DUEL DANS LE PACIFIQUE
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John Boorman (1968) | 6.5/10
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• CHALLENGE DÉCOUVERTE JUILLET / AOUT 2K14 •
Duel dans le pacifique est un film fait de belles promesses. Deux monstres d'acteurs censés se livrer bataille sur une île déserte, il y a de quoi se sentir intéressé. C'est l'oeil vif qu'on se laisse donc embarquer pour une leçon de survie assénée au panache par Lee Marvin et Toshiro Mifune, qui disons-le d'emblée, portent le film sur leurs solides épaules. Pas un plan ne souffre de leur absence, Boorman promettait sur l'affiche la rencontre de ces deux légendes, il l'illustre avec une belle générosité.
Malheureusement, si le charisme est en forte présence à l'écran, les idées pour l'exploiter manquent cruellement. Boorman cisaille son film en trois étapes clichées bien pompeuses. On se montre les crocs, on se fait des papouilles sur un radeau et on se fait exploser la tête alors qu'on allait se remettre sur la tronche. Heureusement que le cinéaste gère sa narration, parce qu'il y avait de quoi s'ennuyer devant si peu de créativité. Toute la première partie, celle où il écrit la rencontre entre ces deux hommes qui se rejettent d'emblée, à cause du conflit qui les oppose, est on ne peut plus pantouflarde. Marvin, en bon ricain, la joue canaille un peu arrogante mais futée, et tente de piquer de l'eau dans la réserve de Mifune qui joue le stéréotype bas de plancher du japonais. Méticuleux, grande gueule, si borné qu'il en devient bête (l'homme se barricade quand même dans un bras de sable en proie à la marée ...). Pas spécialement enthousiasmant, vous en conviendrez.
Cela étant dit, on devine rapidement que Boorman n'a pas spécialement d'autre volonté que d'illustrer cet instinct de survie qui anime les hommes, qui se fait encore plus féroce lorsqu'ils sont ennemis, mais qui peut pourtant muter en association lorsque le bien commun peut en bénéficier. La leçon est très didactique, peut être trop, mais fonctionne. On ne s'ennuie pas, mieux, on déguste le two men show qui se joue à l'écran avec un appétit féroce. Surtout que Boorman emballe ça avec des plans naturalistes somptueux. On lui sent un intérêt vif pour les décors naturels qu'il investit. On se prend même à regretter qu'il ne concentre son attention que sur un petit lopin de terre (l'île où les deux hommes survivent se limitent à une place peu étendue) tant il l'épuise de son coup d'oeil entraîné.
Duel dans le pacifique est un film divertissant, qui vaut principalement pour ces deux symboles de virilité qui s'y partagent l'affiche et la belle maîtrise technique de son réalisateur. Pour une leçon de survie inspirée par contre, il faudra repasser. On est en présence d'une illustration balisée du genre, qui souffre également de certains choix peu judicieux, imposés au cinéaste par des producteurs désireux de vendre leur film comme une rencontre punchy entre deux acteurs physiques et énervés, quitte à imposer à la séance une fin totalement manquée qui frappe par sa débilité.