
Avoir l’audace de créer un film aussi con sur l’intelligence, c’est le comble du comble. Luc Besson n’a pas peur du ridicule, qualité assez louable au demeurant. Lucy, dernier film du réalisateur français, est une course contre la montre d’une femme qui va tout faire pour utiliser toutes ses possibilités intellectuelles en un laps de temps qui se réduit de minutes en minutes pour pourquoi pas marquer à vie l’humanité et sa condition. Dépasser un état que n’a jamais connu un autre être humain, après une prise de drogue involontaire. Mais la tâche sera ardue car elle a toute une bande mafieux et flics à ses trousses. Elle s’appelle Lucy. Comme Lucy, le primate, vous voyez la corrélation, hein. Les deux Lucy se retrouveront même dans l’espace-temps, durant une courte scène. Si c’est pas mignon tout ça. D’ailleurs, c’est assez intéressant de noter, que Scarlett Johansson, dans la même année, joue le rôle de deux femmes persécutées en quête d’exploration de ses propres limites humaines : Under the skin et Lucy. Pour un résultat, bien différent. Dans Lucy, Besson aura beaucoup de mal à poser les enjeux proposant un film linéaire dont les caractéristiques vidéoludiques s’étioleront face à l’absence d’opposition que rencontrera Lucy.
Devant un hôtel, un homme demande à l’une de ses amis de lui rendre un service : donner une valise mystérieuse pour une personne qu’elle ne connait pas. On sent le coup fourré, Luc Besson nous le fait bien comprendre, avec ses insertions animalières grossières. Une souris devant un piège à fromage, un léopard face à une gazelle. Merci, Luc, prends nous pour des cons pendant tu y es. Le guet-apens est en marche, le spectateur va être pendant plus d’1h20 séquestré devant une infamie cinématographique. Ces premières minutes sur cette histoire de valise semble durer une éternité. A partir de ce moment-là, elle va pouvoir exprimer tout le potentiel maximal intellectuel et cérébral d’un humain avec l’aide d’un éminent chercheur dont le rôle servira presque uniquement de voix off pour surexpliciter le peu d’envergure d’un récit accompagné encore une fois d’insertions animalières inexplicables. Des rhinocéros en plein orgasmes, quoi de mieux pour mettre en condition.
Alors que Luc Besson aurait pu se résoudre à ne faire qu’une simple série B qui n’aurait eu que pour but de livrer la marchandise comme tout petit film d’action qui se respecte, le réalisateur français voit son œuvre, tuée dans l’œuf, par une ambition démesurée dont la bêtise crasse alourdit allégrement un film aussi subtil qu’un éléphant dans un magasin de porcelaine. Lucy reste un film d’action mal fagoté, pas si mal torché que ça, mais académique où aucune scène n’arrive à prendre une ampleur dramatique. L’intensité, la souffle, l’énergie, le dynamisme. Aucune de ses qualités habitent ce film. Les seules scènes d’actions se résument à voir Scarlett de façon plus ou moins badass rentrer dans une pièce pour flinguer des hommes ou les endormir grâce à ses pouvoirs de télékinésie. Inutile de parler la scène de poursuite en voiture faisant revenir les fantômes de la série Taxi.
Malgré ce côté cheap et désuet auquel on pouvait s’attendre, le malus de Lucy reste l’emboitement de son histoire, une script qui ne sait jamais expliquer simplement et rapidement ce qu’on comprend aisément au premier regard. Luc Besson ne sait pas exploiter un concept qui aurait pu donner vie à tout un tas d’idées et de thématiques fascinantes à engendrer : comme la perte de soi, la peur de soi, la dangerosité du potentiel humain. Le réalisateur se prend les pieds dans la tapis en jouant la carte documentariste avec ses explications scientifiques qu’on dirait écrites par Fred et Jamy, ses envies visuelles de cosmos à la Terrence Malick, le réalisateur de Léon ou Nikita n’a pas fini de nous épater, dans le mauvais sens du terme. Lucy, souffre du même syndrome que Transcendance de Wally Pfister : une créativité au raz des pâquerettes.