COUPS DE FEU DANS LA SIERRA
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Sam peckinpah (1962) | 8/10
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Dès son second film, Pekinpah annonçait clairement son intention de passer un coup de polish sur le western à papa. Cette annonce, il la fait dès les premières minutes de Coups de feu dans la Sierra, au moyen d'une course hippique peu commune qui verra des cavaliers aguerris perdre contre un dromadaire. La scène est atypique, amusante, mais également très forte de sens.
Sans oublier d'illustrer toutes les thématiques qui lui sont chères, et qui feront parler de lui par la suite, Bloody Sam déconstruit ce qui faisait l'ouest sauvage de l'ancien Hollywood. Entre autre, son amour de la gente féminine, qu'il expose clairement lors d'une orgie très violente, peut faire grincer des dents. Selon Bloody Sam, les femmes sont autant désirables que sources d'ennuis. Elles ne sont surtout pas fiables. Entre la mère maquerelle qui exploite ses ouailles pour faire fructifier sa fortune, la jeune naïve à l'esprit limité, ou cette âme passée qui s'est taillée une tranche de bonheur alors que son ancien amant s'est contenté d'une vie en solitaire, le cinéaste s'avère très acide envers la gente féminine. Mais il développe également des thématiques plus nobles, comme l'amitié, une valeur qui reviendra dans toute sa filmographie et qui domine ici véritablement le récit.
Elle est véhiculée par deux hommes qui, en leur temps, faisaient régner la loi et qui se trouvent à présent confrontés à leurs vieux jours, totalement abandonnés par ce pays qu'ils avaient pour habitude de défendre. Certains d'entre eux seraient alors prêts à courber leurs inflexibles principes pour rendre plus paisibles leurs derniers jours. Et la seule constante qui sauvera ces derniers, selon Peckinpah, c'est l'amitié que leur porte celui qui, lui, ne changera pas, celui qui, pour rien au monde, ne souhaite perdre l'estime qu'il a de sa personne avant de mourir. Si fort soit son propos et si violente soit son illustration, Peckinpah aime malgré tout ses personnages. Il ne manque jamais de rendre sympathiques ceux qu'ils jugent dignes d'intérêt. Le calme apparent des vieux sages inculquant la vie aux louveteaux qui les accompagnent, leur faculté à prendre rapidement les bonnes décisions, mettent en confiance un spectateur qui se met rapidement à les admirer. Alors quand le couperet final s'abat sur le petit groupe dont on s'est entiché, l'effet est total.
Avec Coups de feu dans la Sierra, Peckinpah posait les bases de ses futures réalisations et même si le film ne possède pas la maîtrise formelle de La horde sauvage, son chef d'oeuvre, il porte déjà les germes d'un talent indiscutable. Dans ce coup d'oeil, d'abord, qu'il met à profit pour filmer les grands espaces, dans sa facilité à croquer des personnages ensuite, forts en caractères, pour leur faire porter à bout de bras des principes qu'on lui devine importants. Et même si l'on n'adhère pas forcément à la globalité de son point de vue, la façon qu'il a de l'assumer pleinement ne peut que forcer le respect.